Skip to main content

Full text of "L'Association royaliste de l'Institut philanthropique à Bordeaux et la conspiration anglaise en France, pendant la 2e coalition"

See other formats





v/'*-#>;(î^ T^' / 



Caudrillier, ^ustef 

L'Association royaliste de 
l'Institut philanthropique a 
Bordeaux et la conspiration 
anglaise en Frence 




L'ASSOCIATION ROYALISTE 



1)K 



L'INSTITUT PHILANTHROPIQUE 

A BORDEAUX 

ET LA CONSPIRATION ANGLAISE EN FRANCE 

PENDANT LA 2' COALITION 



THESE 

PRÉSENTÉE A LA FACULTÉ DES LETTRES DE PARIS 



G. CAUDRILLIER 

Professeur af(ré^é d histoire au lycée de Bordeaux 



PARIS 
SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'IMPRIMERIE ET DE LIBRAIRIE 

ANCIENNE LIHRAIHIE LECÈNE, OUDIN ET c'° 
16, RUE DE CLUNY, 15 



L'ASSOCIATION ROYALISTE 



DE 



L'INSTITUT PHILANTHROPIQUE 

A BORDEAUX 



L'ASSOCIATION ROYALISTE 



DE 



L'INSTITUT PIIILANTimOPIQUE 

A BORDEAUX 

ET LA CONSPIRATION ANGLAISE EN FRANCE 

PENDANT LA 2" COALITION 



THESE 

PRÉSENTÉE A LA FACULTÉ DES LETTRES DE PARIS 



PAR 



G. CAUDRILLIER 

Professeur agrégé d'histoire au lycée de Bordeaux 



PARIS 

SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'IMPRIMERIE ET DE LIBRAIRIE 

ANCIENNE LIBRAIRIE LECÈNE, OUDIN ET g'* 
15, RUE DE CLUNY, 16 



1908 



o 



C 



.5" 
C3^ 



A LA MÉMOIRE DE MA MÈRE 



PREFACE 



Sur l'ordre de Bonaparte, les conseillers d'État Emmery, Chaptal et Cham- 
pagny ont publié, en l'an IX, un recueil de pièces saisies par la police, sous 
le titre de Conspiration anglaise. 

Ces pièces, pour les neuf dixièmes, sont relatives au complot de Hyde de 
Neuville. Hyde, avec le marquis de Crénolles et le chevalier de Coigny, se pro- 
posaient de frapper le Premier Consul à Paris, tandis que l'Ouest s'insur- 
gerait et livrerait Brest à « Monsieur ». 

Mais les dernières pièces sont relatives au complot de l'Institut Philanthro- 
pique de Bordeaux, complot découvert après celui de Hyde. 

Elles nous sont présentées sans éclaircissements préalables. 

Qu'est-ce que l'Institut? Le lecteur l'ignore. Encore moins voit- il les rap- 
ports qui unissent les deux parties de la publication, rapport entre la conspi- 
ration de l'Institut bordelais et celle de Hyde, rapport entre ces complots et 
l'intrigue anglaise. 

Cette publication, enfin, limite trop le champ de l'intrigue anglaise, car 
l'intrigue embrasse toutes les provinces côtières ou frontières de la France ; 
on la retrouve menaçante et cachée derrière les menées royalistes de l'Est et 
du Midi comme de l'Ouest. 

Nous nous proposons ici de fournir les éclaircissements qui manquent à la 
brochure consulaire : 1» expliquer ce qu'il faut entendre par Institut et 
faire connaître dans son origine et son organisation l'Institut bordelais ' ; 
2o publier les lettres et rapports de la police sur le complot philanthro- 
pique de Bordeaux '-. 

Nous voulons aussi marquer les rapports : 1° entre ce complot et les complots 
royalistes du même temps, ceux de Willot, de Pichegru, de Cadoudal, 
comme celui de Hyde, en 1799-1800 •' ; 2° entre ces complots mêmes et l'in- 
trigue anglaise, bien plus redoutable et bien plus étendue que ne le soupçon- 
nait la police consulaire '*. 

Car le gouvernement anglais ne se contentait pas de nous combattre par 
les armes. Il payait des conspirations et des soulèvements royalistes. En 
l'an VII comme en l'an VIII, <( le projet était d'enlacer les parties centrales 
de la France, les plus calmes et les moins détachées de la République, 

1. Voir l'introduction. 

2. Voir la 2'" partie. 

3. Voir en tète de chaque chapitre de la première partie les avant •propos. 

4. Voir les textes de la prciiiii^ri' partie. 



VIII PRÉFACE 

dans un réseau, dans un immense filet d insurrections qui aurait l'un de ses 
points d'attache dans l'Ouest, à proximité des flottes anglaises, l'autre en 
Franche-Comté ou à Lyon, non loin des armées coalisées, et qui, s'incurvant 
au centre, s'appuierait sur la Provence, le Languedoc et la Guyenne ». 
(Vandal, V Avènement de Bonaparte, t. I, p. 164.) 

Mais l'intrigue bordelaise, découverte en l'an VIII, se continue après cette 
date. L'Institut Philanthropique est frappé dans son chef : il survit dans ses 
membres, et le complot de lan XII a sa réplique à Bordeaux : le complot 
des plombs *. 

Ce complot, on le découvre; cependant Bordeaux reste royaliste ; l'Institut 
subsiste et, le 12 mars 1814, la garde roj^ale de Taffard Saint-Germain ouvre 
les portes de la ville au maréchal anglais Beresford et au duc d'Angoulême -. 

C'est le triomphe de l'Institut, le résultat qu'il importe de souligner comme 
conclusion de cette étude. 

Quels sont nos documents ? Il en est de publiés déjà, mais tellement incon- 
nus qu'il nous paraît utile non seulement de les analyser, mais d'en citer 
même de longs extraits. Je veux parler des brochures de Dupont-Constant, 
Mémoire historique, Exposé succinct et véridique, Essai sur l'Institut Philan- 
thropique, suivi de pièces justificatives importantes **. 

Je crois que les historiens récents du Directoire ou du Consulat n'en ont 
tiré aucun parti. J'en excepte M. Boulay de la Meurthe ^, qui s'en est servi 
pour commenter la Correspondance du duc d'Enghien. 

Certainement Chassin ne les connaît pas : il prétend que l'agence anglaise ne 
fut découverte à Bordeaux qu'en 1804. M. Aulard renvoie à Chassin. M. Daudet 
ne s'en inspire évidemment pas dans la simple note qu'il consacre à l'Institut. 
M. Vandal a trouvé trace des complots de Bordeaux dans nos archives, mais 
il laisse entendre que l'association des « Amis confédérés » ne s'est formée 
à Bordeaux qu'après la loi des otages : il n'a pas lu Dupont-Constant ^. 

1. Voir ci-dessous dossier de Papin. Cf. E. Daudet, la Police et les Chouans, 
chapitre de l'agence anglaise de Bordeaux, p. 141 et suiv. 

2. Voir Rollac, Exposé fidèle des faits authentiquement prouvés qui ont précédé et 
amené la journée de Bordeaux, au 12 mars ISllf, in-8°, Paris, imprimerie Egron, 
1816. Cf. notre conclusion. 

3. Mémoire historique des événements relatifs à l'Institut Philanthropique établi 
dans toutes les provinces du Midi, par ordre et en vertu des pouvoirs du roi en 1796, 
brochure in-8<' de 55 pages, Paris, 1814 ; Exposé succinct et véridique des services 
rendus à la cause royale depuis 1793 Jusquen 1816, par le sieur Dupont-Constant, 
in-8% pièce [Paris], imprimerie de L.-G. Michaud |1817] ; Essai sur l'Institut Phi- 
lanthropique, établi en 1796 dans les provinces méridionales de la France, par 
ordre et en vertu des pouvoirs de S. M. Louis XVIII, volume in-8° de 240 p., 
Paris, imprimerie A. Boucher, 1823. 

4. Tome II de la Correspondance, p. 21 et suîv. jusqu'à 29. 

5. Chassin. les Pacifications de l'Ouest, t III, p. 29, note; Aulard, Histoire 
politique de la Révolution, p. 636 ; Daudet, les Emigrés et la 2^ coalition, p. 247, 
note reproduite dans VHistoire de l'Emigration, t. III, p. 177 ; Vandal, l Avènement 
de Bonaparte, t. I, p. 207. — Sur le complot de l'Institut en 1800, à Bordeaux, voir 
Jullian, Histoire de Bordeaux, bibliographie du chapitre consacré au Consulat et 
à l'Empire ; Lebon, l Angleterre et l'Emigration, p. 282 ; Daudet, les Emigrés et la 
2e coalition, p. 257 ; Cf. l'Histoire de l'Emigration, t III, p. 183 (2 lignes) ; Van- 
dal, l'Avènement de Bonaparte, II, p. 171, 395, 413 (une ligne) ; une phrase de For- 
neron, Histoire des Emigrés, t. III, p. 180. 



PRÉFACE IX 

Parmi les historiens du Sud-Ouest, M. Jullian cite VEssai. Mais O'Reilly 
ne lapas consulté ^ Il connaît l'Institut par l'Exposé fidèle de Rollac et par 
les Mémoires de la marquise de la Rochejaquelein '^. 

Les documents manuscrits, nous les empruntons aux Archives anglaises, 
aux Archives nationales, aux Archives administratives de la guerre, aux 
Archives bordelaises. 

Les Archives anglaises nous renseignent sur les conspirations royalistes, 
payées par l'Angleterre, à l'époque de la 2° coalition, avant Marengo : 
conspirations de l'Est et du Midi préparées à Augsbourg par Wickham et 
l'agence de Souabe ; conspirations de Paris et de l'Ouest imaginées par 
Hyde et par Cadoudal, approuvées par le comte d'Artois et son représentant 
à Londres, Dutheil. 

Les pièces que nous publions font partie des fonds Suisse et France au 
Record Office (Archives du Foreign Office). Elles sont classées en volumes et 
par dates. Nous les complétons à l'aide de la Correspondance de Wickham 
publiée en deux volumes par le petit-fils de l'ancien ambassadeur en Suisse ^. 

Nous évitons d'ailleurs de faire double emploi avec des publications anté- 
rieures à la nôtre : avec celle de Lebon, l'Angleterre et l'Emigration *, qui 
résume la correspondance de Wickham avec Grenville ; avec celle du comte de 
Martel, les Historiens fantaisistes ■", qui, dans ses études sur les pacifications 
de 1 Ouest et la machine infernale, analyse nombre de pièces du Record 
Office. 

Aux Archives nationales, la précieuse série F nous offre cinq cartons de 
documents de police sur la conspiration de Bordeaux ou les affaires du 
Midi c. 

Nous trouvons aux Archives administratives de la guerre le dossier de Papin. 

Nous n'avons tiré qu'un faible parti des archives de la Gironde. De vaines 
recherches au greffe du tribunal nous ont prouvé que la justice n'a point été 
saisie par la police du complot bordelais. 

La correspondance du commissaire Pierre et du préfet Thibaudeau avec le 
ministère de Fouché manque presque absolument aux Archives départemen- 
tales. La série M, très pauvre, est à peine classée. La série L, très riche, ne 
renferme aucun document postérieur à l'an VIII. J'ai consulté, sans profit 

1. O'Reilly, Histoire de Bordeaux, t. VI, p. 380 et suiv. 

2 Ces mémoires ont été revus par M. de Barante, mais rédigés en grande partie 
par la marquise elle-même à la fin de l'Empire et publiés au début de la Restau- 
ration. On en a donne plusieurs éditions (je elle la 9«) ; mais les premières ne 
contiennent sur l'Institut et l'entrée des Anglais, le 12 mars, à Bordeaux qu'une 
partie des renseignements de la 6''. (Paris, Dentu, 1847.) II est donc préférable 
de se servir des dernières, surtout de celle de 1888, publiée par son petit-iils sur le 
manuscrit original. Voir la Vie de M"'° la marquise de la Rochejaquelein par 
A. Nettement, in-8° de 376 p., Paris, 1872 ; M""- d'Arvor, la Marquise de la 
liochejaquelein, in-8° de 48 p., 1893 ; Baquenier-Desormoux, Bibliographie des 
mémoires de la marquise delà Hoche jaqueletn, Intermédiaire, 1899, 5<' série, t. XXXIX, 
p. 507. 

3. Deux volumes in-S®, Londres, 1870. 

4. Lebon, V Angleterre et l'Emigration (1794-1801), in-S», Paris, 1882. 

5. C de Martel, les Historiens fantaisistes : M. Thiers, 3 vol. in-Ti, l'aris, 1885. 
J'oi publié dans la Bévue historique de novembre 1900 les lettres do (Cadoudal 
conservées aux Archives du Record Oflicc, Foreign Oflice, France, année 1800. 

0. Cartons G25G (dossier 5121), 625â-6260, 6419 (dossier 8375). 



X PRKFACE 

souvent, les registres de l'Administration centrale du département, comme 
les registres très incomplets d'arrêtés des préfets, les listes de notabilités, les 
listes de membres de la Légion d'honneur après 1814, les pétitions à la 
duchesse d'Angoulême qui protégea ouvertement, à Bordeaux, les anciens 
membres de l'Institut. 

Les précieuses Tablettes de Bernadeau, encore inédites à la Biblio- 
thèque municipale, m ont fourni nombre d'indications. Je les ai contrôlées 
aux Archives municipales, où l'incendie heureusement n'a pas détruit les 
arrêtés du Bureau central. 

Enfin quelques archives privées m'ont été ouvertes*. 

Dans quel ordre publier ces documents ? Il nous a semblé nécessaire de 
grouper ensemble les pièces de même origine, et aussi de suivre l'ordre des 
dates. 

C'est pourquoi nous avons rejeté dans une introduction préliminaire les 
renseignements généraux de provenance et de dates diverses sur l'Institut 
Philanthropique de Bordeaux, son origine et son organisation. 

Dès lors il nous est loisible de partager en deux masses les documents an- 
glais et les documents français, les premiers relatifs à la conspiration an- 
glaise, les autres à la découverte du complot bordelais ou à ses suites ; les 
premiers antérieurs généralement à cette découverte, les autres postérieurs. 

Tout en nous attachant à l'histoire de l'Institut bordelais, des conspira- 
tions royalistes et de l'Intrigue anglaise, en l'an VII et en lan VIII, il nous 
a paru nécessaire de remonter aux origines de cet Institut comme à l'ori- 
gine de ses rapports avec l'Angleterre. 

Les Instituts se fondent avec l'approbation de Grenville, se développent en 
l'an V, grâce à Dandré, avec l'argent de Wickham. Il faut le savoir pour 
comprendre pourquoi Dandré et Wickham utilisent les Instituts contre le 
Directoire et le Consulat, en l'an VII et l'an VIII, pendant la 2^ coalition, 
comme ils l'ont fait en l'an V, pendant la première. 

1. J'adresse mes remerciements les plus vifs à M. de Boissac, qui a bien voulu 
me communiquer des documents de famille, à M. Harlé, auquel je dois les ren- 
seignements relatifs à Roger, à M. Céleste, bibliothécaire de la ville de Bordeaux, 
qui m'a mis sur la trace d'intéressantes recherches. 



INTRODUCTION 



I. — l'institut philanthropique a bordeaux. 

Après l'échec de la grande insurrection de l'Ouest, en 1796, le parti royaliste 
organisa en France une conspiration permanente et secrète contre la Répu- 
blique. L'agence royale de Brottier fonda des sociétés sur le modèle maçon- 
nique S sociétés auxquelles les historiens « n'ont peut-être pas prêté assez 
d'attention )) et qui, sous apparence de défendre le pays contre les anar- 
chistes, ont eu pour but réel de détruire la République. — Ce fut un mem- 
bre de l'agence, le chevalier Despomelles, qui traça le plan de ces sociétés. 
Le plan nous est connu surtout par le Règlement de la coterie des Fils légi- 
times et le prospectus de Vlnstitiit Philanthropique -. 

Les sociétés de chaque département avaient à leur tête un président qui 
correspondait avec le centre de correspondance (alors Paris). Dans chaque 
canton, un affidé tenait le président au courant des mouvements de l'opinion, 
du vote des assemblées primaires, et recrutait de nouveaux membres 
à l'Institut. Chaque membre prêtait le serment de se conformer aux règle- 
ments de l'Institut, de ne révéler à personne les signaux de reconnaissance, 
d'obéir aux instructions reçues de l'afïidé dans les assemblées primaires ou 
du président dans les assemblées électorales. Ces sociétés avaient pour mis- 
sion au moins apparente de rapprocher « les honnêtes gens », de les obliger 
à se rendre aux assemblées primaires et ensuite à accepter les emplois aux- 
quels le gouvernement les appelait, d'empêcher l'élection des « anarchistes )) 
(jacobins), de « seconder le gouvernement », d'être son œil, sa sentinelle, 
son « corps de réserve » en cas de lutte avec eux. 

Dans ces sociétés cependant une minorité d'hommes agissants, connus pour 
leur dévouement à la royauté, formait une coterie étroite, celle des « Fils 
légitimes », à côté de la grande masse passive, celle des «Amis de l'ordre », 
ignorante du but secret que poursuivaient les fondateurs. 

1. Voir ci-dessous le mémoire des membres de l'agence royale, communiqué 
par le duc d'Harcourt au ministère anglais {n<* 1). Voir Chassin, Les Pacifications^ t. III, 
p. 25: < Ce jacobinisme contre-révolutionnaire, auquel les historiens n'ont peut-ôtre 
pas prêté assez d'attention. » 

2. Cf. Auiard, Histoire, politique de la Révolutiont p. 636 et 678, d'après Chassin, 
les Pacifications, t. III, p. 24, 25. « Vous avez le règlement de ces deux Instituts, » 
écrit Duverne aux Directeurs le 11 ventûse an V. Le Directoire prit le parti de pu- 
blier ceit règlements à la suite d'une délibération mentionnée dans les Mémoires de 
liarras,II, p. 347. 



XII INTRODUCTION 

Tout laisse croire que ces Fils légitimes devaient servir de chefs à l'armée 
d'insurrection, le jour où l'ordre du roi l'appellerait aux armes. C'étaient 
les (( fidèles )) entre les fidèles, connus des « commandants de circonscriptions 
militaires )) dont le règlement du 5 avril 1797 définissait les attributions * : 

« Art. 20. — L'existence et l'organisation du Conseil royal sera notifiée 
officiellement aux commandants des diff'érentes circonscriptions... 

« Art. 21. — Le Conseil royal établira dans chaque circonscription mili- 
taire un conseil particulier dont il déterminera l'organisation ; ces conseils 
particuliers rempliront chacun dans leur ressort respectif et sous les ordres 
du Conseil royal les mêmes fonctions qui lui sont attribuées dans tout le 
royaume. Ils seront présidés par le commandant delà circonscription et 
composés de six membres, outre le président, lesquels seront pris en nombre 
égal, autant que les circonstances pourront le permettre, dans les trois ordres 
de l'Etat. Le Conseil royal les instituera sur la présentation du commandant, 
à qui leurs pouvoirs seront adressés pour leur être remis, et il donnera au 
conseil particulier, avec la mesure que sa prudence lui suggérera, la connais- 
sance des principes que nous avons exposés dans les instructions annexées au 
présent règlement, afin qu'ils se dirigent en conséquence. » 

Ces circonscriptions militaires devaient être soumises au Conseil royal ; 
mais ce Conseil devait rendre compte des changements qu'il effectuait dans 
leur commandement ou leur étendue au comte d'Artois pour les provinces de 
Normandie, de Bretagne, de Vendée, au prince de Condé pour celles d'Alsace, 
de Franche-Comté et de Lyonnais, etc., directement au roi pour les autres. 

Il nous paraît douteux qu'à si peu de distance de la fondation de l'Institut, 
et dans un moment où la royauté ne pouvait trouver un grand nombre d'a- 
gents sûrs et fidèles, ce partage de la France en circonscriptions militaires 
fût sans rapport avec le partage du royaume en Instituts. Ces commandants 
militaires, correspondants du Conseil siégeant à Paris, présidents d'un conseil 
local de six personnes, sont l'origine des visiteurs établis par le prétendant 
comme commandants à la fois civils et militaires de plusieurs départements 
et même de plusieurs provinces. 

Cette organisation secrète facilita les succès du parti royaliste aux élections 
de l'an V. Elle aurait assuré son triomphe aux élections de l'an VL Sous 
l'influence de Dandré, l'ancien constituant, que des admirateurs naïfs consi- 
déraient, en 1791, comme l'héritier de Mirabeau, Dandré caché à Paris, par 
Wickham,pour combattre par des manœuvres secrètes le Directoire, les Insti- 
tuts Philanthropiques s'étaient multipliés en France, et surtout dans le Midi. 

Le coup d'Etat de Fructidor leur porta un coup sensible sans les détruire. 

Ils perdirent de leur influence ou disparurent dans la région parisienne, 
après la fuite de Dandré en Suisse, celle de La Barberie et de La Trémoille à 
Londres, celle de Despomelles on ne sait où. 

En revanche, l'Institut Philanthropique restait organisé fortement dans le 

1. Ce règlement, rédigé à Blankembourg et porté au prince de Condé par 
M. de Mésière (Wells dans la correspondance), secrétaire et ami du chevalier 
Despomelles, organisait à Paris un conseil royal de 12 membres, dont M. de la 
Trémoille était le chef. Un chapitre du règlement est consacré aux circonscriptions 
militaires. Cf. Caudrillier, la Trahison de Pichegru, p. 325 et 332, note ; Boulay de 
la Meurthe, Correspondance du duc d'Enghien^ t. II, p. 21. Le règlement est con- 
servé dans les archives de Chantilly, série Y, t. I, f» 129. 



INTRODUCTION XIII 

Midi, sous la direction de l'abbé Fenis de Lacombe, député suppléant du 
clergé de Tulle aux Etats généraux de 1789 *. « C'était à lui que la corres- 
pondance était adressée. Il la faisait parvenir aux présidents de chaque so- 
ciété qui lui étaient connus. Les lettres lui arrivaient avec l'indication simple 
du département pour lequel elles étaient destinées. Il y mettait les noms, les 
adresses, et les expédiait. » L'abbé Lacombe eut bientôt comme auxiliaire le 
comte de Floirac, qui, passant en 1798 d'Hambourg en Angleterre, pour, 
de là, se rendre en France incognito, avait été jeté par la tempête sur la 
côte de Normandie, arrêté, emprisonné, mais sauvé de la mort par l'Institut 
Philanthropique qui lefit enlever ^. 

La police consulaire a connu l'organisation de l'Institut dans le Midi, après 
l'an XII. A cette date, la police secrète rédigeait une note pour le conseiller 
d'Etat chargé du 3^ arrondissement, Pelet de la Lozère : « Il a existé en 
l'an V dans le Midi une association royaliste connue sous la dénomination 
d'Institut Philanthropique. L'organisation avait été faite par Dandré et 
Wickham. Les présidents que l'association avait dans chaque département 
tenaient leurs pouvoirs du roi. Chaque institut avait dans les différents 
cantons de son arrondissement des agents et des correspondants chargés de 
dresser l'état des personnes qui pourraient dans l'occasion être employées ou 
armées pour le rétablissement des Bourbons. Ils désignaient les chefs qui 
devaient commander. Ils étaient encore chargés particulièrement de diriger 
les élections, et dans cette partie, on se rappelle quel fut dans un temps 
leurs succès. Cette association poursuivit ses maœuvres avec beaucoup d'ac- 
tivité jusqu'à l'époque de la victoire de Marengo qui parut les déconcerter. » 

Une note jointe énumère les départements soumis à l'influence de l'Institut : 
ce sont en général ceux des régions du Massif central, des Pyrénées, des 
Alpes et de la Garonne : « Rhône, Ain, Isère, Mont-Blanc, Drôme, Hautes- 
Alpes, Basses-Alpes, Var, Bouches-du-Rhône,Vaucluse, Landes, Gers, Basses 
et Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Ariège, Tarn, Loire, Puy-de- 
Dôme, Creuse, Haute-Vienne, Charente, Charente-Inférieure, Gironde, Dor- 
dogne, Corréze, Cantal, Haute-Loire, Ardèche, Lozère, Gard, Aveyron, Lot, 
Lot-et-Garonne, Haute-Garonne ^.y> 



1. Voir sur Louis Fenis de Lacombe, Dupont, Essai, p. 40 et 41, et note pour le 
conseiller d'Hltat Pelet de la Lozère, dans Boulay de la Meurihe, Correspondance du 
ducd'Enghien, t. II, p. 26. La police consulaire ne parvint pas à l'arrêter. On sait 
seulement qu'il s'était montré à Tulle au commencement de l'an XI. Il mourut à 
Paris en juillet 1822, plus que septuagénaire. Voir, p. 185 de l'essai, le certificat 
qu'il donne à Dupont en 1816. Cf. d'Hauterive, La police secrète du premier Empire 
p. 61 et F, 6606, dos. 56. 

2. Le comte de F'ioirac eut une destinée plus agitée : la police impériale le fit 
arrêter en 1804, comme complice de Pichegru. Il resta en prison plusieurs mois. 
Sous la Restauration, il devint préfet de l'Hérault. Disgracié sans doute t\ cause de 
son zèle ultra-royaliste, il fut élu député par ses administrés en 1817. Cf. Dupont, 
Essai, p 38 à 40 et 182. Cf. d'Hauterive, p. 16 (n"» 55) et p. 37 (n» 121). 

3. Houlay de la Meurthe, Correspondance ^ t. II, p. 25 et suiv. — La police con» 
naissait les Instituts du Midi, non seulement par la découverte de la conspiration 
de Bordeaux, mais par les déclarations de Duclos de la Morliôre (Edouard), de 
l'abbé Rougier, de Caire. Voir résumé de la déclaration de l'abbé Rougier dans 
d'Hauterive, p. 37 (n<> 121), ctifeid.p. 112 (n» 351)le8 ropports de Caire avec Puivcrti 
ogcnt de Willot daus le Midi. 



XIV INTRODUCTION 

Mais on peut dire que nulle part llnstitut Philanthropique ne fut organise 
plus fortement qu'à Bordeaux. D'après ses Mémoires, Fouchése félicitait, en 
1805, que (( l'Association de Bordeaux, une des plus compactes, fût dissoute ^ », 
C'est à Bordeaux qu'était « le foyer des grandes intrigues », écrit son bio- 
graphe M. Madelin : à Bordeaux, l'opposition royaliste restait « constamment 
très forte ; Fouché la signalera sans cesse, y fera spécialement surveiller les 
sociétés 2)). L'auteur des mémoires de Fauche, de Beauchamp ^, écrivait 
aussi : « Des partis royalistes se montraient à découvert (an VII) ; c'était 
surtout dans la Guyenne, laSaintonge,rAngoumois, quela Fédération prenait 
une force régulière. Ces provinces étaient liées entre elles par une association 
dont Bordeaux était le centre, et dans laquelle on comptait 20.000 hommes 
militairement organisés. » 

Cette association avait été formée par un Américain des Antilles, Dupont 
(de son nom philanthropique, Constant), dont la vie avant cette époque est 
pour nous un mystère et qui se disait agent de change en l'an VIII, pour 
couvrir les opérations financières auxquelles il était mêlé comme visiteur de 
l'Institut *. Il avait trouvé dans la capitale de la Guyenne un terrain tout 
préparé pour cette organisation. Bordeaux avait souffert cruellement de la 
Révolution depuis la déclaration de guerre avec l'Angleterre. Cette ville, qui 
faisait un commerce immense avec les Antilles et surtout avec Saint- 
Domingue et dont certains négociants, comme Bonnaffé, possédaient une 
fortune considérable et des flottes de trente vaisseaux, perdit en quelques 
années son importance commerciale, par suite de la guerre avec l'Angleterre 
et de la révolte des noirs ''. La suspension des affaires entraîna la banque- 
route du haut négoce. Les ouvriers du port et les artisans de la ville cessèrent 
de travailler. Ce fut la misère et le mécontentement partout. 

La population rendit la Révolution responsable de tant de ruines ; peu 
de villes accueillirent la République avec cette défaveur. Le parti royaliste se 
recruta dans toutes les classes, fut assuré d'une popularité qu'il n'avait point 
dans la capitale et d'une complicité quasi générale. 

Nulle part la Jeunesse dorée ne régna en maîtresse comme à Bordeaux. 
Au théâtre, les jeunes gens empêchaient de jouer la Marseillaise , prenaient 
le ce municipal )) au collet, déchiraient son écharpe qu'ils appelaient (( licol » , 
réclamaient les pièces antijacobines, et protestaient avec violence quand on 
ne les jouait pas. Il fallut établir une barrière armée de pointes de fer 



1. Mémoires de Fouché, t. I, p. 344. 

2. Madelin^ Fouché, t. I, p. 427, 429, 511. 

3. Qui fut employé dans les bureaux de la police, Mémoires de Fauche-Borelj 
t. II, p. 338. 

4. Dupont-Constant. Louis Dupont, né en 1758, à Port-de-Paix, île et côte de 
Saint-Domingue, où il était propriétaire d'une habitation, établi à Bordeaux en 
1789, s'en éloigne pendant la Terreur sous prétexte d'aller prendre les eaux de 
Barèges, y revient en 1794. Voir ci-dessous la fondation de l'Institut, son arrestation 
en juin 1800, son élargissement en décembre 1801 sous la surveillance de la police. 
Se retire à Paris où il tient un bureau de tabac sous l'Empire, sollicite un emploi 
(sans doute une préfecture) sous la Restauration, n'obtient pas sa nomination en 
Corse, est envoyé à la Guadeloupe. 

5. Cf. un important mémoire manuscrit de la bibliothèque de la Chambre dé 
commerce de Bordeaux, Mémoire du Bureau consultatif de commerce de Bordeaux. .i 
à Vépoque du 20 frimaire an VIII. 



INTRODUCTION XV 

entre le parterre et le théâtre pour les empêcher de sauter sur la scène. 
Un soir de thermidor an IV, l'administration départementale interdit de 
jouer l'Intérieur des Comités révolutionnaires, car la pièce avait donné lieu 
la veille à des troubles graves. Une députation de jeunes gens, ayant à leur 
tête Brochon, fils de l'avocat, et Destang *, se rend auprès du « départe- 
ment ». Le jeune Brochon prend la parole, déclare qu'il parle « au nom du 
peuple » ; n'ayant pas obtenu gain de cause, il donne rendez-vous à ses cama- 
rades pour le lendemain; l'administration doit fermer les théâtres ce soir-là. 

— Peu de temps après, un jacobin connu, Barsac, sort dans les rues de la 
ville : la jeunesse le poursuit à coups de canne et de pistolet. Barsac n'é- 
chappe à la mort qu'en se réfugiant au Château-Trompette. — L'imprimeur 
jacobin Delormel publie un placard bordé de rouge. Les jeunes gens se 
rendent chez lui, cassent, brisent, jettent les presses à la rue. Les Bordelais 
racontent en riant qu'ils ont établi « un tribunal de cassation », qu'ils sont 
«allés prendre du caractère ». 

Mais les républicains essaient de s'organiser, forment un cercle, celui de 
l'Académie : la Jeunesse casse les vitres du cercle, assomme ses défenseurs. 

— Un ancien maire jacobin de Toulouse, Goursac, est arrêté à deux lieues 
de Bordeaux par onze jeunes gens masqués qui le forcent à descendre de voi- 
ture, le font mettre à genoux et le tuent de deux coups de pistolet. — Le 
général Lannes passe à Bordeaux : les jeunes gens - font la chaîne sur les 
allées de Tourny pour lui barrer la route, et, le soir, au théâtre, insultent 
ses aides de camp dans sa loge et les provoquent ^. 

C'est la Jeunesse de Bordeaux qui a fondé la première association royaliste 
que nous trouvons à l'origine de l'Institut. Cette association, la Société de 
Belleville,ïondée par Cornu sous la Terreur *, présidée après sa condamna» 
tion et sa mort sur l'échafaud "' par une des futures gloires du barreau bor- 
delais, Bavez *', obligée de se dissoudre au plus fort de la Terreur, s'était 
reconstituée après Thermidor sous le nom de Société du Gouvernement. Rai* 
liée en apparence au gouvernement et formée pour le défendre contre les 
entreprises des jacobins, elle comprenait en réalité ses pires ennemis. Le 
créole Dupont, revenu à Bordeaux, d'où il s'était enfui pendant la Terreur 
pour échapper aux poursuites dont il était l'objet, présidait la société nou- 
velle au commencement de l'an V. 



1. Qui fut un des agents les plus actifs de l'Institut. Le père de Brochon faisait 
partie du conseil secret de cette société. 

2. En particulier Peyronnet, le futur ministre de Charles X. 

3. J'emprunte la plupart de ces détails aux curieuses Tablettes de Rernadcau, 
manuscrites (Bibliothèque municipale de Bordeaux), voir au 5 nivôse an IV, au 
5« complémentaire au IV, aux 27 frimaire, 2 vendémiaire, 29 messidor, 6 thermidor 
on V, 21 nivôse et 20 germinal an VI. Cf. Archives départementales, série L, 
port. 27, liasse 3. papiers Vivie, t. XX. 

4. Rolloc, p. 13. Cf. 0'Reilly,p. 380. 

5. 24 juin 1794 

(i. Voir (^hauvot, Histoire du Barreau bordelais cl F'cret, Slatislique de liordeaaxt 
liiographie, t. III, p. 530. Hovez est né à Lyon, mais il a quitté celte ville pout* 
échapper aux révolutionnaires, est arrivé à Bordeaux en décembre 1792, s'est 
marié en janvier 1796, ce «{ui explique pourquoi il cesse de jouer un rôle dans 
l'Institut. Député sous la Restauration, président de la Chatnbro des députés, paît' 
de France, mort ù Bordeaux en 1849. 



XVI INTRODUCTION 

Il avait publié des factums royalistes en 1793 ; il en publia deux à la veille 
des élections du second tiers, une Adresse aux assemblées primaires, une autre 
A l'assemblée électorale: les élections primaires furent favorables au parti 
royaliste, qui, faute d'entente, ne sut pas assurer son succès dans l'assem- 
blée électorale. 

La nécessité d'une union plus étroite entre les royalistes se faisait sentir, 
lorsqu'un commissaire du Prétendant, Dubourg de Pourquerie *, agent du 
roi pour le Languedoc, passa par Bordeaux et fut présenté à Dupont par un 
royaliste de Bordeaux, Gibert de Moras. Ce fut sans doute dans les derniers 
mois de 1796 ou les premiers de 1797. Dubourg engagea Dupont à former un 
Comité royaliste, capable de jeter les fondements d'une organisation civile 
et militaire et, quand il connut le Cercle du Gouvernement, il l'encouragea à 
le développer 2. 

Les membres de ce cercle furent au nombre des manifestants qui, le 
28 messidor V (16 juillet 1797), allèrent casser les vitres du Cercle jacobin de 
l'Académie ; Dupont, dans son Essai, rappelle le fait après avoir relaté la 
mission de Dubourg, avant de raconter celle de Caire (Jardin). 

Cet envoyé de Dandré vint à Bordeaux dans l'été de 1797 : nous pouvons 
avec vraisemblance fixer l'époque de son passage. Son voyage à Bordeaux 
marque la date de la fondation de l'Institut dans cette ville. 

« Un autre commissaire du roi, écrit Dupont, M. Jardin ^, arriva à Bor- 
deaux à cette époque. Il me porta l'ordre d'établir l'Institut Philanthropique 
dans l'arrondissement que je dirigeais... Après m'avoir remis le prospectus 
de l'Institut et les instructions secrètes, il partit pour Paris. Il me laissa 
aussi toutes les adresses pour établir ma correspondance avec le commissaire 
du roi dans les autres arrondissements et pour concerter avec eux mes opé- 
rations ultérieures. Cette organisation fut bientôt faite. J'en avais les éléments 
dans le cercle que j'avais formé. » Avant le départ de Caire, Dupont lui avait 

1. Dupont l'appelle de Pourquerie-Dubourg (Voir Mémoire historique, p. 7; Essai, 
p. 47-49); Fabre de l'Aude, Histoire secrète du Directoire, t. IV, p. 185, Dubourg de la 
Pourquerie ; elles Papiers saisis à Bayreuth, p. 259 et 273, Dubourg de Pourquery. 
Cet agent du prétendant pour le Languedoc mourut à Augsbourg en 1800. Il joua 
un rôle dans l'insurrection toulousaine de 1799. 

2. Remarquer la différence entre le récit du Mémoire historique, p. 8 et 9, et celui 
de VEssai, p. 48-49. Dupont a une tendance à exagérer son rôle. Il prétend dans 
le mémoire qu'il a fondé le Cercle du Gouvernement en suite des instructions que 
lui a données Dubourg, ce qui est faux. Dans VEssai, il reconnaît que le Cercle est 
antérieur au voyage de Dubourg, bien qu'il s'attribue encore la fondation du 
Cercle. 

3. Dupont, Essai, p. 51: « M. Caii-e (Jardin), qui depuis la 2^ Restauration a été 
nommé lieutenant général de police à Marseille, où il est mort. » — La police 
l'arrêta le 20 mars 1804 et il fit une déclaration, Boulay de la Meurthe (t. II, 
p. 29). Dans VEssai^ Dupont donne comme date de son passage « l'été de 1796 », 
mais il avoue qu'il écrit de mémoire et n'est pas sûr des dates. La date de 1797 
paraît bien plus vraisemblable, d'abord parce que Dupont, dans l'Essai, place la 
fondation de l'Institut après l'affaire du cercle de l'Académie et, dans VEssai 
comme dans le Mémoire, après les élections de l'an V (mai 1797); ensuite parce 
que Dandré annonce à Wickham en juillet 1797 qu'il s'occupe de l'organisation 
des Instituts du Midi (Voir ci-dessous, pièce 2) et en août qu'un voyageur lui 
arrive du Midi, Or ce voyageur paraît bien être Caire, qu'il renvoie en septembre 
dans le Midi après le coup d'Etat (Cf. pièce 3), et qui passe à Bordeaux pendant 
l'été, d'après Dupont. 



INTRODUCTION XVII 

déjà présenté les membres du Comité secret qui devait présider à la forma- 
tion du nouvel Institut, Duchesne de Beaumanoir *, ancien subdélégué de 
l'inteudauce de Bordeaux, l'avocat Brochon '^^ père d'un des chefs de la Jeu- 
nesse, l'officier du génie Delerse, commandant du pâté de Blaye, le négo- 
ciant Gassiot '^', et Caire leur avait fait prêter le serment philanthropique. 

Dans le même temps, la marquise de Donnissan recevait de « Monsieur )) 
l'ordre d'établir une association semblable dans le Midi. Deux anciens 
officiers des armées vendéennes, Forestier "^ et Céris ^, lui apportèrent, en 
mai 1797 ^, une lettre du comte d'Artois ". 

M'iie de Donnissan^, fille du duc de Civrac, dame d'atour de Madame Vic- 
toire avant la Révolution, vivait retirée dans le château de Citran (Médoc) ou à 
Bordeaux, avec sa fille, M'ae de Lescure ^, veuve du général vendéen. Celle-ci 

1. Duchesne de Beaumanoir, qui remplaça Dupont arrêté comme visiteur tem- 
poraire de l'Institut en 1800, appelé Franc-Fidèle par les Philanthropes {Mémoire 
historique, p. 38, Essai, p. 53, 10\ Cf. Rollac, p. 210), avait été subdélégué de l'inten- 
dance de Guyenne sous Dupré de Saint-Maur. Il fut un des érudits les plus remar- 
quables de Bordeaux dans ce temps-là, posséda une collection importante de 
livres, tableaux, médailles. Membre de 1 Académie de Bordeaux en 1784, directeur 
en 1788, membre de l'association littéraire du Musée ; était maire de Marlillac en 
1815. Voir Laboubé, notes manuscrites à la Bibliothèque municipale de Bor- 
deaux ; Féret, Statistique, t. III. 

2. Brochon (Guillaume), né à Bordeaux en 1729, mort dans cette ville en 1814, 
une des gloires du barreau bordelais, jurât avant 1789, emprisonné sous la 
Terreur. (V. Féret, Statistique, et Chauvot, Le Barreau Bordelais.) 

3. Delerse ou Delers, Mémoire, p. 40 ; Essai, p. 53 et 70. Gassiot, Mémoire, p. 8 ; 
Essai, p. 46, 53 ; Rollac, p. 210. 

4. Henri F'orestier (et non marquis de Forestier), né en Vendée, à laPommeraye, 
en 1775, fils d'un cordonnier, étudie la médecine, puis joue un rôle militaire impor- 
tant dans les guerres de Vendée, d'abord aux côtés de Henri de la Rochejaquelein, 
puis du prince de Talmont, etc. ; blessé grièvement à Cirières en Vendée, après la 
reprise d'armes de 1799. L'abbé B«rnier avait demaiidé pour lui au premier consul 
un grade dans l'armée française ; ne l'aj'ant pas obtenu, il prit part au complot 
des Plombs en 1804 ; condamné à mort à Nantes par contumace en 1805, il se 
réfugia en Angleterre, à Londres, où il mourut en 1806. Cf. Chassin, Pacifications, 
t. m, p. 616, 744; Daudet, la Police etlesCliouam, p. 152 etsuiv.; Rollac, p. 20,23 ; 
marquise de la Rochejaquelein, p. 228, 234. 

5. Le chevalier de Céris, né à la Guadeloupe en 1773, émigré en 1791, moins 
connu que le précédent dans les guerres de Vendée, fait prisonnier trois fois, fut 
avec Forestier un des organisateurs du complot de 1804, revint en F'rancc en 
1814, n'obtint pas de grade militaire, disparut en 1816. Voir Chassin, t. 111, p. 744 ; 
Daudet, la Police et les Chouans, p. 153 et suiv. ; Rollac, p. 20, 23 ; marquise de la 
Rochejaquelein, p. 228, 234. 

6. Date donnée par la marquise de la Rochejaquelein, p. 228. (^f. ci-dessous, 
le Rapport fait au ministre. Il fixe la date de 1796. Voir plus haut les raisons 
qui me font croire que l'Institut n'a été fondé à Bordeaux qu'en 1797, dans 
Télé. 

7. Dupont soutient dans son Essai, p. 53 et 54, que le comte d'Artois n'a point 
provoqué la création de l'Institut, qu'il y est resté absolument étranger. Pourtant 
il nous paraît dilïicile de douter des allirmations de la marquise, p. 228 et 229. 
Cf. Rollac, p. 14 et 15. Rollac suit le récit de la mar({uise et donne la date 
de 1796. 

8. Le marquis de Donnissan, grand-sénéchal de Guyenne avant la Révolution, 
mourut sur l'échafaud, à Angers, en 1793. Voir Itiographie Michaud et Fercl, 
Statistique, t. III. — Une rue Donnissan à Bordeaux. 

9. Murie-Louise-Victorino do Donnissan, née à Versailles en 1772, niorlc en 
1857, fille du précédent et de Marie-Françoise de Durforl-Civrnc, se réfugia ovec 

b 



XVIII INTRODUCTION 

épousa plus tard le marquis Louis de la Rochejaquelein. Or Forestier avait 
servi sous les ortlrcs d'Henri, frère de Louis : ;"i ee litre, il était eonnu de 
M"'i- de Lescure. M'"« de Domiissau lui avait donné une lettre de reconimau- 
dation pour le duc d'ilavré, un de ses amis, et le due de Lorges, sou frère, 
au mouient où, après la pacification vendéenne de 179(), il s'était rendu en 
Angleterre. 

Le duc de Lorges, ancien maréchal de camp, qui avait joui d'une grande 
faveur auprès de Louis XVI; possesseur de biens étenâus dans la Guyenne, 
avait émigré en 1791, puis s'était retiré à Londres, après une campagne in- 
fructueuse à l'armée des princes, et avait fait partie de l'expédition du comte 
d'Artois à l'île d'Yen. Tout en sollicitant du service dans l'armée anglaise 
{il devint aide de camp de Lord Moira, vice-roi d'Ecosse), le duc songeait à 
organiser en Guyenne nue Vendée nouvelle dont il aurait le commandement. 
Il obtint du Prétendant le titre platonique de gouverneur de la Guyenne * . 
Duveriie annonçait le 11 ventôse, l'an V, « qu'à Bordeaux allait se rendre le 
duc de Lorges "^ » Ses fils, cette année-là, parcoururent la Guyenne, déguisés 
en marchands, conduisant une voiture encombrée de pacotille et menée par 
des mulets •^. Une lettre de 1800 nous prouvera que l'Institut bordelais 
comptait sur lui pour prendre le commandement de l'insurrection giron- 
dine. 

Le duc complota, sans doute avec Forestier, d'établir une organisation 
royaliste dans la Guyenne, et sollicita du comte d'Artois l'envoi d'une lettre 
officielle adressée à sa sœur pour l'engager à y travailler. 

Après avoir reçu la lettre du comte d'Artois, M'"^e de Donnissan consulta 
un de ses amis, ancien procureur au Parlement de Bordeaux, Dudon, et son 
fils, Dudon de Lestrade, pour leur demander ce qu'elle devait faire en la 
circonstance. Les Dudon lui apprirent que Dupont dirigeait une association 
royaliste. Dupont fut mis en rapport avec la marquise et avec son conseil, 
composé de Dudon, de Dey naud, inspecteur de l'enregistrement, qui avait 
appartenu aux finances de « Monsieur », et de l'abbé Jagault, ancien secré- 
taire du Conseil supérieur de la Vendée *". On envoya en Angleterre l'abbé 
pour annoncer au comte d'Artois l'organisation de l'Institut. 

ses parents à Citran (Médoc) dès les journées d'octobre 1789, y épousa M. de 
Lescure en 1791, le suivit pendant les guerres de Vendée où il fut tué en novembre 
1793, revint à Citran après la pacification, mais fut obligée de se réfugier deux 
fois en Espagne, comme prévenue d'émigration, épousa en 1802 Louis de la Roche- 
jaquelein, qui fut tué pendant les Cent-Jours en Vendée. — Le château de Citran 
appartient aujourd hui à la famille Clauzel. 

1. Biographie nouvelle des contemporains : Jean-Laurent de Durfort, duc de 
Loi'ges, né en 1746, un des menins de Louis XVI à l'époque de son mariage, 
colonel du régiment de Royal-Piémont, maréchal de camp en 1788, émigré en 1791 
avec ses deux fils, forme un corps de cavalerie à Limbourg, fait la campagne 
infructueuse de 1792 à l'armée des princes, rentre en France eu 1814, est fait 
lieutenant général et pair, est à Bordeaux en 1815 avec la duchesse d'Angou- 
lême. 

2. Barras, t. II, p. 328. Cf. Rollac, p. 211. 

3. Rapport de la sûreté générale du 1^"" complémentaire an XII, dossier Cazalet, 
dans Archives départementales de la Gironde, série M. 

4. D'après la marquise de la Rochejaquelein, p. 229, et Rollac, p. 209, qui con- 
sidèrent le conseil de la marquise comme le conseil secret de l'Institut. Les Dudon 
meurent avant le complot de 1800. Le père, né à Bordeaux en 1717 et mort dans 



INTRODUCTION XIX 

L'association resta organisée comme elle Tétait, avec son Conseil général, 
distinct de celui de la marquise, conseil dont faisaient partie Brochon, 
Duchesne de Beaumanoir, Gassiot ^. Mais l'influence du Conseil intime de 
M'iie de Donnissan, et par conséquent celle du duc deLorges, resta sensible 
par le choix que fit Dupont du « général » Papin, ami de la marquise, 
comme général commandant des forces de llnstitut 



II. — LES INSTITUTS DU MIDI (BORDEAUX ) APRÈS FRUCTIDOR. 

L'Institut bordelais était doue oiganisédans les mois qui précédèrent Fruc- 
tidor -. Cette organisation, et celle des autres Instituts du Midi, fut modifiée 
Tannée suivante. «Environ un mois après (le 18 fructidor), raconte Dupont, 
je reçus Tordre de me rendre de suite à Ljon. L'agent principal du Midi 
(Tabbé de Lacombe) avait appelé tous les présidents de TInstitut. Je fus le 
seul qui osât faire ce voyage. Voj-^ant quaucun autre n'arrivait, il me fit part 
de l'objet de cette convocation. Il s'agissait de faire, dans Torganisation de 
TInstitut Philanthropique, des changements essentiels dont l'expérience avait 
montré la nécessité... Il m'expliqua son plan, ses vues... Le lendemain, je 
lui portai le travail fait selon ses désirs. C'était presque un nouveau plan 
d'organisation » Lacombe l'accepta et chargea Dupont de le faire connaître 
et de l'appliquer dans les départements du Midi '. 

Dupont fit une tournée dans ces départements. Il eut à « voir tous les 
présidents de TInstitut, à leur remettre le nouveau prospectus avec les ins- 
tructions qui s'y rapportaient ». Des pouvoirs lui furent donnés pour 
« confirmer, destituer ou remplacer )) ceux qu'il ne jugeait pas capables de 
servir efficacement la cause du roi. C'est ainsi qu'il passa par Nîmes, 

cette ville en 1800, fils d'un avocat général de Bordeaux, hérite de la charge de 
son père au Parlement, procureur général de 1763 à 1790, poète et membre de 
l'Académie de Bordeaux, l'ail partie de rassemblée des notables en 1787 ; empri- 
sonné comme suspect en 1792, échappe, grâce tx son Hls, à la guillotine. — Il eut 
trois fils ; il est question ici de Taîné, Joseph Diidon de Lestrade, qui avait été 
conseiller à la Cour des aides de Paris, et qui fut l'ami de Dupont Celui-ci se 
rendait tous les soirs chez lui, entre 10 et 11 heures Le second, Jean-Baptiste, 
avocat général au parlement Maupeou. fut guillotiné en 1793. — Une rue Dudon 
à Bordeaux. — Voir Communaj', le Parlement de Bordeaux, p. 252 ; Biogra- 
phie Feret ; Essais généalogiques de Meller; Mémoire historique de Dupont, p. 23; 
Essai, p. 65, 156, 157 ; Bollac, p. 15 et 209 ; marquise de laRochejaquelein, 229 
230, 234, 235. 

1. Et plus tord Mathieu de Boissac, qui fut secrétaire général de Tlnstilut de 
Bordeaux. Voir ci-dessous p. xxvii. Cf. Bollac, p. 210 ; Mémoire, p. 40 ; Essai p. 70. 

2. Larue, la Déportation des députés à la Guyane (extrait publié en 1905 de 
VHisloire du 18 Fructidor), connaissait Texislence de TInstitut de Bordeaux. « La 
liberté fut offerte, écril-il, deux fois à [Gibert Dcsmoliôres et à J -J. Aimé| par 
VInstitut royalistede Bordeaux : d'abord dans les prisons mêmes de Tlnstilut. d'où 
ces dignes députés auraient pu sortir avec MM. Bicher Seri/y et Isidore Langlois, 
sauvés l'un et l'autre par Tor des fidèles Bordelais ; plus tard, lorsque la frégate 
La Charente. . réparait les avaries qu'elle avait éprouvées. L'un des chef» de 
VInstitut royaliste, M. Leptrode, se présenta nuitamment h la tête de deux embar- 
cations « Gibert et Aimé refusèrent de s'enfuir, de peur de <« compromettre 

Tintérét de leur famille et la santé des braves qui se dévouaient pour eux » cl 
partirent pour la Guyane. 

3. Mémoire historique, p. 13 ; Essai, p. 54. 



XX INTRODUCTION 

Montpellier, Béziers, Narbonne, Toulouse, Cahors, Villeneuve-d'Agen, Agen, 
pour remplir la mission que lui avait confiée Lacombe *. 

La nouvelle organisation modifiait sensiblement l'ancienne ; elle fortifiait 
l'autorité des chefs dans les départements et assurait le secret en supprimant 
le conseil des Cinq, l'assemblée délibérante des membres de l'Institut et la 
cérémonie du serment. Surtout elle centralisait les forces de l'Institut entre 
les mains du Directeur (l'abbé de Lacombe) qui, de Lyon, centre de corres- 
pondance, transmettait aux Instituts les ordres royaux. 

Elle divisait, en effet, le Midi de la France en quatre arrondissements com- 
posés de 6, 7 ou 8 départements, suivant les rapports locaux et topographiques, 
suivant les relations commerciales et habituelles -, Chaque arrondissement 
avait à sa tête un visiteur, nommé par le roi, chef suprême, nommant lui- 
même à tous les emplois, aux civils comme aux militaires. Chaque dépar- 
tement était dirigé par un administrateur nommé par le visiteur, communi- 
quant avec lui et seul à le connaître. Le nom de président était réservé à ses 
aides dans les communes. Il y eut ainsi trois, puis cinq présidents à Bordeaux : 
Cosse, Lestrade, Estebenet, Latour et Letellier. 

Ces présidents donnaient des ordres aux affidés des sections bordelaises. 
Les instructions venues de Lyon étaient ainsi transmises avec secret et célé- 
rité depuis le visiteur jusqu'au simple associé, en passant par les adminis- 
trateurs, les présidents et les afïidés ^. 

« C'était, en un mot, un petit gouvernement organisé dans un grand. )) 

(( La chaîne des associations secrètes s'étendait depuis le Var jusqu'au 

1. Voir longue liste d'agents de l'Instilut dans les provinces du Midi cilée dans 
le Mémoire historique, p. 14 et 15. 

2. Mémoire historique, p. 15. 

3. Essai, p. 34, 55, 60, 142. 

Cosse Joseph, né dans l'Ariège en 1755, organiste de la chapelle de l'église d'Ai- 
guillon, puis maître de musique à la cathédrale de Bordeaux (pourtant membre 
d une loge maçonnique), professeur de musique en 1800, arrêté avec Dupont, em- 
prisonné 18 mois ; on le retrouve professeur de musique au lycée de Bordeaux 
sous l'Empire 

Lestrade, le plus connu des cinq (voir sa biographie dans la Biographie nouvelle 
des contemporains). Lestrade (Louis-François), né dans les Cévennes, vers 1768, 
mêlé aux troubles de Montpellier en 1790, se réfugie dans le Comtat, puis à Lyon, 
dont il est un des défenseurs au moment du siège, en 1793. Après le siège, il se 
retire en Suisse, puis rentre en France « pour concourir à l'organisation de la 
chouannerie ». A Bordeaux, il est un des agents les plus actifs de l'Institut. Après 
le coup d'Etat du 18 Fructidor, l'Institut l'envoie à Rochefort pour faire évader les 
déportés. Richer-Sérizy, Isidore Langlois, s'enfuient, grâce à la complicité du con- 
cierge de la prison qui a été payé avec « l'or des fidèles Bordelais ». Mais Lestrade, 
qui a tout préparé pour l'évasion de Gibert-Desmolières et de J.-J. Aimé en rade 
de Rochefort, ne peut décider ces deux victimes du Directoire à s'enfuir. Il est 
lieutenant de la compagnie d'élite commandée par Latour-Olanier, Compagnie 
qui est chargée des coups de main; adjoint au chef d'état-major de 1 armée de 
l'Institut, Labarthe. C'est lui que Dupont charge d'une mission à Toulouse au 
moment de l'insurrection de l'an VIL II est arrêté avant d'avoir pu communiquer 
avec le visiteur de Toulouse, reste enfermé neuf mois et demi. Après avoir publié 
à Bordeaux : La voix de la patrie à Bonaparte sur Vévénement du 3 nivôse an VHI^ 
il occupe divers emplois administratifs sous le gouvernement impérial, et cependant, 
en 1815, se charge d'une mission auprès des généraux français, pour les engager à 
prendre la cocarde blanche. Il est un des rédacteurs du Drapeau blanc ; la Restau- 
ration semble cependant lui tenir rigueur II publie plusieurs ouvrages de littérature 



INTRODUCTION XXI 

Jura. Les départements de la Dordogne et des deux Charentes réunissaient 
les provinces de l'Ouest à la Guyenne... Bordeaux devenait alors, pour ainsi 
dire, la clef de l'édifice. » 

Des instructions précises recommandaient aux chefs de prévenir « tout 
mouvement partiel et prématuré » ; de se lier avec les autorités constituées 
« pour empêcher le mal et faire le bien autant que possible » ; de ne heurter 
de front aucun parti, au contraire d'inspirer à tous de la confiance. « Le 
langage de la clémence et de l'oubli, l'obéissance aux lois et aux autorités ins- 
tituées, étaient bien recommandés et tous les chefs avaient l'ordre secret de 
conserver avec soin, même au moment de l'insurrection, les couleurs et les 
formes républicaines. » « L'objet apparent de cette immense association 
était de soutenir et de défendre la constitution existant alors, ainsi que le 
gouvernement qui l'avait imposée; mais son véritable but était, au contraire, de 
renverser cette constitution, ainsi que le gouvernement usurpateur, pour 
rétablir l'autel et le trône légitime. » C'est pourquoi Vorganisation militaire 
« était le but essentiel mais secret de cette immense association )) ^ 

Avant son voyage à Lyon, Dupont avait entrepris cette organisation. Il 
l'avait confiée à quelques émigrés rentrés, anciens militaires, qui, après des 
essais infructueux, parvinrent à former « quatorze compagnies plus ou moins 
complètes " A son retour, il s'enquit de trouver un officier capable de com- 
mander ces bandes. C'est alors que, sur le conseil de M'"® de Donnissan et des 
Dudon, il chargea de cette mission difficile un ancien colonel de l'armée des 
Pyrénées-Orientales, proposé pour le grade de général de brigade avant de 



ou de finance dont on trouvera la liste dans la Biographie nouvelle. D'après cette 
Biographie, VEssai, p. 80 ; Rollac, p. 213; Larue, p. 130 (note). 

Lestrade portait dans l'Institut le nom de Kitton. 

Estebenet,Jeixn. maître de pension, président de l'arrondissement sud de Bordeaux 
(sous le nom philanthropique de Maunj'). surveillait la fabrication des cartouches. 
Il ne fut pas impliqué dans les poursuites dirigées contre 1 Institut après la décou- 
verte du complot, mais se tint caché longtemps. Duchesnc de Beaumanoir, qui 
rentplaça temporairement Dupont comme visiteur de l'Inslitut, le choisit comme 
secrétaire de llnstitut. — H)n 1814, il joue un rôle actif dans le complot qui pré 
pare rentrée du maréchal Beresford et du duc d'Angoulème à Bordeaux. La veille 
de cette entrée, le 11 mars, c'est chez lui que les conjures se réunissent pour 
arrêter les dernières mesures à prendre ; c'est sur son ordre que le menuisier 
Hagry fait planter le drapeau blanc sur le clocher de Saint-Michel. Le duc d'An- 
goulème le décore de la Légion d'honneur, le 9 mars 181."), comme capitaine de la 
garde royale, infanterie. 

Latour pharmacien. On ne peut le confondre avec un autre membre de l'Ins- 
titut, capitaine de la compagnie d'élite, Latour-Olanier. car Dupont et HoUac 
distinguent les deux personnages, ni avec Péfaut de la Tour (écrit aussi Latour) 
que Hollac envoie de Londres en 1813 pour porter à Taflfard de Saint-Germain 
et à Louis de la Hochejaquclein l'ordre de reconstituer la <i garde royale » el 
de réorganiser l'Institut Voir les lettres de ce .1 -V. de la Tour dans les pièces 
justificatives du livre de Hollac La marquise de la Hochejaquclein écrit Latour, 
p. 239. 

Lelellier. On trouve aux archives départementales, série M (liasse contenant les 
listes de notabilités du département), une liste de l'an IX, où figure, avec le nom 
de Duchesne de Beaumanoir. celui de LctelHer, maire d'un arrondissement de 
Bordeaux. Letellicr, aîné (.I.-.I -François), écuycr, conseiller de préfecture en 1810, 
ancien maire, décoré de la Légion d'honneur en 1810. 

1. Ces détails généraux sur rorgonisntion bordelaise sont empruntés à l'Essor, 
p. 31 £0, 55, GO, 142, 143, ou au Mémoire, p. 15 



XXII INTKODrcnoN 

quitter larmée, Papin *. Celui-ci s'était engagé en 1792 comme volontaire, 
par enthousiasme patriotique, et avait fait aux armées des Pyrénées, sous les 
ordres de Doppet, d'Augereau, de Moncey qui resta un de ses amis, les 
campagnes de l'an I, de l'an II et une partie de celle de 1 an III. On ci- 
tait sa bravoure brillante ; il avait contribué au succès du combat de la 
Montagne-Noire et à la prise de Figuières ; les Bordelais lui avaient envoyé 
un sabre d'honneur avec cette inscription: « Au brave général Papin. » Rentré 
dans ses foyers, au moment où la guerre finissait sur les Pyrénées, et devenu 
négociant en épicerie, il était entré en relations par Deynaud avec la mar- 
quise de Donnissan qui l'avait décidé à se ranger du côté du parti royal. 
Dupont l'avait nommé, sous le nom philanthropique de Servant, comman- 
dant en chef de larmée royale de Guyenne. 

« Le général Papin, raconte-t-il lui-même dans des notes remises au mi- 
nistre de la guerre sous la Restauration, organisa dans les formes un corps 
d'armée, malgré la stricte surveillance de la police... L'organisation était per- 
fectionnée au point que les revues d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie 
se passaient régulièrement par trimestre. » — 11 fut aidé dans cette tâche par 
un ancien major au régiment de Champagne, de Maillan, un ancien adjudant 
général de l'armée républicaine, Sabés, un ex-officier de la garde constitu- 
tionnelle de Louis XVI, Labarthe (Blondel), le véritable chef, après la mort 
de Maillan, du petit état-major royaliste. 

Jusqu'à quel point cette organisation a-t-elle pris consistance ? C'est ce 
qu'il est impossible de savoir. Il faut se garder d'accepter sans contrôle les 
dires des intéressés. Dans les derniers mois qui précédèrent le 18 Brumaire, 
à la faveur de l'anarchie générale de l'Ouest, grâce au mécontentement et aux 
troubles que provoquèrent la reprise de la guerre (2^ coalition) et la loi des 
otages, les recruteurs royaux trouvèrent des soldats parmi les déserteurs et 
les réfractaires qui se groupaient, pour échapper à la gendarmerie, dans les 
régions de faible peuplement, comme le Médoc. La reprise d'armes de la 
Vendée et de laBretagne.l'insurrection de Toulouse, favorisaient leurs menées, 
en occupant ailleurs les troupes républicaines et en empêchant le gouverne- 
ment de les surveiller. 

1. Voir sur Papin les pièces publiées ci-dessous, 2^ partie, série E. — Elle 
Papin, né le 27 février 1771, à l'île Saint- George (Gironde), sous-officier lors de la 
formation de la garde nationale de Bordeaux, en 1789, 2^ chef de bataillon au 
8^ bataillon des volontaires de la Gironde en août 1792, l^-^ chef de bataillon en 
août 1794, puis adjudant général chef de bataillon, promu général de brigade sur 
le champ de bataille de Figuières, refusa le grade (dit-il,, obtint un congé le 29 mars 
1795. — Revenu à Bordeaux, fut chargé par Dupont en août 1798, et par Willot 
en mars 1800, du commandement de « l'armée rojale de Guyenne ». Impliqué 
dans le complot de 1800, ne fut pas jugé, grâce à l'intervention de ses protecteurs, 
Augereau, Lannes, Moncey chez lequel il descendait à Paris ; mais il prit part au 
complot des Plombs en 1804, fut condamné à mort par contumace le 14 décembre 
1805, s'enfuit en Amérique, y fit sa fortune et la perdit au retour dans un nau- 
frage. La Restauration le nomma maréchal de camp, en février 1817 ; disgracié 
momentanément et mis en disponibilité, sans doute à la suite du rapport que 
nous publions, il commande ensuite la 7« division militaire (Hautes-Alpes) en 
juillet 1821, et meurt le 5 août 1825, à Agen, où il commandait depuis octobre 1822 
la 2* subdivision de la 20^^ division. Il était baron depuis août 1822. Il a laissé 
quatre enfants, Rollac, p. 16, 211. Voir Mémoire historique, p. 17 ; Essai, p. 66; La 
Rochejaquelein, p. 230. 



INTRODUCTION XXIII 

Ce fut à cette époque, sans doute, que furent créées les compagnies d'élite ^j 
seules forces appréciables de V « armée royale », parce qu'elles étaient seules 
composées d'anciens militaires, de déserteurs, de proscrits, et constamment 
disponibles, compagnie de Chasseurs royaux, compagnie du Médoc, chouan- 
nerie des Charentes. Le reste de cette armée, les compagnies auxiliaires, 
formées « d'hommes âgés, de pères de famille, de chefs de maisons, destinée 
à la garde des villes », n'offrait sans doute aucune consistance et ne comptait 
que sur le papier -. 

Dupont-Constant évalue l'armée de l'arrondissement de Guyenne à 28.000 
hommes, 4.000 pour Bordeaux seulement ; celle de tout le Midi à 80.000 ^ Il 
faut réduire ces chiffres au moins des deux tiers. 

Quels services rendit cette armée à la cause royale ? Nous ne pouvons évi- 
demment nous montrer moins sceptiques que la commission créée par 
Louis XVIII, en mai 1814, pour examiner les services des officiers qui 
avaient défendu le trône et l'autel les armes à la main pendant la Révolu- 
tion ou l'Empire. La commission, présidée par le prince de la Trémoille, 
refusa de se prononcer sur une foule de réclamations, par la raison que « les 
armées royales du Midi n'avaient pas été belligérantes » et parce qu'il 
n'était resté « aucune connaissance authentique » de leur organisation *. 

Papin obtint cependant le titre de maréchal de camp ; quelques autres, des 
grades moins élevés, Roger ^, par exemple, celui de colonel de gendarmerie. 
Les royalistes du Midi protestèrent contre la décision de la commission. Ils 
soutinrent que cette armée royale avait été régulièrement formée, avec ses 
cadres, ses divisions, ses compagnies, son administration, son matériel 
d'armes, d'équipement, de munitions, ses drapeaux, « Par l'ordre du 
monarque, dont il était destiné à préparer le retour, l'Institut, affirmait 
Dupont, a fait flotter ses bannières invisibles sur le Midi de la France, 
depuis Lyon jusqu'à la Méditerranée ^ « 

Contentons-nous de rechercher les traces de ces « compagnies d'élite », 
forces agissantes, les seules sans doute, de l'Institut. Ces petites bandes fu- 
rent dirigées par les Labarthe, Roger, Destang, Tafifard Saint-Germain', etc. ; 
elles se confondent trop aux yeux de l'historien avec celles des conscrits et 



1. Rollac cite celle du « commandant » Latour-Olanier (p. 213). Lestrade (il 
écrit Estrade) était lieutenant et Destang sous-lieutenant. 

Latour Olanier dirigea la plupart des coups de main de Tlnstitut, sauva nombre 
d'émigrés « arrachés aux gendarmes », dut s'enfuir pour échapper aux recherches 
dont il était l'objet, et mourut à Saint-Domingue, peut-être assassiné Voir VEssait 
p. 60 ; Rollac, p. 213 ; les Mémoires de la marquise de la Rochejaquelein, p. 234. 

2. Mémoire historique, p. 24, 25. 

3. Essai, p. 129-130. Cf. Mémoire historique, p. 36 : « plus de 20.000 hommes » 
pour la Guyenne ; HoUac, p. 20, évalue ces iorces à 30.000 hommes pour la 
Gironde et les Landes, et, p. 211, à 10.000 hommes pour Bordeaux et ses arrondis- 
sements. 

4. Essai, p. 120 ; Chassin, t. III, p. 744 (il est question de l'organisation de 
1804). 

5. Dans l'Institut il est « capitaine de la compagnie des guides à cheval ». 
Hollac, 212. Voir sa biographie, ci-dessous. 

6. Essai, p. 130, 133. 

7. Le principal chef du complot de 1814, prépara l'entrée du duc d'Angouléme 
le 12 mars. Voir notre conclusion. 



XXIV INTRODUCTION 

réquisitionnaires déserteurs, détrousseurs de diligences ou chaufifeurs qui 
parcouraient la Gironde en l'an VII et en l'an VIII. 

Elles inquiétèrent assez l'autorité départementale, dès 1797, pour que cellp-ci 
s'occupât d'en rechercher les organisateurs. Le commissaire du Directoire 
près l'Administration départementale, Partarrieu, signalait au Bureau cen- 
tral les « hommes pervers vendus à la cause de Louis XVIII (qui a des agents 
très zélés dans cette commune) et qui, pour le servir de leurs personnes et 
de leur fortune, se sont enrôlés à son service ». Il dénonçait un ancien offi- 
cier au régiment de Champagne, Dupuy (sans doute Maillan». qui « devait 
avoir le commandement de la cavalerie dans le département et qui enrôlait 
un grand nombre de jeunes gens dans l'armée de Louis XVIII ». On fit des 
perquisitions inutiles dans la rue Sainte-Catherine ; le secret était bien 
gardé *. 

Mais, en 1799, l'existence des bandes royales n'est plus un secret. L'Ecou- 
teur bordelais, l'avocat Bernadeau ^, dans ses Tablettes encore manuscrites, 
pourtant si précieuses pour 1 histoire de Bordeaux, note au 30 ventôse an 
VII : (( On parle beaucoup de royalistes qu'on dit tenir des assemblées secrètes 
et qu'on dit former une société armée au besoin. Cela est vrai, mais non 
prouvé encore ^ » 

Le Bureau central exerce une surveillance sur les embaucheurs royaux, 
mais les commissaires de police et les employés d'administration ne sont pas 
payés ^ ; la garde nationale n'existe que sur le papier ; le gouvernement 
n'envoie pas à Bordeaux de forces militaires suffisantes. Rien d'étonnant à ce 
que les conspirateurs échappent aux recherches. Dans les premiers jours de 
thermidor cependant, on fouille la maison de Louis Hagry, un des agents 
actifs de l'Institut, ft homme d'un zèle extraordinaire ^ ». Le Bureau central 
y trouve, avec des objets du culte célébré clandestinement chez le menuisier, 
90 paires de pistolets, 6 fusils de munition, et le Bureau dénonce à l'Admi- 
nistration départementale le « dessein d'armer les royalistes que la voix pu- 
blique annonce s'organiser dans cette commune ». On arrête Hagry, Arno- 
zan, Castelbert ''. Hagry reste en prison plusieurs mois, mais l'organisation 
de l'Institut demeure secrète : Bernadeau écrit, le 9 frimaire an VIII : « Le 
jury d'accusation de Libourne vient d'acquitter les citoyens Latte et Louis 

1. O'Reilly, Histoire de Bordeaux, p. 294 du VI^ volume. 

2. Bernadeau : ses manuscrits, « collection héréditaire de mes œuvres », sont con- 
servés à la Bibliothèque municipale de Bordeaux. Avocat, il tenait sous le Direc- 
toire un bureau consultatif d'agence et de correspondance pour affaires conten- 
tieuses ; fut un des membres actifs du Lycée, société musicale et littéraire sous le 
Directoire à Bordeaux, professeur d'histoire au Muséum ensuite ; il publia les 
Antiquités bordelaises, le Code commercial, les Annales de la ville de Bordeaux. Le 
tome VII de ses Tablettes, auxquelles nous empruntons les détails qui suivent, con- 
tient la série des faits mémorables de la vie à Bordeaux depuis la Terreur 
(21 septembre 1793) jusqu'au milieu du Consulat (22 septembre 1802). Il faut se 
servir de ces Tablettes avec prudence, car l'auteur est souvent injuste et partial 
dans ses appréciations. S'écrit aussi Bernadau. 

3. Tablettes, 30 nivôse an VII. 

4. Voir Archives départementales, série L, 547, les requêtes des commissaires de 
police (9 vendémiaire an VIII) ou employés d'administration (4 thermidor an VII), 
qui se plaignent de n'être pas payés depuis 3 ou 6 mois. 

5. Marquise de la Rochejaquelein, p. 231. 

6. Registre du Bureau central, 4 et 8 thermidor an VII, Archives municipales. 



INTRODUCTION XXV 

(Hagry), prévenus d'amas d'armes dans la rue de Gourgues, où le Bureau 
central les avait arrêtés en thermidor dernier. On a fait croire qu'il n'y avait 
pas d'indice de conspiration. La vérité est que cela devait servir à armer les 
compagnies de Fils légitimes qui s'organisent à Bordeaux secrètement et 
que nous connaissons personnellement ^. » 

Cependant des événements graves se sont produits à Bordeaux, après 
l'arrestation de Hagry. Les jacobins du Cercle de la Grande-Quille ont 
adressé à l'Administration du département une déclaration violente « contre 
les éternels ennemis de la Révolution qui revêtent la robe sanglante de la 
licence..., s'agitent, conspirent ouvertement dans leurs journaux..., clandes- 
tinement par des amas d'armes et de munitions de guerre et par des écrits 
contre-révolutionnaires répandus avec profusion ^. » 

Ils ont offert leurs services et placardé une affiche sur les murs de la ville, 
le 19 thermidor La Jeunesse royaliste a arraché l'affiche. Sous la menace 
d'un mouvement royaliste, l'Administration a fourni des armes à des jaco- 
bins qui parcourent la ville, encadrés de commissaires de police. Le 20, 
bataille dans les rues ; les jacobins tirent sur la Jeunesse ; il y a des tués, 
des blessés, dont le jeune de Lur-Saluces qu'on emprisonne. 

Dupont affirme qu'il n'a pas prévu ce mouvement, ne l'a point ordonné, 
quil y était même opposé, le roi ayant défendu tout mouvement partiel. 
C'est l'ardeur intempestive de la Jeunesse qui en est cause. La publication 
de la loi des Otages ce même jour l'avait exaspérée ^. Cependant un des 
présidents d'arrondissement, Coste, avait pris une part active à la mani- 
festation royaliste. Il dut s'enfuir et se cacher du côté de Lesparre. Le 
Bureau central de Bordeaux en prévint l'Administration centrale et celle 
de Lesparre, le 22 brumaire an VIII : « Nous vous prévenons, écrit-il, 
que le nommé Cosse *, homme très suspect sous tous les rapports, violem- 
ment soupçonné d'avoir prêté une main active à tous les mouvements 
rébeUionnaires des 19 et 20 thermidor dans cette commune, ainsi qu'à 
l'émission des pamphlets et proclamations royalistes ^ qui ont été répandus 
avant cette époque, violemment soupçonné d être l'ami des royalistes cons- 
pirateurs, que cet individu est depuis 25 à 26 jours dans les communes de 
Lesparre. » A l'administration de Lesparre, il présentait Cosse comme 
« très dangereux,.., un des agents les plus dévoués des roj^alistes ». Un des 
neveux de Dupont fut arrêté à la suite de ces journées et Dupont dut se cacher 
lui-même plusieurs jours. 

Dans les rapports qui lui furent remis les 21 23 thermidor, dans celui 



1 Tahlcllcs, i) friinain- nii VIII. 

2 Archivts (Icpai i<!iiunt;iles, L, 547, séance de l'Administralion centrale du 
16 thermidor VII. Le 15 thermidor, les membres du Bureau central demandaient à 
rAdtiiiiiistration de faire des perquisitions aux environs de Bordeaux (par exemple 
à Léognan), où « les émigrés tenaient leurs conciliabules ». 

3. Voir le» Anna/es de Bcrnadeau, à la date; 1 lissai, p. 74, elle Mémoire histo- 
rique, p. 18. 

4. Archives municipales, correspondance du liureau central de lan VII h 
lan VIII. 

5. Voir dans Essai, p. 151, les Amis confédérés de l'ordre et de la paix aux auto- 
rités départementales de la Gironde, pamphlet, écrit par Dudon de Lcslrade, à 
propos de la loi des Ologes. 



XXVI INTRODUCTION 

qu'elle prépara pour le ministre de la police, le 4 fructidor, l'Administra- 
tion départementale signala l'agitation royaliste comme dangereuse, et le 
26 thermidor elle prit des mesures énergiques pour la combattre * . Les 
jacobins de Bordeaux annonçaient même, le 9 fructidor, qu'une contre révo- 
lution, préparée pour la veille, avait été déjouée par le Bureau central '^. 
Cependant la population bordelaise affectait den rire et 6.000 signatures, au 
Cercle Séguineau, couvrirent une pétition adressée au Directoire contre la 
« fusillade anarchiste du 20 thermidor '^ ». 

A ce moment la Vendée et la Bretagne s'agitaient (elles s'insurgèrent en 
octobre pour la seconde fois) ; les roj'alistes de la région toulousaine se 
soulevaient (août) sous la direction d'un ex-général de la République, Bougé, 
et de Paulo. Ils s'emparaient de Muret et de quelques villes, tenaient la 
campagne pandant une quinzaine de jours jusqu'à leur défaite à Montréjeau 
(3 fructidor) et leur dispersion *. 

Dupont, que le Prétendant avait nommé récemment visiteur des provinces 
de Saintonge, d'Angoumois, de Limousin, de Périgord, d'Agenais, de 
Guyenne et d'une partie de la Marche (décembre 1798) °, et que l'agence de 
Lyon avait chargé d'une haute surveillance sur les arrondissements des 
Landes et de Toulouse *^, s'efforça d'entrer en communication avec le 
visiteur de Toulouse au moment de l'insurrection, comme avec l'Ouest. Il 
se tint prêt à profiter d'une défaite des républicains ou d'un nouvel échec 
à la frontière ^. 

La mission qu'il envoya à Toulouse, celle du sieur Lestrade (ou Estrade), 
n'aboutit pas ^ ; en revanche, il entretint avec les chefs des armées ven- 
déennes ou chouannes une correspondance par l'intermédiaire d'un ancien 
chef de chouans, rentré à la faveur de l'amnistie de 1796, Destravaux. Ce 
« Philibert Destravaux, resté en relations avec la Vendée et avec l'Angleterre», 
fut dénoncé par le Bureau central de Bordeaux à l'Administration départe- 
mentale, le 7 fructidor, comme soudoyé « pour se réunir aux conspirateurs 
qui se rassemblent à l'effet de favoriser un mouvement royaliste ^ ». 

Le ministre de la police, Fouché. s'inquiétait de cette agitation royaliste 
sans en connaître encore bien toutes les causes. Il écrivait au Bureau 
central, le 24 thermidor : « Les royalistes ont éclaté et le sang a coulé dans 
votre commune... J'approuve les mesures sages et vigoureuses que vous 
avez prises. Vous m'annoncez l'arrestation de plusieurs chefs de la ré- 
volte. Leurs affaires se lient à celles des embaucheurs et émissaires de 
Louis XVIII 10. „ 

1. Archives départementales, série L, 547, 

2. Tablettes, 9 fructidor an VII. 

3. Tablettes, 14 fructidor an VII. 

4. Voir Lavigne, Histoire de V insurrection royaliste de l'an VIII, in-18, Paris, 
1887; et les mémoires du baron de Rougé dans les Mémoires de tous- Cf. Aulard, 
Histoire politique, p. 676. 

5. Le brevet du roi cité dans l'Essai, p. 139. 

6. Essai, p. 74-75. 

7. L'Italie était perdue après la défaite de Novi (15 août). 

8. Essai, p. 78-79 Voir ci-dessus la biographie de Lestrade. 

9. Mémoire historique, p. 25, et Essai, p. 81 ; Archives municipales. Police du 
Bureau central. 

10. O'ReilJy, Histçire de Bordeaux, p. 320 du t. \T. 



INTRODUCTION XXVII 

Les Fils légitimes donnaient la mesure de leur audace et de leur force en 
enlevant de 1 hôpital Saint-André, à Bordeaux, le 30 vendémiaire an VIII, à 
8 heures du soir, deux agents de l'Institut, Morille et Elissagaray. avec 
seize hommes déguisés en chasseurs basques qui terrorisèrent le concierge et 
le garde. De ces deux agents, l'un était prévenu d'émigration et l'autre 
d'embauchage au profit du Prétendant. Dupont, comme Papin dans sa 
requête au roi, se vante d'avoir ordonné le coup. Bernadeau, en relatant ce 
fait, le commente : « Ce coup hardi a été exécuté par les Fils légitimes, 
bande secrète de royalistes, qu'on dit organisée et dirigée par M. Papin 
jeune, épicier de cette ville, qui s'est donné une réputation ostensible de 
patriotisme dont il use au profit de son parti. Il a été municipal en 1796. » 
(30 vendémiaire VIII *.) 

Telle est l'organisation et la force de l'Institut Philanthropique à la veille 
du Consulat Dupont va jusqu'à prétendre que, sans la victoire de Zurich, 
l'Institut aurait levé victorieusement l'étendard royaliste dans le Midi de la 
France ^ 

On verra plus loin le récit du voyage de Dupont-Constant à Augsbourg, 
sou entrevue avec Wichkam, l'ambassadeur anglais en Souabe, avec Pichegru 
et Willot, organisateurs du complot de l'an VIII dans le midi de la France. 

Quand Dupont revint à Bordeaux, il s'adjoignit comme collaborateur 
principal, secrétaire général de l'Institut, Mathieu de Boissac, ancien pré- 
sident de l'élection de Guyenne, récemment revenu d'émigration. 

Voici, d'après les pièces originales conservées par la famille de Boissac, le 
brevet, scellé aux armes de France, que Dupont délivra au secrétaire général 
de l'Institut. 

« De par le Roi, nous agent et visiteur de l'Institut dans les provinces de 
Saintonge, Angoumois, Limousin, Périgord, Agenois, Guyenne, et d'une 
partie de la Marche, nommé par brevet de S. M. Louis XVIII, délivré à 
Mittau, le 1^^»' décembre de l'an de grâce 1798 et le 4"'« du règne de S. M. 
très chrétienne, après nous être bien assuré des principes, du zèle et de la 
fidélité à la cause du Roi du sieur Tristan, l'avons nommé et nommons 
secrétaire général de notre arrondissement pour servir en cette qualité prés 
de notre personne et contresigner tous les actes qui intéresseront le service 
de S. M. à dater de ces présentes. 

«Donné à Bordeaux, sous le contreseing du secrétairegénéral de l'arrondis- 
sement, le 9 mars de l'an de grâce 1800 et du règne de Sa Majesté le 6«. — 
[Signé] Constant et (au-dessous), par mandement, Tristan, secrétaire général. » 

Après son élargissement, en 1802, Dupont donnait à M. de Boissac l'attes- 
tation suivante : 

« Je soussigné, visiteur général de l'ordre de l'Institut général établi dans 
le département de la Guiennepar brevet de S. M. Louis XVIII, certifie à qui 
il appartiendra que le brevet de secrétaire général de l'ordre, par moi délivré 
à M. Tristan, appartient à la personne de M. Ch. Henri Mathieu de Boissac, 

1. Archives départementales, L, 72, Cf. le registre de délibérations de l'Adminis- 
tration départcnienlale, L, 547 ; Essai, p. 82 ; Archives municipales, J, 87, 
extrait des registres du Tribunal criminel ; Tablettes, 30 vendémiaire an Vlll 
^21 octobre 1799). 

2. Essai, p. 36, 37. 



XXVIII INTRODUCTION 

ci-devant président de l'élection de Guienne, séante à Bordeaux. En foi de 
quoi, pour lui servir en tant que de raison. Bordeaux, le 20 avril 1802. 
(Signé) Constant *. » 

1. Le tout de l'écriture de Dupont-Constant. Mathieu "de Boissac (Charles -Henri), 
né à Libourne en 1754, conseiller du roi et président de l'élection de Guyenne (il 
succéda en mai 1784 à Cop Martin, décédé, comme en témoignent les lettres de 
provision conservées par la famille ; il avait acheté son office 24.000 livres), fut 
condamné, le 3»^ jour de la décade du 2* mois de l'an 11, par la commission mili- 
taire séante à Libourne et présidée par Lacombe, à être « détenu jusqu'à la paix », 
comme a accusé d'aristocratie... et soupçonné d'émigration ». Il dut s'enfuir, 
émigra en Espagne, où nous le retrouvons en janvier 1799 (à Pampelune). Il 
obtint à cette date, pour rentrer en France, un passeport qui a été conservé. Il 
revint à Bordeaux ou à Libourne, se fit rayer de la liste des émigrés, mais resta 
sous la surveillance de la police de Libourne jusqu'en brumaire an X. 



PREMIERE PARTIE 



1796-1800 



LA CONSPIRATION ANGLAISE 

ET 

LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 

CELUI DE BORDEAUX EN PARTICULIER 



A. — L'ANGLETERRE ET LA FONDATION DES INSTITUTS (1796-98). 

Pour appuyer les cfiForts de la première coalition. l'Angleterre avait fourni 
de l'argent et des armes aux Vendéens et aux chouans, et son envoyé en 
Suisse, Wickham, avait essayé avec Gondé de soulever les provinces orien- 
tales de la France, même de débaucher l'armée de Rhin-et-Moselle, com- 
mandée par Pichegru. 

Dans les derniers mois de 1796, elle se rendait compte de son échec. 

Non seulement la coalition était vaincue, car la France avait envahi la 
Belgique, la Hollande, l'ouest de l'Allemagne et l'Italie du Nord, mais les 
insurrections de l'Ouest, comme les intrigues de lEst, avaient échoué. Stofflet 
et Charette avaient payé de leur tête leur soulèvement (février-mars 1796) ; 
la Vendée était pacifiée par Hoche, et Pichegru avait perdu son comman- 
dement. 

Sur le conseil de Wickham, qui s'inspirait lui-même des avis de Dandré, 
l'cx- constituant, réfugié en Suisse, le ministère anglais parut alors renoncer, 
momentanément au moins, à provoquer des mouvements royalistes en France, 
pour paralyser l'action du gouvernement français au dehors. Mais il encou- 
ragea et soudoya le complot constitutionnel d'une partie des Conseils et de 
l'Institut Philanthropi(iue. 

Nous avons étudié ailleurs les relations de 'Wickham avec les Conseils 
par 1 intermédiaire de Dandré, son envoyé à Paris. Nous citons ici les 
documents qui prouvent ses rapports avec l'Iuslilut dès sa fondation. 

1 



2 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

1. — Le mémoire de V agence royale de Paris. 

Le 23 août 1796, le représentant du prétendant à Londres, le duc 
d'Harcourt, envoyait au ministère Grenville un mémoire émané des 
trois personnes employées en France par M. Wickham ^. Ce mémoire 
démontrait que les circonstances n'étaient « pas assez mûres pour 
le rétablissement de la royauté », et que les royalistes devaient « se 
préparer dans le silence à diriger les événements et à en profiter ». 
Le duc d'Harcourt insistait sur ces conclusions dans sa lettre d'en- 
voi : « Les circonstances dans lesquelles se trouve l'intérieur 
paraissent commander impérieusement de substituer le plan ci-joint 
à tout ce qui a cessé d'exister, et qui doit remplacer d'une manière 
infiniment mieux combinée. .. les rassemblements de royalistes.» 

Plus de « guerre d'action », mais une « guerre d'opinion » ! Faire 
tourner l'impopularité du régime directorial au profit du roi : voilà 
le but. Pour cela on s'eff'orcera de réunir des majorités hostiles à ce 
régime dans les assemblées, assemblées primaires ou électorales, 
conseils des Cinq-Cents et des Anciens. « C'est avec ces majorités de 
chouans bien employées qu'on opérera la contre-révolution. » 

On formera à Paris et dans les départements des sociétés roya- 
listes. « Il faut, en changeant les signes maçonniques, profiter de 
cette institution pour obtenir des moyens de reconnaissance. Sans 
avoir de sociétés publiques et de comités comme les jacobins, il 
faut chercher à obtenir les mêmes résultats. »... « Ce n'est pas 
une société qu'il faut établir, mais des sociétés dont on dirigera le 
vote, qu'on pourra rassembler en cas de besoin. 

« La trahison, l'indiscrétion même étant un des obstacles les plus 
dangereux d'un pareil établissement, il faut : V qu'à l'exception des 
chefs correspondant directement avec Paris, tous les sociétaires 
ignorent le but de l'institution ; 2o que les sous-chefs ne connaissent 
que le chef principal du département et point du tout sa correspon- 
dance avec Paris ; 3° que le secrétaire particulier ne connaisse que le 
sous-chef de son canton ; 4° que les mots de passe soient tels qu'en 
cas qu'ils fussent découverts, ils ne présentassent d'autre but de la 
part des sociétaires que celui de se reconnaître, afin de pouvoir se 
réunir pour seconder le gouvernement contre les entreprises des 
jacobins et des anarchistes. » 

Suit un projet d'organisation de ces sociétés. Elles seront favo- 



1. L'abbé Brottier. DuvernedePresleetDespomelIes, les trois principaux membres 
de l'agence de Paris subventionnée par Wickham. Voir Caudrillier, la Trahison 
de Pichegru, p. 73 et 100. Despomelles, maréchal de camp avant la Révolution, ami 
et collaborateur de Lemaître qui fut condamné à mort en novembre 1795, a fait le 
règlement des Instituts et des divisions militaires, déclare Duverne, le 17 ventôse IV 
(Barras, Mémoires, t. II, p. 340). 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 3 

râbles au gouvernement en apparence, hostiles aux jacobins seule- 
ment, essentiellement pacifiques jusqu'au jour de la levée en masse 
ordonnée par le roi On établira « non seulement dans les dépar- 
tements autour de Paris, mais dans tous ceux où il sera possible, 
non pas un comité de correspondance, mais un commandant qui 
sera seul chargé de la correspondance avec Paris... Les limites 
de chaque présidence (car ces commandants n'auront dans le public 
d'autre titre que celui de président des Amis de l'Ordre) seront 
tracées dans tous les sens par le centre de correspondance... Les 
présidents ne doivent jamais oublier qu'aux yeux vulgaires, 1 éta- 
blissement ne doit avoir pour but que la résistance à la tyrannie 
des jacobins. En conséquence, il leur sera expressément enjoint 
de ne jamais émettre en public d'autre vœu que l'amour de l'ordre. 
Toute guerre partielle étant non seulement inutile, mais même 
dangereuse pour la bonne cause, il faut se lever en masse ou rester 
passifs. Aucun président ne piourra former aucun rassemblement de 
sociétaires, ni commettre aucun acte d'hostilité sans l'ordre du roi, 
qui leur sera communiqué par le centre de correspondance... » 

« Les présidents diviseront leur présidence en autant de cantons 
qu'ils le jugeront convenable. Ils placeront à la tête de chacun un chef 
qui sera connu sous le titre de secrétaire des Amis de l'Ordre. 11 
devra ignorer la correspondance avec le centre de Paris. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

Le mémoire fait suite à la lettre du duc d'Harcourt Le 6 septembre 1796, 
l'agent du comte d'Artois à Londres. Dutheil, demandait à Grenvillc si ce 
plan d'organisation secrète des sociétés royalistes lui convenait. La lettre de 
Wickham du 27 août 1797, ci-dessous citée, prouve que Grenville accepta 
le plan, car il fournit des subsides à llnstitut Philanthropique. 

2. — La correspondance de Dandré avec Wickham avant 
Fructidor. 

(Analyse et extraits.) 

En 1797, caché à Paris ou dans les environs, l'ex-constituant Dandré s'est 
mis en relations avec Dcspomellcs qui a rédige le règlement des Instituts et 
qui, après l'arrestation de Brottier et de Duverne de Prcslc, en janvier, reste 
seul pour les diriger. Il comprend le parti qu'il peut tirer de l'action 
politique des Instituts dans les départements, offre à Despomdles son appui 
auprès de Wickham pouren obtenir des fonds, et, grâce à l'argent que lam- 
bassadeur met à sa disposition, il multiplie les Instituts en dehors de la 
région parisienne, dans le Midi surtout, et se charge de leur faire pas.ser des 
instructions et des ordres. 

En fait il prend la direction des Instituts du Midi, charge Caire (Jardin), 
président de l'Institut de Marseille, de faire une tournée dans les provinces 



4 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

méridionales. Nous savons que Caire est passé par Bordeaux, qu'il a décidé 
Dupont Constant à fonder l'association girondine ; il revient à Paris à la fin 
d'août, car Dandré annonce à Wickham le retour d'un voyageur venant du 
Midi qui lui apporte des nouvelles des Instituts et de Marseille. Il repart 
pour le Midi en septembre, après le coup d'Etat, pour empêcher une insur- 
rection. 

Ces détails nous sont fournis non seulement par les brochures de Dupont- 
Constant (Voir l'introduction), mais aussi par les lettres, si importantes 
pour l'histoire de la conspiration anglaise avant Fructidor, lettres que 
Dandré adressait à Wickham et qu'il lui faisait porter en Suisse par des agents 
secrets, Bayard entre autres. Ces lettres se retrouvent aux Archives du 
Record Office, Foreign Office, Suisse, mêlées à la correspondance de l'am- 
bassadeur avec Grenville. Dandré signe ces lettres Kilien ou Berger. 

Dandré écrit, en mai 1797, à Wickham (lettre apportée par Bayard) : 

« Les sociétés s'organisent dans plusieurs départements. Avant 
trois mois elles seront établies partout. >> — Le 30 juin, Wickham 
annonce à Grenville que Fabbé Delamarre est arrivé à Berne venant 
de Paris, accompagné de Bayard, avec un plan que Dandré propose 
et que l'abbé devra faire approuver au roi. Un des objets principaux 
de ce plan est « d'établir des associations de propriétaires dans 
chaque département suivant le système adopté pour la formation de 
rinstitut Philanthropique, système connu de V. E. (Grenville). Ces 
associations auront pour but d'influencer le choix des administra- 
teurs, de les encourager et de les soutenir. » 

Le 29 juillet, Dandré annonce qu'il est « très occupé de l'organisa- 
tion des Philanthropes du Midi ». Il déclare à l'ambassadeur : « Rien 
n'est meilleur que l'Institut, parce qu il nous fait travailler avec 
sûreté et, si on nous laisse le temps d'arriver en germinal, l'effet est 
immanquable. Tous les efforts du Directoire doivent tendre à empê- 
cher les élections ; tous les nôtres doivent tendre à y parvenir, et 
d'ici là à serrer et coaliser les honnêtes gens. » — Le 18 août, « la 
Philanthropie va bien ; elle pourrait aller mieux si Despomelles 
n'était pas un peu mou. Il boit un peu, et l'après-midi il n'est pas 
bon à grand'chose. Je lui ai remis ses 1.900 louis. » 

Car Wickham a consacré une somme fixe par mois à l'Institut : 
« M. Wickham, écrit Leclerc, secrétaire de l'ambassadeur, à La 
Barberie ^ et à Despomelles (26 juillet), a pris sur lui de vous accor- 
der la somme que vous demandez. Kilien (Dandré) a ordre de 
remettre à Despomelles en deux paiements la somme de 2.000 louis, 
sauf 200 louis qu'il m'a ordonné de retenir entre mes mains pour de 
petits services imprévus, tels que les appointements de Valdené; les 



1. La Barbarie, principal collaborateur de Despomelles, envoyé par lui en jan- 
vier 1797 à Blaakembourg, pour exposer au roi les résultats obtenus déjà. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 5 

frais de voyageurs, etc. On a la plus grande espérance d'être autorisé 
à payer régulièrement la même somme avec la même retenue.. . On 
tient à ce que cette somme soit rigoureusement appliquée à la forma- 
tion des Sociétés Philanthropiques et à ce que les chouans n'en 
emportent rien, excepté la juste proportion de leur partie. » 

C'est pourquoi Wickham annonce à Grenville, le 27 août : « Vous êtes 
entièrement soulagé des dépenses de l'Institut Philanthropique *. » Il lui 
envoie la copie de la lettre ci-jointe de Leclerc. Il ajoute ce détail important : 
Despomelles n a pas à s'occuper des dépenses de l'Institut dans 22 dépar- 
tements, dont Dandré a pris l'entière direction. Ainsi les 2.000 louis par 
mois servaient à payer l'Institut dans moins de 50 départements, puisque 
Dandré évalue, dans son rapport d'octobre, à 70 le nombre de ceux où 
l'Institut a pris racine. 

Cette somme est régulièrement payée à Despomelles par le banquier 
Jacques Martin ; quant à Dandré, il reçoit 4.000 louis, pour son « travail de 
Paris )) et pour les autres Instituts, par le banquier Baboin 

Quelques jours avant le coup d'Etat, le 28 août, Dandré exprime encore 
la satisfaction que lui cause le développement de l'Institut, en particulier ses 
progrès dans les départements du Midi : 

« Il m'arrive un voyageur venant du Midi ^ ; l'Institut y est établi 
d'une manière avantageuse dans 20 départements. On y met un peu 
de mollesse dans le Lyonnais. Il faudra que M. de Précy écrive un 
mot à M. de Lacombe pour l'engager à activer son travail. Il y a un 
grand mouvement à Marseille : les honnêtes gens ont perdu deux 
hommes, mais ils ont fini par être vainqueurs. Les Jacobins sont en 
fuite. » 

{Record Office, Foreign Office, Suisse.) 

3. — Le rapport doctohre. 

(Extraits et analyse.) 

Ce rapport, que Dandré, réfugié en Suisse après le 18 Fructidor, remit à 
Wickham, a été publié en partie par Ballot dans le Coup d'Etat du 18 Fruc- 
tidor. Nous publions les Jjassages intéressant l'Institut, qu'il n'a pas pu- 
bliés. 

«... Après avoir fait nommer les députés, écrit Dandré, il fallait 
songer à les soutenir. J'avais eu le projet de faire des sociétés dans 
chaque département, d'établir entre elles une correspondance... On 
me proposa le plan de l'Institut Philanthropique. Je renonçai sur-le- 
champ au mien qui me parut moins bon que celui de 1 Institut, et 
j'embrassai celui-ci avec ardeur. J'employai à cet établissement, qui 

1. Donc Grenville faisoit passer dos fonds h Despomelles pour l'Institut. 

2. Sans doute Caire (Jardin). 



6 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

n'était encore qu'un projet, une partie des fonds que vous m'aviez 
confiés. Des voyageurs parcoururent les départements et, dans le 
court espace de six semaines, l'Institut avait jeté des racines dans 
plus de 70 départements. Dans quelques-uns, tels que les Bouches- 
du- Rhône, Vaucluse, Gironde, Ardèche, Seine-Inférieure, il était 
solidement établi, et tous les administrateurs avaient été pris parmi 
les Philanthropes... 

(( Chaque jour l'Institut prenait de nouveaux accroissements, et je 
ne doute point que, sans la catastrophe qui nous a écrasés, les élec- 
tions de germinal prochain n'eussent, été entièrement à nous. Un 
journal de premier rang destiné à servir dans la suite de véhicule à 
notre correspondance, était entrepris. Des voitures transportaient 
nos lettres à l'abri des atteintes du gouvernement ; des signaux de 
reconnaissance, une communication très active avec les présidents 
de départements, tout nous faisait espérer que nous acquerrions 
une connaissance exacte du nombre des bons Français, que nous les 
rallierions, et que le désordre s'approchait de sa fin... » 

Avant que le coup d'Etat éclatât, Dandré se proposait de faire servir l'Ins- 
titut à la défense de l'Assemblée, à Paris. 

« Le dimanche (17 fructidor), les agents généraux de la Philan- 
thropie et les affidés généraux de Paris se rendirent chez moi. Après 
une longue conférence, il fut décidé qu'ils se rendraient dans les 
municipalités, que tout se préparerait, et que, s'il y avait quelque 
danger, ils reviendraient à dix heures du soir chez moi... A neuf 
heures, un député, qui nous servait en partie d'intermédiaire avec les 
inspecteurs, vint chez moi. J'étais avec Léon i, un des agents géné- 
raux. Il nous assura qu'il n'y avait rien à craindre pour ce soir... 
Aucun des affidés n'étant revenu, je pensai aussi qu'il n'y avait rien 
à craindre. » 

Après le coup d'Etat, Dandré croyait encore que l'Institut pouvait réparer 
le mal que la vigilance du Directoire avait fait à son parti. Il importait peu 
que le gouvernement eût découvert ses règlements, car « on n'a pu décou- 
vrir, ajoutait-il, les présidents des départements et les agents généraux ; 
aucun des fils n'a été rompu ; tous les présidents sont choisis ; il ne reste 
plus qu'à renouer la correspondance. )) 

Despomelles et les agents généraux suffisaient pour diriger l'Institut, si les 
dénonciations ne les forçaient pas à quitter la France. Il importait d'ail- 
leurs d'éviter tout mouvement partiel. 

«... Pénétré de cette idée, j'ai fait partir, le mercredi 20 fructi- 
dor. Jardin ^ président du département des Bouches-du-Rhône, 

1. Voir ci-dessous la note de Desmarets sur Léon Dubois, chirurgien. 

2. Caire. Voir ci-dessus, introduction, p. xvi. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 7 

département le mieux organisé de tous, pour empêcher qu'on ne fît 
quelque imprudence. Il se concertera avec les honnêtes gens de 
Lyon. 

. . Il sera essentiel d'obtenir du roi qu'il n'envoie plus d'agents 
en France. Les aliments qui restent suffisent pour diriger et entre- 
tenir l'Institut Philanthropique. La Barberie et Despomelles sont 
les hommes qu'il faut pour cela. » 

Record Office, Foreign Office, France. [Voir 
le reste du mémoire, dans Ballot, le Coup 
d'Etat du 18 Fructidor.] 

4. — 2 mai 1798. Lettre de Dandré à d'Avaray. 

(Extrait.) 

Cette lettre a été publiée par M. de Martel dans ses Historiens fantai- 
sistes, la Machine infernale, p 290 à 291. 

Elle prouve que Dandré a conservé dans l'agence de Souabe (de Vezet, 
Précy. Dandré, Imbert-Colomès) \ à laquelle le Prétendant a délégué ses 
pouvoirs sur la France de l'Est et du Sud, la direction des Instituts roya- 
listes. 

Il semble d'ailleurs qu'à cette date l'Institut ait perdu de son importance 
dans les départements autour de Paris. Après le coup d'Etat de Fructidor, 
Despomelles s'est terré dans les environs de la capitale, et il n'est plus ques- 
tion de lui dans les documents anglais. La Barberie s'est enfui à Londres, 
comme le prince de La Trémoille que le Prétendant avait chargé, par 
l'ordonnance d'avril 1797, de présider son agence de Paris -. 

En revanche, l'organisation des Instituts du Midi s'est fortifiée sous la 
direction de l'abbé Lacombe, et après la tournée que, sur son ordre, Dupont- 
Constant a faite dans les départements méridionaux. 

C'est donc surtout avec les Instituts du Midi que Dandré reste en rapports, 
chef d'autant plus écouté de ces associations royalistes qu'il a contribué à 
leur fondation. 

Mais Wickham avait quitté la Suisse, rappelé par son gouvernement en 
décembre 1797. Son successeur Talbot avait dû reculer devant l'invasion du 
pays par les Français. Réfugié à Augsbourg avec Dandré il combine avec 
lui, et peut-être avec Royer-Collard, qui faisait partie de l'agence royale de 
Paris ^, un plan de coup d'Etat dont le premier article était l'assassinat des 
directeurs 

M. André Lebon cite ou résume dans V Angleterre et l'Emigration * les 

1. Sur cette agence, Voir surtout, Forneron, Histoire des émigrèbt t. II, p. 269 ; 
Daudet, Histoire de l'Emigration, t. HI, p 176 (noie) et 196 (note); les Mémoires de 
Fauche- fiorel, p. 357, 380-81, et la publication officielle intitulée Papiers saisis à 
liaretilh et àMende importantes lettres d'Imbert-Coloniès et do Précy). 

2. Coudrillicr, Trahison de Pichegru, p. 374. 

3. Agence établie au printemps de 1798, après une entrevue de Dandré avec 
Roycr-Collard en Suisse, et composée de l'abbé de Montesqutou, du marquis de 
Clermont-Gallerande et de Becquey. 

4. P. 264 à 269. Lire la lettre de Grenville du 25 janvier 1799. 



8 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

lettres de Talbot à Grenville, comme la réponse de Grenville qui le désavoue. 
Le ministre anglais refusa, en effet, de suivre son agent de Souabe dans la 
voie de l'assassinat et ne tarda pas à le rappeler. 

« ... Je crois devoir vous dire, écrivait Dandré à D'Avaray, qu'in- 
dépendamment du travail que nous faisons ensemble, je suis acti- 
vement un autre objet dont je parle peu, parce que le secret seul 
peut le faire réussir. C'est le projet de faire assassiner le Directoire. 
J'ai fait demandera tons les présidents de V Institut àes hommes de 
main. Si, ce dont je doute d'après l'expérience du passé, le nombre 
suffisant se trouve, je rentrerai pour aller dans l'intérieur tâcher 
de frapper un grand coup... En attendant que les renseignements 
sur cet objet me soient arrivés, V*** est destiné à former des intel- 
ligences dans la garde du Directoire et dans l'état-major de Paris, 
mais ni cet agent ni les chefs de l'Institut ne savent rien du but que 
je me propose. » 

(Martel, Machine infernale, p. 290-291.) 



5. — 3 et 25 novembre 1798, Augsbourg, Talbot à Canning. 

(Analyse.) 

[Les deux lettres suivantes prouvent la participation de Talbot au complot 
de Dandré et le rôle qu'il entend faire jouer aux Instituts du Midi avant ou 
après le coup de main. 

Le 3 novembre, il annonce que les relations sont établies entre la Franche- 
Comté et la Vendée, par la ligne des Instituts du Midi, Lyon, Toulouse, 
Bordeaux. Les forces des royalistes dans les provinces méridionales se sont 
accrues depuis le départ de Bonaparte pour l'Egypte. L'interruption du 
commerce du Levant a singulièrement augmenté le mécontentement 
public. 

A Paris, une troupe de royalistes déterminés se tient prête à frapper le coup 
essentiel. 

Plus explicite à ce sujet la lettre du 25 novembre dont j'emprunte la tra- 
duction à M. A. Lebon (p. 265). 

« ... La fameuse insurrection de Paris, le 4 septembre 1797, a 
prouvé l'imprudence qu'il y a à s'en fier seulement au jeu naturel 
de l'opinion publique, et montré la nécessité de tenir prête une troupe 
d'hommes pour commencer par un coup de main l'exécution de 
tout plan ayant pour objet de changer le système qui a si longtemps 
prévalu en France, quand on trouvera une occasion suffisamment 
favorable... » 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 9 

B. LA CONSPIRATION ANGLAISE DANS LEST ET LE MIDI DE LA 

FRANCE, au début de la deuxième coalition (1799), avant 
Zurich ; rôle attribué aux Instituts du Midi. 

Il semble qu'au début de la deuxième coalition, après le rappel de Talbot, 
le ministère anglais ait voulu abandonner à eux-mêmes, sans leur donner son 
appui financier, ces Instituts du Midi que Dandré et Wickham avaient con- 
tribué à fonder en 1797. 

Le successeur de Talbot en Souabe, Craufurd, reçut Tordre de réduire les 
dépenses « pour l'intérieur de la France » et de ne plus compter que sur 
« les succès des ennemis extérieurs du gouvernement français » pour triom- 
pher du Directoire. 

Craufurd dut exécuter à la lettre les instructions de Grenville, car les 
membres de l'agence de Souabe se plaignirent avec amertume du mal qu'avait 
causé la suspension des largesses anglaises pendant trois mois. [Voir ci- 
dessous, n°^ 12 et 13.] 

Enfin Wickham revint en Suisse ! Son gouvernement lui confiait une mis- 
sion nouvelle (juin 1799), plus militaire que politique. On le chargeait de 
lever des troupes suisses, souabes ou bavaroises pour appuyer les mouve- 
ments de l'archiduc Charles et de Korsakof. Sa mission devint bientôt plus 
politique que militaire, car il se préoccupa surtout d'organiser une insurrec- 
tion des royalistes de l'Est et du Midi. 

Cette insurrection devait éclater, aussitôt la Suisse conquise, après la dé- 
faite de Masséna qu'on jugeait prochaine et inévitable. 

Des levées suisses, auxquelles se joindraient des levées royalistes, forme- 
raient une petite armée à la tête de laquelle se mettrait le comte d'Artois, 
venu d'Angleterre, avec Pichegru comme chef d'état-major. On marcherait 
sur Lyon, « centre de correspondance )> des Instituts du Midi ; on donne- 
rait le signal de l'insurrection à ces associations royalistes qui se lèveraient 
en armes de la Rochelle à Besançon. [V. n»» 10 et 19.] 

En fait, les royalistes ne se sont soulevés que dans la région toulousaine 
en août. [Voir les Mémoires du baron de Rougé dans les Mémoires de tous et 
y Histoire de l'Insurrection royaliste de Van VII de Lavigne.] Encore n'est- 
il pas prouvé que ITnstitut de Toulouse ait donné le signal du mouvement. 
Plus probablement il a essayé de l'enrayer, suivant les ordres reçus de Lyon, 
car le visiteur de Toulouse s'était caché au moment de l'insurrection, et 
Lestrade, que Dupont-Constant lui envoya, ne parvint pas à le rencontrer. 
[Cf. Essai, p. 79.] 

Mais les passages suivants de l'Essai de Dupont et des Mémoires de Fau- 
che prouvent que les Instituts du Midi n'attendaient qu'un ordre pour se 
soulever. [Cf. l'introduction, p. xxiv et xxv : le mouvement royaliste de 
Bordeaux, 19 et 20 thermidor an VII; armes saisies chezHagry ; enlèvement 
de Morille et d'Elissagaray.] 

« Il est très certain, écrit Dupont, que, sans la catastrophe de 
Zurich, on aurait pu disposer d'une armée nationale et toute royale 
qui en aurait imposé par son nombre, par sa discipline, par son cou- 



10 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

rage, et surtout par son dévouement... Les événements politiques de 
l'Europe... ont fait échouer les projets, les plans et toutes les me- 
sures des royalistes de l'intérieur, auxquels il avait été expressément 
défendu de prendre les armes avant que l'armée des alliés n'y eût 
pénétré. » (Essaie p. 36, 37.) 

D'autre part, les Mémoires de Fauche rapportent une conversation du géné- 
ral Pichegru avec ce libraire, conversation qui témoigne au moins chez celui 
qui l'a rédigée d'une connaissance exacte et précise des projets royalistes, 
t. II, p 337-338. 

«Vous savez, me dit-il, que tandis qu'on détruisait au dehors 
l'ascendant militaire et politique du gouvernement directorial, des 
coups plus terribles encore, préparés par la Confédération des roya- 
listes de l'intérieur, allaient lui être portés des divers points du 
royaume. Outre les provinces de l'Ouest qui comptaient plus de 
soixante mille royalistes en armes, Lyon ranimait les souvenirs 
de sonhéroïque résistance ; les fidèles de Lyon donnaient la main aux 
fidèles du Jura, régulièrement préparés à une levée en masse. Vous 
savez que, traversant l'Allemagne, je vins me placer en Suisse, vers 
la lisière de la Franche-Comté, province qui m'était dévouée tout 
entière... Si l'armée française était battue, je devais en réunir les 
débris ; les proclamations étaient imprimées ; tous les subsides étaient 
fournis par l'Angleterre à l'agence royale. 

« De l'autre côté, sur les rives du Rhône, de l'Hérault et de la 
Haute-Garonne, des partis royalistes se montraient à découvert : 
c'était surtout dans la Guyenne, la Gascogne, la Saintonge et VAn- 
goumois que la fédération prenait une forme régulière. Ces provinces 
étaient liées entre elles par une association dont Bordeaux était le 
ce/2/re,etdans laquelle on comptait vingt mille hommes militairement 
organisés. 

« Tout était disposé au mois de septembre pour la levée générale 
des boucliers, quand des revers inattendus vinrent enchaîner le zèle 
et faire évanouir les espérances des amis du roi. » 

6. - 21 mars 1797. Instructions données par lord Grenville au 
colonel Craufurd. 

(Traduction.) 

«... En ce moment... des soulèvements partiels, soit dans Paris, 
soit dans une province, non seulement ne doivent pas être engagés par 
vous, mais sont manifestement inhumains, car ils compromettent 
sans profit les meilleurs amis de la monarchie, et impolitiques, car ils 
fortifient le pouvoir du gouvernement. C'est seulement parle succès 
des ennemis extérieurs du gouvernement français quel'on peutouvrir 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 11 

une voie sûre à une lutte heureuse de l'extérieur contre la tyrannie 
dont souffre aujourd'hui la France. » 

Craufurd devra donc réduire les dépenses « pour Tintérieur de la 
France ». Cependant : 1° il faut entretenir « les canaux de corres- 
pondance, qui peuvent être nécessaires pour recevoir des renseigne- 
ments sur les actes du gouvernement, l'état des partis et de l'opinion 
publique en France » ; 2« subvenir aux besoins de « ceux des émigrés 
qui peuvent avoir quelque droit à des secours, à raison des services 
qu'ils ont rendus à M. Wickham et à M. Talbot pendant leurs 
missions et qui vivent actuellement de ces secours » ; 3o faciliter 
à Précy « le moyen de conserver. .. les officiers et autres agents qui 
lui ont été attachés depuis le commencement de ses rapports avec 
M. Wickham, dans le but d'avoir les premiers cadres d'une armée 
qu'on pourrait lever dans les provinces de l'Est après le succès 
d'une invasion en France »... 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date. Cf. Lebon, 
V Angleterre et l'Emigration, p. 270.) 

7. — Edimbourg, 21 avril 1799. Le baron de Roll ^ à Wickham, 

« Mon cher Wickham ^ il faut absolument que je m'entretienne 
un instant avec vous... Je suis premièrement chargé de vous répéter 
de la part de S. M. B. Monsieur ce que vous savez si bien de son 
extrême désir d'être mis en activité. Vous vous imaginez bien que 
le renouvellement des hostilités sur le continent a augmenté son im- 
patience et lui rend de jour en jour sa situation plus pénible. Mais il 
espère que les événements qui viennent de se passer pourraient 
déterminer votre gouvernement à saisir ce moment pour relever 
avec vigueur le parti des royalistes de l'intérieur. Les lettres que 
Monsieur reçoit des provinces de Bretagne, de Normandie et de la 
Vendée s'accordent toutes pour presser et solliciter instamment de 
profiter du moment actuel. lien esta peu près de même des provinces 
du Midi. Les dispositions doivent s'enflammer de plus en plus à me- 
sure que les armées républicaines éprouveront des revers sur le 
continent. Si par toutes ces considérations réunies vous croyez aper- 
cevoir que le ministère serait disposé à s'occuper incessamment 
d'un plan relatif aux royalistes de l'intérieur, Monsieur espère que 

1. D'origine suisse, sollicitait le ministère anglais de délivrer sa patrie du joug 
des Français ; il partit pour la Suisse quelque temps après, pour préparer les voies 
au comte d'Artois qui devait se rendre dans ce pays et prendre le commandement 
des levées suisses que Wickham et le major Hamstiy furent chargés d'organiser 
avant et après la bataille de Zurich. Le baron de Holl était un des conseillers les 
plus écoulés du comte d'Artois, qui résidait ù Edimbourg. 

2. Wickham, à son retour de Suisse, avait été chargé des fonctions de sous- 
secrétaire d'Ktat au ministère de l'intérieur. 



12 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

VOUS vous intéresserez à faire valoir auprès des ministres tout 
l'avantage qu'ils peuvent tirer de sa personne et toute la confiance 
qu'il mérite de leur part... » 

(Publié dans la Correspondance de Wickhaniy t. II, p. 423, 424.) 

8. — [Londres] 3 mai 1799. Lettre de Duthell ^ [à M. Frère ^ ]. 

« M. Dutheil ne sachant pas si Milord Grenville a donné connais- 
sance à M. Frère des relations qui existent avec le général Pichegru^, 
il croit convenable, dans l'incertitude où il est à cet égard, d'avoir 
rhonneur de lui envoyer copie de la lettre qu'il vient de recevoir de 
M. La Rue *, le collègue au Corps législatif du général Pichegru et 
son homme de confiance. Si Son Excellence croyait que M. Dutheil 
pût mander quelque chose aujourd'hui au général Pichegru, en ce 
qui peut être relatif à la réponse qu'il désire, M. Dutheil attendra 
ce que Milord Grenville jugera à propos de lui faire savoir à cet 
égard. » 

[Suit copie de la lettre de La Rue àDutheil, Hanovre, 20 avril 1799. j 

« Des lettres que nous avons reçues hier ont déterminé le général 
Pichegru à me faire partir en avant du côté de la Suisse. Je merends 
directement à Augsbourg pour y conférer avec des agents impor- 
tants. Il m'y aurait accompagné s'il eût reçu réponse à la lettre qu'il 



1. Le représentant du comte d'Artois à Londres et son intermédiaire habituel au- 
près des ministres anglais. 

2. Au ministère du Foreign Office (Affaires étrangères). Frère semble tout parti- 
culièrement, à cette époque, chargé par Grenville des affaires des émigrés réfugiés en 
Angleterre. 

3. Pichegru, après son évasion de la Guyane, avait été bien accueilli en Angle- 
terre. (Cf. les lettres de Malouet, du duc de Portlandt la note de Canning dans la 
Correspondance de Wickham, t. II, p. 75-79, 80, 81, 83.) — Il quitta cependant 
l'Angleterre en décembre 1798, pour suivre de près la négociation entamée par 
Fauche-Borel avec David Monnier, qui se disait autorisé par Barras. M. Daudet a 
raconté longuement cette intrigue dans les Emigrés et la 2« coalition et dans son 
Histoire de l'Emigration, t. IL Les Archives anglaises, surtout les papiers de 
l'agent du prince d'Orange à Berlin, 1 Anglais Stamfort, contiennent de curieux 
détails à ce sujet. Pichegru séjourna en Allemagne jusqu'en juillet 1799, souvent 
à Brunswick, où le duc l'accueillit avec faveur, ou à Zelle (duché de Saxe-Golha). 
L'Angleterre lui faisait une pension sans lui donner de mission spéciale sur le con- 
tinent. Il projetait un soulèvement de la Franche-Comté contre le Directoire, 
entretenait des relations avec des officiers de l'armée républicaine, songeait même 
à profiter de la popularité qu il avait conservée en Hollande pour se mettre à la tête 
dune insurrection de ce pays contre le gouvernement français. Aucune de ces 
intrigues n'aboutit. Cf. Mémoires de Fauche, t. II, p. 241 à 285. 

4. Beau-frère de Hyde de Neuville, député de la Nièvre (an IV et an V) aux 
Cinq-Cents, déporté au 19 fructidor ; s'échappe de la Guyane avec Pichegru, Iç 
suit en Angleterre, puis en Allemagne, d'où il le quitte pour revenir en 
France. Pichegru, exclu du rappel des fructidorisés par Bonaparte, ne put l'y 
accompagner. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 13 

a écrite en Angleterre il y a environ trois semaines. Hâtez, si vous 
pouvez, l'expédition de ce qu'il demande : nous n'attendons que cela 
pour entamer nos plans. Il ne faut pas perdre de vue qu'il n'y a que la 
plus grande activité qui puisse réparer la funeste perte de temps que 
nous avons faite. Le général Pichegru le sent tellement qu'il est 
décidé à ne donner que dix jours à l'attente de cette réponse. Nos 
points de réunion sont fixés en conséquence ; mais il serait infini- 
ment fâcheux qu'on n'eût pas auparavant satisfait à ce qu'il ré- 
clame... » 



Dutheil ajoute au bas de la copie : 



« Je vous réitère de ne pas nous abandonner au moment où votre 
assistance nous devient le plus nécessaire. Des intrigues ont déjà 
donné du dégoût à cet important serviteur du roi ; il y aurait peut- 
être plus d'inconvénient qu'on ne croit à ajouter ce nouveau motif 
de mécontentement et d'inquiétude. 

« Je ne vous parle pas encore de la rentrée de vos fonds qui me de- 
viennent bien moins nécessaires, quoique leur remplacement soit 
convenu avec le général Pichegru. Dès qu'il sera en état de le faire, 
je m'en occuperai et je vous en donnerai avis. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

9. — Londres, 21 mai 1799. Wickham au major Pérou 
(Pichegru). 

« Mon cher major, votre lettre du 23 mars m'est parvenue très 
exactement ; mais malheureusement il n'y a guère plus de huit jours 
que j'ai su la déchiffrer. La lettre de votre compagnon de voyage à 
M. Dutheil du 20 du mois passé m'a encouragé à faire de nouveaux 
efforts et enfin ils ont été heureux. . 

« Votre lettre lue, mon premier soin a été de la communiquer à 
qui de droit. Le style tant soit peu énigmatique qui y domine m'a 
empêché de deviner vos vues et vos intentions. On croit cependant 
avoir trouvé remède à tout. 

« Il faut de toute nécessité que vous ayez en vue soit la Suisse *, 
soit les Pays-Bas. 

« Dans l'un et l'autre de ces deux cas, vous trouverez actuellement 
suriccontincntdeuxpersonnesjouissantruneetrautrcde la confiance 
du gouvernement... 

1. Ou plutôt la Franche-Comté. C'est seulement lorsqu'il est oblige de renoncer 
à ses projets sur la Franche-Comte, apriNs la défaite des alliés à Zurich, que 
Pichegru songe à prendre le commandement des royalistes du Sud-Ouest, organisés 
en Instituts. 



14 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

« Dans le cas que vos vues se portent sur les Pays-Bas, vous irez à 
Berlin où vous trouverez M. Grenville ^ prêt à vous recevoir, après 
avoir communiqué, si vous le jugez convenable, avec celui dont vous 
vous vantez d'avoir été si bien accueilli. Si vous croyez votre pré- 
sence plus nécessaire du côté de la Suisse, le colonel R. Craufurd 2, 
qui doit y être à l'heure qu'il est et qui vous connaît déjà, sera charmé 
de vous recevoir. 

« Partout où vous irez, comptez que vous recevrez Taccueil que 
vous méritez à tant de titres. Je ne m'engagerai pas dans des raison- 
nements oiseux sur l'état actuel des choses et les assurances qui 
doivent en naître. Vous êtes sur les lieux ; vous devez connaître les 
moyens qu'on doit employer pour en profiter mieux que per- 
sonne... » 

(Publié dans la Correspondance de Wickham, t. II, p. 425-426.) 

10. — Londres, [3] juin 1799. Instructions de lord Grenville à 

lord Mulgrave ^. 

(Traduction.) 

... « Le principal objet de ce plan est que l'armée russe, sous le 
maréchal Souvarow, aidée par les Suisses et les troupes de Wurtem- 
berg, puisse, après la réoccupation de la Suisse, pénétrer jusquà 
Lyon, de façon à occuper cette cité en force et prendre une bonne 
position militaire dans les provinces voisines avant l'hiver, afin 
que l'étendard de la monarchie française y soit relevé sous le comte 
d'Artois, et qu'on sache si les dispositions de la contrée permettent 
de pénétrer plus en avant dans l'intérieur du pays pendant le prin- 
temps, et même d'entreprendre des opérations dans la direction de 
la capitale elle-même. .. » 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

11. — Londres, 6 juin 1799. Instructions de lord Grenville à 

M, Wickham *. 

(Résumé et traduction.) 

Wickham est envoyé en Suisse à la nouvelle des premiers succès de la 

1. Ambassadeur anglais à Berlin : Thomas Grenville, frère de lord Grenville ; il 
est mêlé à l'intrigue de Pichegru comme Stamfort. 

2. Qui venait d'être nommé en remplacement de Talbot à Augsbourg, où se tenait 
l'ambassade anglaise de Suisse, en attendant que les Français, qui avaient occupé 
ce pays, en fussent chassés. Craufurd fut rappelé en Angleterre, lors de la deuxième 
mission de Wickham sur le continent, pour servir comme quartier-maître général 
sous les ordres du duc d'York en Hollande. 

3. Envoyé au quartier général de l'archiduc Charles et du général Korsakow en 
Suisse, pour concerter avec eux les opérations de la campagne. 

4. Voir, sur cette seconde mission de Wickham, Lebon, p. 270 et suiv., et Corres- 
pondance de Wickham, t. II, p. 104 et suiv. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 15 

coalition. Il est surtout chargé d'assurer la délivrance de ce pays, occupé par 
les Français, de faire des levées suisses ou allemandes et de favoriser les 
progrès militaires des armées autrichiennes et russes. 

Jusqu'à nouvel ordre, et en attendant les victoires de la coalition, il s'abs- 
tiendra de dépenser au delà d'une somme fixée d'avance — 1.200 livres ster- 
ling par mois et même 1.000 — pour entretenir les relations de 1 Angleterre 
avec les royalistes français, et assister les députés fructidorisés, etc. Cepen- 
dant : 

« Vous savez, ajoute Grenville, que des promesses ont été faites au 
général Pichegru, à Précy et aux princes français, promesses d'assis- 
ter tout parti de l'intérieur qui présenteraitassez de consistance pour 
résister au gouvernement tyrannique actuel et prêter aux alliés un 
concours efficace ^... » 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date ) 

12. — Augsbourg, 17 juin 1799. Le comte de Précy à Wickham. 

(Extrait.) 

Précy ignore encore l'arrivée prochaine de Wickham en Suisse. 

«... Je dois croire que M. de Talbot aura avec vous des confé- 
rences sur son travail de cet hiver. Je regrette vivement qu'il soit 
arrêté, car l'on pouvait raisonnablement en attendre les résultats les 
plus heureux, et la manière dont il a été supprimé a jeté le décourage- 
ment et l'inquiétude parmi les personnes de l'intérieur avec lesquelles 
on était en rapport, et qui, je puis le dire, étaient choisies pour leurs 
talents et leur moralité... » 

[Correspondance de Wickham, t. II, p. 428.) 

13. — Augsbourg, 3 juillet 1799. Dandré à Wickham. 
Dandré vient d'apprendre le retour de Wickham en Suisse. 

«... J'attendais vos ordres pour... concerter avec vous les moyens 
de réparer le mal qu'ont fait une fausse interprétation des ordres de 
votre gouvernement et une foule de malentendus plus inexplicables 
les uns que les autres... J'espère, quand j'aurai l'honneur de vous 
voir, que vous serez convaincu que nous avons fait tout ce qui dépen- 
dait denous pour ne laisser détruire aucun des établissements que nous 
avions formés (quoique quelques-uns aient souffert de la suspension qui 
régne depuis trois mois) et que je suis toujours le même, absolument 
dévoué à vos ordres. .. » 

(Correspondance de Wickfianitl. II, p. 430.) 

1. Dandré apprit nvcc une satisfaction peu dissiinuléc lu retour de Wickham en 
Suisse. Voir sa lettre à l'ambassodeur ci-dessous citée. 



16 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

14. — Augsbourg, 10 juillet 1799. Lettre de La Rue à DutheiL 

« Voici ce que me mande mon frère : 

« Beaucoup de généraux et de députés n'attendent que le moment 
de se montrer. J'en connais plusieurs qui pourraient être par leurs 
talents et leur influence de la plus grande utilité. Cependant il fau- 
drait pour les militaires que le général Pichegru, qui a en France et 
surtout dans l'armée plus de partisans que jamais, se mît à leur tête 
et de manière à être leur garantie. 

« Indiquez-moi un lieu où je puisse me réunir à vous et \ous porter 
sur tout cela et beaucoup d'autres objets des détails et des renseigne- 
ments précieux. 

« L'état du Directoire est tel que s'il se manifestait une insurrection 
bien dirigée, je ne lui vois aucun moyen de résistance. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

15.— [Londres], A//e7î Office, ISjuillet 1799. Flint^ à John King. 

(Résumé et traduction.) 

Flint rapporte une conversation qu'il vient d'avoir avec Barthélémy ^ et le 
générlal Willot ^. Il leur a recommandé de se tenir à l'écart de toute relation 
qui puisse compromettre leur situation en Angleterre, de ne voir même que 
les personnes que le gouvernement les autorisera avoir. 

Barthélémy déclare qu il ne veut plus s'occuper d'affaires publiques : « Les 
temps, dit-il, m'ont fait jouer un rôle bien peu adapté à mon caractère. Je 
n'aime à présent que la tranquillité. » 

Willot, au contraire, demande à être employé dans la Sud de la France : 
« Je ne suis, dit-il, ni patriote ni républicain enragé. Je suis Français et 
je désire contribuer autant qu'il me sera possible au rétablissement (sic) et 
au bonheur de mon pays et servir la cause des honnêtes gens qui est celle 
de votre gouvernement aussi bien que celle des alliés. » Flint lui répond 
qu'il n*a aucune autorisation du gouvernement pour prendre des engagements 

1. Qui était chef du bureau des Etrangers à Londres (AHen Office). 

2. Evadé de la Guyane, arrivé après Pichegru en Angleterre. L'ancien directeur 
profita de l'amnistie que Bonaparte accorda aux fructidorisés pour revenir en 
France. 

3. Willot, né à Belfort en août 1755, fils de Willot de Grandprez, sengage comme 
volontaire au régiment provincial de Nantes en 1771 ; lieutenant de grenadiers en 
juin 1780, capitaine en février 1787, lieutenant-colonel du 5^ bataillon d'infanterie 
légère en mars 1792, envoyé à l'armée des Pyrénées, où il obtint les grades de 
général de brigade, juin 1795, et de général de division, juillet 1795 ; envoyé à 
l'armée de l'Ouest en septembre 1795, puis à l'armée des Côtes de l'Océan en janvier 
1796, suspect à Hoche, chargé des commandements de la 8^ division militaire, 
juillet 1796, à Marseille, encourage les menées royalistes, est défendu dans le Direc 
toire par Garnot ; élu député en 1 an V par les Bouches-du Rhône, déporté, s'en- 
fuit avec Pichegru ; mais tombe malade et n'arrive qu'après lui en Angleterre 
(d'après son dossier, Archives administratives de la guerre). 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 17 

à ce sujet ; qu'il en parlera cependant au ministre de lintérieur, le duc de 
Portland. 

Willot, en partant, dit à Flint avec chaleur : 

« J'espère, Monsieur, que votre gouvernement ne me regarde pas 
comme un Français suspect. Je ne le mérite pas. Je me suis toujours 
comporté en galant homme et je ne désire rien' mieux que d'être 
employé et remis en activité '. » 

{Record Office^ Foreign Office, France, à la date.) 

16. — Edimbourg, 18 juillet 1799. Le comte d'Artois à 
M. Wickham. 

« Monsieur, je profite avec empressement du départ du baron de 
Roll 2 pour vous parler de la vive satisfaction que j'éprouve de voir 
enfin arriver le moment où, grâce à l'intérêt de votre gouvernement, 
je vais me trouver à portée de servir les causes unies de S. M. B. et 
du roi mon frère.., » 

(Publié dans la Correspondance de Wickham, t. II, p. 430.) 

17. — Londres, 18 juillet 1799. Dutheil à lord Grenville. 

« En conséquence des ordres que M. Dutheil vient de recevoir de 
Monsieur, il a l'honneur, en demandant à Milord Grenville la per- 
mission de voir le général Willot de la part de Monsieur, d'informer 
Son Excellence que S. A. R. désire que M. Dutheil ait l'honneur de 
rappeler à Milord Grenville tout le parti qu'on peut tirer de liniluence 
dont le général Willot jouit dans les provinces méridionales de la 
France, où Monsieur pense que ce général pourrait être utilement 
employé. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

18. — Edimbourg, 19 juillet 1799. Monsieur à lord Grenville. 

«. . J'accepte avec le plus vif empressement la proposition (jue 
vous me faites de vous revoir, ainsi que M. Pilt, avant de me rendre 
en Suisse •^ et je ne perdrai pas un moment pour me porter au lieu 
que vous m'indi(iuerez, aussitôt que vous m'aurez donné le signal 
que j'attendrai avec une juste impatience. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date ) 

1. Cf. Diarifs of Windham, nu 11 «l nu l.'J août 179t) Willot alla voir Itî ministre 
de la guerre. Wirulham Ir juge ussc/. uuil : « li p.ula trop et, pur sa rouversatiou, uc 
donna pas une haute idée de ses talents, u Willot allait partir poiu- le conlineut. 

2. Le baron de Koll se rend en Suisse, où Monsieur doit le suivre à bref délai. 
Une lettre de I..emnitre ù Talleyrand. Hambourg, 12 vendémiaire an VIII 
(4 ocl. 1799), annonce que l'émigré (!aslelnnu a été envoyé de I.oiulres pour prépa- 
rer la réception du cornue d'Artois eu Suisse (Archives des Allaires étrangères. 
Miiinbourg). 

3. Où le baron de Roll Tavait précédé (lettre du 18 juillet). 

2 



18 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

19. — Londres, 30 juillet 1799. Lord Grenville à Wickham. 

(Résumé.) 

Grenville prévient Wickham que le comte d'Artois se propose de partir 
dans une quinzaine de jours pour la Suisse, où il doit se mettre à la tête du 
mouvement royaliste. Il ne sera accompagné que de quatre ou cinq personnes, 
Lyon sera sans doute son principal objectif. Mais les troupes suisses, qui 
sont levées par l'Angleterre pour la défense de leur pays \ voudront elles 
entrer en France ? 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

20. — Zurich, 28 juillet, l^r août 1799. Wickham à lord 
Grenville. 

(Résumé.) 

Le 28 juillet, Wickham écrit à Grenville qu'à son avis, quelque désirable 
que soit la présence de Monsieur et des princes en Suisse, en ce moment 
leur arrivée serait plus gênante qu'utile. (Voir Record Office, Foreign Office, 
Suisse, à la date.) 

Le ler août, il leur annonce que Pichegru se rend en Suisse « sur le désir )> 
de l'archiduc Charles, C'est le colonel l^lunkett qui, à son arrivée du quartier 
général de l'archiduc, le lui apprend. Le colonel lui a demandé s'il ne croyait 
pas qu'il conviendrait de confier le commandement de « 1 armée suisse » à 
Pichegru; l'archiduc s'en montrerait satisfait, pourvu que Pichegru consentît 
à servir sous ses ordres et que le général Hotze résignât toute prétention à 
cet égard. L'archiduc, a dit Plunkett, lui avait « montré une correspondance 
qu'il entretenait avec le général au sujet de la campagne ». 

Wickham avait fait une réponse évasive à Plunkett. Il venait de recevoir 
une lettre de Pichegru lui annonçant son arrivée prochaine, sans allusion à 
sa correspondance avec l'archiduc. Il pensait qu'il y aurait (( avantage )) à 
lui donner ce coqimandement au voisinage de la frontière, tant à cause de 
son nom, de sa réputation, que de ses talents militaires ''^. 

(Publié dans la Correspondance de Wickham, t. II, p. 141.) 

21. — Edimbourg, 4 août 1799. Monsieur à Dutheil. 

(Résumé.) 
Le comte d'Artois charge Dutheil de prévenir le ministre Grenville qu'il 

1. Le lieutenant-colonel Ramsaj^ devait organiser ces levées suisses comme 
« inspecteur général et commissaire des levées suisses ». Il n'y réussissait guère ; 
aussi Wickham n'était pas pressé de voir arriver Monsieur. 

2. Pichegru se rendit, en effet, en Suisse. Un extrait du journal de Lullin, secré- 
taire de Wickham, extrait publié dans la Correspondance de Wickham, t. II, p. 148, 
prouve que le général français eut avec l'archiduc, en présence de Wickham, une 
entrevue (entre le 14 et le 17 août), au moment où l'archiduc essayait d'enfoncer les 
lignes de Masséna sur TAar. Pichegru était d'ailleurs en correspondance avec Kor- 
sakow comme avec l'archiduc Charles : Cf. Correspondance de Wickham, t. II, p. 249. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 19 

se rendra, sur son invitation, à Stowe chez le duc de Buckingham, le 8, et 
qu'il ira ensuite voir à Dropmore lord Grenville et Pitt . 

Le duc d'Harcourt et lord Grenville se rencontreront à Dropmore avec 
Monsieur. 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

22. — Londres, 18 août 1799. Monsieur à lord Grenville, 

(Résumé.) 

Monsieur est cruellement affecté du retard « que les circonstances et la 
dépêche de Wickham » apportent à son départ. 

Il restera quelques jours à Londres, puis se rendra « vers Southampton », 
au lieu que lui indiquera lord Grenville. 

(Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

23. — 22 août 1799. Uévêque [dArras] au marquis de Buckin- 
gharUy à Stowe. 

(Résumé.) 

Le comte d'Artois, arrivé le lundi précédent à Londres, devait partir le 
jeudi [pour la Suisse]. Il dîna le mercredi chez le frère du marquis avec 
M. Pitt, mais ne put parler d'affaires, et l'entretien avec Pitt fut remis à 
plus tard. 

Il fut alors malade des hémorroïdes, et Pitt vint le voir chez lui. Mais lors- 
qu'il se rétablit, il n'était plus question de son départ, parce que Wickham 
ne réussissait pas « du côté du rassemblement des Suisses ». Monsieur 
ne veut pas se rendre à l'île de Wight « pour servir d'épouvantail aux répu- 
blicains )) ; il voudrait cependant quitter Londres, mais voir auparavant 
lord Grenville et Pitt ' . 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

[Le comte d'Artois mit à profit son séjour à Londres, nous le verrons plus 
loin, pour obtenir du ministère anglais des subsides destinés aux insurgés 
de l'Ouest Mais il dut renoncer décidément à partir pour la Suisse après la 
victoire de Masséna à Zurich.] 



G. — LA CONSPIRATION ANGLAISE DANS l'eST ET LE MIDI, après 

Zurich, avant Marengo (1799-18(X)), et la mission de Dupont- 
Constant à Augsbourg, 

Après Zurich (septembre 1799;, la Suisse est perdue pour les armées coa- 
lisées, d'autant que la Russie se décide à retirer de la coalition son contingent. 
Aussi le projet de pénétrer par la Suisse sur Lyon est abandonné. Sans renon 

L La défaite des coalisés À Zurich força le ministère anghiis vi le comte d'Artois 
à renoncer au plan de pénétration dans le Lyonnais par la Suisse. 



20 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

cer absolument à l'espoir de soulever la Franche-Comté après une victoire des 
Autrichiens sur le Rhin, le gouvernement anglais et Wickham veulent profiter 
de l'organisation des Instituts du Midi pour faire insurger la Provence^ le 
Languedoc et la Guyenne. L'entrée des Autrichiens en France par le comté de 
Nice doit faciliter le mouvement. Et comme l'Ouest est en armes de nouveau 
depuis octobre, la France républicaine sera attaquée de tous les côtés à la fois. 
L'insurrection du Midi aura pour chefs Willot qui s'offre et Pichegru qui 
se résigne. Le premier commandera en Provence et en Languedoc ; le second 
en Guyenne, si les circonstances restent contraires à ses plans en Franche- 
Comté. Après Zurich, ils sont l'un et l'autre à Ueberlingen, en Souabe, oii 
Willot a rejoint Pichegru, Wickham l'annonce à Condé, qui arrive de Russie 
avec son corps d'armée (trop tard pour prendre part à la bataille de Zurich). 
Il lui écrit, le 22 septembre, qu'il « trouvera M'^" Z... (Pichegru), fort bien 
pensante, et prête à se jeter aux pieds de Son Altesse )), et le l^'i' octobre : 
« M"e Z... devait se rendre à Pfullendorf ce matin. Elle a appris le départ 
de V. A. et doit se rendre à Slokach dans le jour. J'en suis extrêmement 
content sous tous les rapports. )) Chantilly, Y, t. XV, p. 433, 435.) 

Condé voit, en effet, Pichegru et Willot. « J'ai vu M"" Zède, écrit-il au 
Prétendant ; elle m'a dit qu'elle était toujours prête à obéir à vos ordres, mais 
qu'elle suppliait V. M. de ne pas lui ordonner de se mettre en évidence tant 
que ses amis intimes seraient en prison, attendu que ce serait leur donner 
la mort... Je n'ai vu que le major du Pérou (Pichegru), Willot et Imbert 
(Imbert-Colomès). Je n'ai entendu parler d'aucun autre, et s'il y en avait 
d'autres à Ueberlingen, où j'ai été trois jours, il est à présumer que leurs in- 
tentions ne sont pas bien pures, puisqu'ils n'ont pas cherché à me voir, 
comme ont fait les trois autres, dès que j'ai été à portée d'eux. )) (Chantilly, 
Z, t. II, p. 184.) 

Condé, que le Prétendant vient de charger de la direction de l'agence de 
Souabe pendant son séjour dans ce pays, veut faire servir ces deux généraux 
au succès des plans royalistes L'émigré Ferrand lui écrit de Munich, le 
23 décembre : « C'est une pénible tâche que celle de l'agence nouvellement 
imposée à Monseigneur. Les deux hommes dont nous avons parlé à Lands- 
berg, Pichegru et surtout Willot, ont conservé assez de correspondances et 
de partisans en France pour y être écoutés en parlant au nom de Monsei- 
gneur. Les portes leur seront sûrement ouvertes d'ici à peu de temps. Mon- 
seigneur sait combien j'étais disposé à travailler avec eux. Je suis toujours 
à leur égard dans les mêmes dispositions, car je n'ai aucun doute sur la 
pureté de leurs vues. » (Chantilly, Z, t.XLVIII.) 

Cependant Condé ne joue quun rôle très secondaire dans l'affaire du 
Midi. C'est Wickham qui la propose au ministère anglais, qui la défend 
auprès du gouvernement autrichien, qui la dirige et la subventionne Willot, 
dont il approuve les plans, Dandré, qui doit mettre en branle les Instituts 
du Midi, le consultent en tout ; les délégués royalistes se rendent auprès 
de lui, et cest à Augsbourg, sons sa présidence, quils se réunissent, dans 
l'hiver de 1800, pour arrêter le plan général d'opérations. 

Ce plan, d'ailleurs, a varié de décembre à février. Eu décembre, Wickham 
espère encore utiliser les relations que Pichegru conserve en Franche-Comté 
pour soulever la province, et il ne songe pas ou peu à soulever la Guyenne. 
En février, le mauvais vouloir de l'Autriche laisse peu d'espoir de réaliser 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 21 

le plan Franc-Comtois et Dupont-Constant sollicite Pichegru de prendre 
la direction du mouvement de Guyenne. Aussi le général reçoit une des- 
tination nouvelle, Bordeaux après Besançon. Les lettres suivantes témoi- 
gnent de l'évolution qui se fait dans les idées de Wickham. Il importe de les 
résumer, ne fût-ce que pour marquer la liaison qui unit les complots du Sud- 
Ouest aux complots de l'Est. 

Un passage du Mémoire historique de Dupont-Constant sert de commen- 
taire à ces lettres, et prouve le rôle important que devait jouer l'Institut 
bordelais dans la conspiration anglaise. 

<( Environ un mois après [le 18 Brumaire], je reçus del'agence l'or- 
dre de me rendre à Augsbourg. Je partis dans la huitaine avec un 
passeport de ma façon. Je m'arrêtai quelques jours à Lyon et pour- 
suivis ma route avec M. le chevalier de F... (Floirac). Il fallut s'arrêter 
encore quelques jours à Altkirch, où nous apprîmes qu'un cordon de 
troupes françaises venait d'être établi sur la rive gauche du Rhin... 
Enfin, malgré les obstacles qui nous retardèrent beaucoup, et malgré 
les glaces qui rendaient les routes presque impraticables, nous arri- 
vâmes à Augsbourg vers le 15 nivôse... Après avoir vu les membres 
de l'agence du roi, nous fûmes présentés par le général Willot à 
M. W... (Wickham). Celui-ci s'entretint longtemps avec nous et l'en- 
tretien roula principalement sur la situation de la France et sur les 
dispositions des royalistes. Je leur remis un mémoire détaillé sur 
l'arrondissement de la Guyenne, avec un état des objets dont nous 
avions besoin. Il nous promit les secours et les moyens nécessaires 
pour nous préparer à un mouvement général qu'on projetait alors 

« Encouragé par ces promesses magnifiques, enchanté des projets 
et du plan qui avait été concerté entre l'agence et deux généraux 
français, j'entrepris d'engager le général Pichegru à venir prendre le 
commandement des armées royales de la Guyenne et des Landes. Je 
parvins à l'y déterminer ^ De quels succès ne devions-nous pas nous 
flatter ayant ce général à notre tête ? Quelle confiance n'eût-il pas 
inspirée à tous les braves qui devaient cire sous ses ordres. Je me 
chargeai de lui envoyer des passeports pour lui et pour son étal- 
major, ce que je fis très exactement dès mon retour à Bordeaux *. 

1. Ci. Essai, p. 91 : « J'eus beaucoup de peine à déterminer le général Pichegru à 
venir prendre le commandement des armées royales des trois arrondissements que 
je dirigeais II lui répugnait, mcdit-il,dc comniander des bourgeois; mais lorsqu'il 
sut que ces armées étaient composées en grande partie d'hommes exercés au métier 
des armes, il se rendit à mes instances. Je lui promis et lui envoyai depuis de 
Bordeaux tous les passeports nécessaires pour son état-major. » 

2. A tout hasard je cite ce passage de la lettre des frères Marul à Imbert-Colo- 
nu-a (Papiers saisis à liayreutb, p. 40) : «M. Dupont, ancien capitaini' au rëgiiiwnt de 
Lyonnais, nous apporta une lettre du général W'illot, datée d'Augsbourg, 2 mars, par 
laquelle cet ollicier est désigné sous le nom de Pierre Henri, ollicier supérieur. 
Par cette lettre, le général nous recommandait de remettre ù M. Dupont tous les 
renseignements que nous nou« serions procures et de le seconder de tout notre 



22 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

Muni des instructions et des ordres pour l'intérieur de la France, je 
quittai ' l'Allemagne pour retourner à mon poste... J'arrivai à Bor- 
deaux le 9 mars 1800. » 



24. — Augsbourg, 9 décembre 1799. Wickham à lord Minto. 

(Résumé et traduction ) 

Il ne faut plus espérer que les troupes russes se joignent à celles des Au- 
trichiens en Allemagne ou en Italie, ni même le désirer. Dès lors l'Autriche 
reste seule à combattre la France sur ces deux frontières. Mais derrière la 
ligne de ses armées on peut organiser une petite armée royaliste. 

« A ce sujet je pense, continue Wickham, que vous pouvez dire à 
M. Thugut en toute sûreté et sans crainte de vous compromettre 
que, dès l'instant où la première ville de la frontière aura été prise 
de la manière ci-dessus indiquée, une tentative générale sera faite 
à nos frais sur les derrières de l'armée ennemie, pour établir un parti 
armé hostile au gouvernement existant, qui prendra des couleurs 
plus ou moins royalistes, suivant les circonstances. Cette tentative 
sera conduite non par des émigrés dont l'archiduc, comme M. Thu- 
gut, se défie si profondément, mais par les généraux Pichegru, 
Willot et Précy, qui en ce moment travaillent sans trêve à se pro- 
curer les moyens de faire flotter l'étendard de la Royauté lorsque 
l'état des affaires rendra la chose prudente et possible. 

« Willot se tient prêt à partir pour les départements du Midi ^ (où 
il se propose de rester caché jusqu'après les premiers succès de la 
campagne) quand il en sera temps. Le général Pichegru est dans la 



pouvoir, » et p. 43 : « M. Dupont nous répondit qu'il était d'autant plus fâché de 
ce que nous venions de lui dire, relativement à M. Boniface de Fonbeton, qu'il avait 
compté le trouver à Sisteron, ainsi que portait son instruction du général Willot, et 
recevoir de lui des renseignements sur l'intérieur de la France relatifs à sa 
mission, et qu'en outre ce M. Boniface de Fonbeton devait lui faire connaître 
M de Puiverd, avec lequel il devait traiter dafiPaires dans l'intérieur. » 

Quel est ce Dupont ? Le nôtre ? mais il n'avait pas été capitaine au régiment 
de Lyonnais, ou nous ne le savons pas. En tout cas, parti d'Augsbourg, le 2 mars, 
il n'était pas arrivé à Bordeaux le 9. — Cf. le brevet donné à M. de Boissac, 
introduction, p. xxvni. 

1 II est important de consulter les pièces justificatives qui terminent VEssai 
de Dupont-Constant. La lettre du président de Vezet du 28 mars 1815 et celle de 
l'abbé de Lacombe du 8 avril 1816 témoignent que Dupont-Constant a a été envoyé 
à Augsbourg pour y recevoir les ordres et instructions de l'agence pour l'organisa- 
tion de l'intérieur » ; de même celle de 'Willot, p. 183, 184. Cf. celle de Dandré, 
p. 183 ; celles du comte de Floirac, p. 182 et 186 ; celle du marquis de Puivert, 
p. 185 

2. Voir sur l'expédition de Willot : Daudet, Histoire de l'Émigration^ t. II, p. 392- 
394, t. III, p. 175 à 192; Lebon, l'Angleterre et l'immigration, p. 278 à 283, d'après 
les Archives anglaises ; une série de lettres dans les Papiers saisis à Bayreuth 
et à Mende, en particulier celles des frères Marut, p. 24 à 66. — Cf. "Vandal, 
Avènement de Bonaparte, t. II, p. 17, 101, 354, 370. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 23 

même situation par rapport à la Franche-Comté, mais avec cette 
différence essentielle que, comme le pays dans lequel il doit agir 
sera tout d'abord occupé par l'armée ennemie, il lui sera impossible 
d'y rien entreprendre jusqu'à ce que l'ennemi soit chassé au moins 
d'une partie de la province. » 

C'est pourquoi Pichegru propose, sous réserve de l'approbation de Thugut 
et de l'archiduc, de former un corps de déserteurs sur les derrières de l'ar- 
mée autrichienne, corps à la tête duquel il se placera, pour agir suivant les 
volontés de l'archiduc, quand le moment en sera venu. 

« Par ce que j'ai su des trois hommes ci-dessus, ajoute Wickham, 
je suis persuadé que leurs principes et leurs vues sont parfaitement 
purs et qu'ils sont d'aussi fermes amis de la maison de Bourbon et 
de l'ancienne monarchie qu'aucun des premiers émigrés de France. 
Je puis ajouter... que Monsieur a la plus complète confiance en eux 
et qu'il désire particulièrement qu'ils préparent les voies pour son 
arrivée... » 

(Publié en anglais dans la Correspondance de Wickham.) 

25. — Augsbourg, 13 décembre 1799. Wickham à lord Grenville. 

(Résumé et extrait.) 

Wickham expose le projet ci-dessus. Il ajoute : 

«Les généraux Pichegru et Willot, M. de Précy et M. d'André 
m'ont pressé d'essayer de former un corps de déserteurs et conscrits 
français commandé par des officiers français. » 

Wickham avoue qu'il a été d'abord hostile au projet à cause de la dépense 
et des obstacles que les Autrichiens ne manqueraient pas d'élever. Mais il 
s'est décidé à l'accepter parce qu'il croit que l'archiduc sera consentant et 
que Pichegru prendra les mesures nécessaires pour empêcher les « bêtes 
galeuses » d'entrer dans ce corps. 

Pichegru formera derrière l'armée autrichienne un dépôt de troupes aux- 
quelles il donnera des officiers et des sous-officiers qu'il connaît, et quand 
ces troupes seront organisées, il les mettra à la disposition de l'archiduc, 
pour opérer une diversion en faveur de l'armée autrichienne. Si l'invasion 
réussissait, Monsieur pourrait venir se mettre à la tête de cette petite armée. 

{Record Office^ l'oreifjn Office^ Suisse, à la date.) 

Le même jour, Wickham envoie une lettre séparée à Grenville ; il fait le 
compte des dépenses (|u'il prévoit. I^n particulier il juge nécessaire d'accorder 
aux royalistes un subside de W.OOO livres sterling par mois, soit 2W.0(X) 
livres par an, de leur fournir davancr 100 000 livres et de consacrer ^o. 000 
livres aux dépenses préliminaires. Il évalue donc au total à 3G5.000 livres 

f 



24 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

sterling les sommes indispensables pour assurer le succès du mouvement 
royaliste sur les frontières de la Franche-Comté, des Alpes ou dans le Midi. 

{Correspondance de Wickham, II, 377.) 

Mais lord Minto répond de Vienne à Wickham, le 14 décembre 1799, que 
Thugut ne veut pas entendre parler de la formation d'un corps de déserteurs 
sur les derrières de l'armée autrichienne, quelque bien qu'il pense de Piche- 
gru, de Précy et de Willot. 

{Correspondance de Wickham, II, 382.) 

26. — AugsUourg, 25 décembre 1799. Wickham à Grenville. 

(Résumé et traduction . ) 

Le baron de Thugut refusant de consentir à la formation d'un corps de 
déserteurs sur les derrières de l'armée autrichienne, Wickham a modifié ses 
plans . 

« Depuis le moment, écrit-il, où j'ai reçu la dépêche de Votre 
Excellence du 30 juillet, je n'ai rien négligé pour rétablir mon 
ancienne correspondance avec Lyon, la Franche-Comté et les pro- 
vinces du Sud... Avec l'aide du général Pichegru, de M. de Précy et 
Dandré, et la complaisance de l'archiduc, j'ai si bien réussi qu'une 
correspondance régulière était établie avec Lyon, Marseille, Be- 
sançon et Paris, quand la malheureuse affaire de Zurich a détruit 
tous nos moyens de correspondance et nous a obligés de trouver 
de nouveaux moyens pour l'entretenir. J ai obtenu ce résultat depuis 
mon arrivée ici... 

c( Dans le sud de la France les personnes employées se sont princi- 
palement attachées à encourager la désertion dans l'armée d'Italie, à 
recevoir les déserteurs, à les former en compagnies dispersées dans 
tout le pays, prêtes à être réunies aussitôt que les circonstances 
rendront nécessaire ou une insurrection générale ou l'apparition 
d'une masse importante en armes avec un général à sa tête. Le 
général Willot, qui doit prendre la direction et le commandement 
du tout, quittera cette ville pour Turin au commencement de février 
et, après avoir pris toutes les mesures nécessaires pour entretenir 
une correspondance avec les généraux autrichiens en Piémont 
(auprès desquels il aura les plus fortes recommandations de l'ar- 
chiduc), il se propose d'être à Marseille vers le l^'' mars et prêt à se 
déclarer aux environs du 15 ou du 20 de ce mois... 

« Le général Willot sera accompagné par M. Dandré, qui a montré 
un zèle, une activité, une intelligence, peu communes ^... » 

1. Je crois inutile d'analyser toutes les lettres de Wickham relatives à la mission 
de Willot, car A.Lebonles a résumées, et E. Daudet adonné les raisons de l'échec 
du projet provençal. On trouvera ici celles du 17 et du 28 février les plus impor- 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 25 

Du côté de Lyon, des mesures de même sorte sont prises, bien qu'elles 
soient de moindre importance et de moindre effet. Comme le gouvernement 
surveille de très près Lyon, c'est dans les montagnes du Vivarais, du côté de 
Mende \ que tous les déserteurs et proscrits de la région lyonnaise seront 
rassemblés. lisseront soutenus par les bandes armées qui se forment dans le 
Forez et le Bourbonnais. Précy prendra le commandement du tout aussitôt 
que le rassemblement aura quelque consistance. 

Mais du côté de la Franche-Comté, impossible de faire un pas. L'impres- 
sion produite par l'affaire de Zurich et le 18 Brumaire a été si profonde que 
tous les agents se sont cachés, et beaucoup des habitants qui avaient promis 
leur concours à Pichegru. 

En outre, le pays est occupé par l'armée républicaine. Il faut provisoire- 
ment établir les corps de déserteurs dans la Savoie et dans les Vosges, quitte 
à les appeler en Franche-Comté après les premiers succès des Autrichiens. 
Le général Pichegru ne peut songer à l'action avant ces succès. 

Wickham espère, d'ailleurs, pouvoir lever un corps de troupes suisses 
capables d'apporter un appui efficace à la coalition et de pénétrer en France. 

« Les généraux Pichegru et Wiilot sont également désireux qu'un 
membre de la famille royale prenne le commandement des royalistes 
dans les provinces du Sud, et que Monsieur soit ce prince. 

« Au sujet de la proclamation qu'il serait utile aux alliés de faire 
à leur entrée en France, ces officiers sont d'avis qu'il n'est pas 
nécessaire (quoique certainement désirable) de parler du Roi et de 
la restauration de la monarchie, pourvu qu'ils soient autorisés à 
promettre à leurs partisans que lorsqu'une province ou une étendue 

tantes, que je résume ou donne en extraits. Celle du 26 mars annonce à Grenville 
que WilIot a été obligé de se rendre à Vienne, mandé par Thugut (de là retard 
dans ses opérations); celle du 27 mai le prévient des obstacles apportés par les 
Autrichiens à son entrée en campagne ; celle du 29 mai (même sujet) ; celle du 
14 août résume les causes de son échec et rend pleinement justice à son activité. 
— Cette lettre et les deux suivantes (17 et 18 février) prouvent assez la participation 
de l'Angleterre au complot Wiilot. 

1. Ce fut le comte de Noyant, un des visiteurs de l'Institut Philanthropique, qui 
s'occupa de la levée et de l'organisation de ces bandes dans le V^ivarais. Voir un 
passage d'une note de la police secrète adressée à Pelet de la Lozère dans Boulay 
de la Meurthe, Correspondance du duc d'Enghien, t. II, p. 28. et quelques-unes des 
lettres de Noyant au chanoine Mazel, à Mende, publiées dans les Papiers saisis à 
Bayreuth et à Mende, p 375, 379. La police trouva des poudres dans un jardin à 
Mende et saisit 26 fusils neufs. Cf. note de la page 377. Le comte de Noyant 
fut arrêté plus tard, mais ne révéla aucun des secrets de l'organisation royaliste. 
Le chanoine Mazel avait été arrêté le 2 août 1801 ; il resta détenu à Porto-Logone, 
lie d Elbe. Voir, sur Noyant, d'H.nilci ivc, p. 61 (Sources: F^ (5268); sur Mazel, i6(e{., 
p. 61 et 259 'Sources : F"' 62r)8 (iiliO. (iJf;8, 6318). 

D.iMsi.'i Provence, le vt ril.ihic t lu f du mouvement royaliste (qui n'éclata pas) 
(Il \;iil . tr(! le martjuis de Tiiiv) 1 1, doril la Revue de Paris du 1'' avril 1907 a puhlir 
le Liore de raison («'xliiMli : « On mil à ma disposilion. (•ciit-il. le nslc dfs londs 
accordés par M. \\ icldiam, lous les inoijcns de I hislilul l'IiiUmiliinjtunit' dmis l«'s 
proNiiiccs (loul l:i diicclioii m'était contîée... n p .')'_' 1 . n Apiis .immi- rt'cu d«-s 
jiriiicijiiiiix chefs de l'Institut, </(»/• je trouvai réunis ii l.ijon. lis iiisi i mlioiis sur l«'!al 
présent des affaires... etc. », p. 525. Voir d'Huulerive : Puiveil phisirurs fois eil«', 
consulter la table (Sources : F'' 6*256, 6258 à 6260). 



26 • LA CONSPIRATION ANGLAISE 

considérable de territoire sera mise aux mains de l'armée royaliste 
et qu'un prince du sang sera à leur tête, les allies traiteront avec ce 
prince... et reconnaîtront le roi légitime... » 

(Traduit de la Correspondance de Wickham, II, p. 402 à 406.) 

27. — Londres, 11 février 1800. Lord Grenville à Wickham, 

(Résumé.) 

Grenville eût approuvé la formation d'un corps de déserteurs sur les der- 
rières de l'armée autrichienne; il est regrettable que la cour de Vienne en ait 
rejeté le plan. 

Pour appuyer les opérations de Willot, l'amirauté va donner au comman- 
dant de la flotte anglaise dans la Méditerranée l'ordre de faire concorder ses 
opérations avec celles des royalistes du Midi et de leur porter secours au 
besoin. Un corps de 15 à 20.000 hommes, commandé par le général Stuart, 
concertera ses mouvements avec ceux des Autrichiens et des royalistes. 

Monsieur a fait connaître à Grenville son désir d'aller rejoindre Wickham 
aussitôt que possible. 

Grenville doute qu'on puisse employer le corps de Condé aux opérations 
du Midi K 

Les provinces de l'Ouest se sont insurgées trop tôt. 

[Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

28. — Augsbourg, 17 février 1800. Wickham à Grenville. 

(Résumé.) 

Conformément aux instructions de Grenville du 24 décembre, Wickham a 
tiré sur le Trésor anglais treize traites, s'élevant à cinquante mille livres ster- 
ling, en faveur de M. Baboin, et une série de traites s'élevant à cinq cent 
mille marcs banco, c'est-à-dire aune somme à peu près égale, sur MM. Thorn- 
ton et Power. 

Il a, en outre, autorisé ces messieurs à accepter des traites tirées par les 
agents de Liouis XVIII jusqu'à concurrence de /re/i/e-cmg mille livres sterling . 

Il joint à sa lettre les reçus ci-dessous. 

[Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

29. — Les reçus. 

17 février 1800, reçu de R. Baboin 2, autographe. 

(( Je reconnais avoir reçu aujourd'hui de M. Wickham... des 

1. Cependant, le 19 avril, Grenville annonce à Wickham que le corps de Condé 
sera débarqué en Provence pour appuyer l'insurrection provençale. Il était même 
question d'envoyer le duc de Berry en Provence, avec ou sans troupes napoli- 
taines. 

2. Baboin, banquier ordinaire de Wickham pour les envois d'argent en France, 
et surtout à Lyon ; c'est lui qui faisait passer à Dandré, en 1797, ses 4.000 louis 
mensuels. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 27 

lettres de change sur lord Grenville et MM. Thornton et Power de 
Hambourg pour la valeur de cent mille livres sterling dont je dois 
tenir le produit à la disposition des agents de Sa Majesté Louis XVIII 
et des généraux Précy et Willot. » 

Augsbourg, 22 février 1800, reçu de Dandré, qui signe A. Mayor (auto • 
graphe) . 

« J'ai reçu... un crédit de trente-cinq mille livres sterling sur 
MM Thornton et Power d'Hambourg pour être employées à l'expédi- 
tion du général Willot et accessoires ». 

Au bas du billet (de la main de Willot) : 

« Approuvé le reçu ci-dessus dont les fonds ont été mis à ma 
disposition K » 

{Record Office, Foreign Office^ Suisse, joint à la lettre de Wickham.) 

30. — [Augsbourg], 28 février 1800. Wickham à Grenville. 

(Résumé et traduction.) 

Malgré la pacification de l'Ouest^ Wickham ne renonce pas à l'entreprise 
projetée du général Willot en Provence, entreprise qui offre les plus grandes 
chances de succès Willot a reçu Tordre de partir. Il a des recommandations 
pour les généraux Mêlas et Zag -, M. Jackson, lord Keith, M. Paget ^. Jack- 
son est autorisé à lui remettre en cas de besoin vingt mille livres sterling 
pour gagner les Barbets Wickham lui a donné de l'argent et un crédit sur 
plusieurs places de la Méditerranée jusqu'à concurrence de quatre-vingt 
mille livres sterling. 

L'ambassadeur aurait désiré appuyer l'entreprise de Willot par une insur- 
rection des régions lyonnaise et franc-comtoise : 

« Après plusieurs consultations à ce sujet avec les généraux Piche- 
grUf Willot., Précg et des envoyés (deputies) de Marseille, Bordeaux *, 
Lyon el Besançon, il a été décidé d'abandonner tout projet d'ac- 
tion dans la Franche-Comté..., mais de faire quelques préparatifs en 
vue d'un soulèvement du Lyonnais .. Si les royalistes de l'Ouest 
eussent été capables de se maintenir, il était projeté de relier leurs 

1. Au total, 135.000 livres sterling pour les royalistes du Midi, soit 3.375.000 
francs. — Puivert savait qu'on avait disposé de 20.000 louis pour les dépenses 
préparatoires, et il dépensa 250.000 francs pour .son organisation du Midi. Revue 
de Pans 524, 527. 

2. Mêlas, commandant rarnicc autrichienne, qui assiégea Masséna dans Zurich ; 
Zag, son chef détat major. 

3. Jackson, agent anglais en Italie ; lord Keith, commandant de la flotte an- 
glaise ; Paget. outre agent anglais, très au courant des intrigues royalistes, en par- 
ticulier du complot de l'an XII. [C(. les l'aget's papers.) 

4. Les Barbets, insurgés dans le comté de Nice contre le gouvernement répu- 
blicain. Voir les lettres des frères Marut, Papiers de Bayreuth, l. c. 



28 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

opérations à celles de Willot par une puissante insurrection séien- 
dant de Bordeaux à Toulouse, doni tous les éléments étaient préparés, 
et le général Picliegru s'était engagé à prendre le commandement du 
tout. Il se préparait à partir quand est arrivée la nouvelle de la 
pacification de la Vendée ^ . 

« Même à présent, il n'abandonnera pas le projet, jusqu'à ce qu il 
reçoive des informations que tous les espoirs du parti royaliste 
dans l'Ouest sont détruits et que S. M. ne peut tenter une descente 
dans une de ces provinces. 

« Si les renseignements ne sont pas défavorables, il se rendra à 
Bordeaux... et s'efforcera aussitôt d'établir une communication avec 
le commandement des vaisseaux de Sa Majesté dans cette région, 
par le moyen de signaux dont j'envoie ci-joint une copie. Le général 
Willot se servira des mêmes signaux. On peut trouver à lAlien 
Office un spécimen de l'écriture de Pichegru. » 

Ce générî^l pense qu'une insurrection du côté de Bordeaux, appuyée par 
une descente anglaise puissante, a chance d'aboutir. Si les renseignements 
ne sont pas défavorables, son intention est de joindre immédiatement le géné- 
ral Willot. 

{Record Office (Suisse), à la date-.) 

1. Voirie Résumé historique de Dupont-Constant, p. 31 à 33, et l'Essai, p. 01-92, 
ci-dessous cités. — Puivert se rendit aussi à Augsbourg, Revue de Paris, p. 524. 
Les passages cités de son Livre de raison témoignent bien que dans la Provence 
comme dans la Guj'enne la force principale du parti royaliste résidait dans l'orga- 
nisation philanthropique. Le complot de 1800 dans le midi de la France est essen- 
tiellement un complot des Instituts. Page 525, Revue de Paris citée : « Après avoir 
reçu des principaux chefs de l'Institut, que je trouvai réunis à Lyon., les instructions 
sur l'état présent des affaires... je me trouvai à la tête de 25.000 hommes, la 
plupart conscrits réfractaires .. )) Cf. d'Hauterive, La police secrète du premier 
Empire, déclarations de Rougier, p. 37, quelques vagues aveux de Puivert, p. 112, 
avis sur ses envois de poudre, p. 186, etc. 

2. Je ne crois pas nécessaire de citer les autres lettres de Wickham relatives à 
l'expédition Willot, par exemple celles du 26 mars 1800 et du 27 mai relatives au 
mauvais vouloir des Autrichiens et aux obstacles que Thugut et le baron de Mêlas 
apportent au succès de l'entreprise. Lebon, dans l'Angleterre et l'Emigration, et 
surtout E. Daudet, dans VHistoire de l'Emigration, t. III, racontent longuement 
l'histoire de cette intrigue. 

Il serait plus intéressant de citer la lettre du 14 août, où Wickham affirme, 
d'après une lettre de Jackson, agent de l'Angleterre en Italie, que l'entreprise de 
Willot aurait abouti si elle avait été encouragée et soutenue par les Autrichiens, et 
que les Autrichiens, prévenus, dès le 12 avril, par « deux personnes chargées par 
le général Willot ou par M. Dandré de leur procurer toutes les informations possi- 
bles sur Vétat de l'armée de Dijon », ne voulurent tenir aucun compte de leurs avis. 

La brusque arrivée de cette armée de Dijon (l'armée de réserve) sur les champs 
de bataille de l'Italie mit fin à l'intrigue de Willot. Il dut s'enfuir, après l'abandon 
de Turin par Mêlas, à Alexandrie, puis à Gênes ; après Marengo, il se réfugia à 
Livourne, puis en Angleterre. De là, plus tard, il gagna les Etats-Unis. La cause 
de son départ nous est indiquée dans une note que Danican fit passer à Fauche- 
Borel à Londres en juillet 1808. Danican, qui devait suivre Willot en Italie en 1800, 
comme chef d'état-major (Cf. son dossier aux Arch. adm. guerre), raconte que 
Willot fut convaincu devant les tribunaux anglais, avec d'autres émigrés, 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 29 

[Pichegru ne devait pas rejoindre Willot en Italie (pour de là passer en 
Guyenne). Le comte d'Artois et l'Angleterre l'appelèrent à Londres pour le 
consulter au sujet du complot Cadoudal et pour lui donner un rôle dans 
l'Ouest. L'intrigue de Londres le disputait à l'intrigue d'Augsbourg.] 



D. — LA CONSPIRATION ANGLAISE A PARIS ET DANS l'oUEST 

EN 1799-1800, et les relations de l'Institut bordelais avec la 
Vendée et Londres. 

Tandis que Wickham, Willot et Pichegru rattachaient le mouvement 
bordelais à l'insurrection générale de l'Est et du Midi, appuyée par l'armée 
autrichienne, l'Institut bordelais entrait en relations avec les Vendéens ré- 
voltés et avec le comte d'Artois qui subordonnait 1 insurrection girondine 
au succès de ses projets à Paris et dans l'Ouest. 

La Vendée, en effet, s'était soulevée pour la seconde fois en octobre, avec 
l'Anjou, le Maine, la Bretagne et la Normandie. Dupont, visiteur de l'Insti- 
tut bordelais, s'efforça aussitôt d'entrer en relations avec ces provinces et 
organisa dans les Deux-Charentes une chouannerie pour communiquer avec 
elles. Il importe de citer ce passage de son Mémoire historique (p. 24 et 25) : 

« J'organisai en même temps une chouannerie dans les Deux- 
Charentes, entre les deux grandes routes de Paris et de Bretagne. 
Mon intention était, dès que nous recevrions Tordre de prendre les 
armes, de faire marcher de concert les royalistes de tous les dépar- 
tements de mon arrondissement sur Blaye et la Rochelle... » [Cf. 
Essaie p. 81 : a J'établis dans les Deux-Charentes, entre les deux 
grandes roules de Paris et de la Bretagne, un corps d'éclaireurs, 
sous le commandement du sieur Brunet, émigré rentré... »] 

«... D'après les ordres que je reçus à celte époque de l'agence de 
Souabe, je fis partir un commissaire, M. Destravaux *, pour les 
provinces de l'Ouest, dirigées par S. A. R Monsieur, frère du roi, 
avec une circulaire adressée à tous les commandants pour le roi et 
avec des instruclions. L'objet de sa mission était de parcourir la 
Vendée, la Bielagne et la Normandie, d'y voir tous les chefs, de 
concerter avec eux les moyens de correspondance, de leur donner 
mon adresse et de prendre la leur. Mon commissaire me lit à son 

f< (I .ivoit pnic à une usure énorme les sommes qu'ils tenaient du gouvernement 
aiif^luis. L<- gciK rai Willot, condamné à 25 000 livres sterling d'amende, fut obligé de 
se réfugier àN(!vv-York.(]e misérnbleavait reçu du gouvernement anglais, en 1800, 
un million toiirnriis à l'rfrct de soulever les provinces du midi de la France. » 
l'.-.|n.rs I',. <!.• Siiinl Ail. in 

1. D'iipKs une note du Hureau central de Bordeaux du 7 fruclidor. le mouve- 
ment insurrectionnel de Bordeaux du 20 thermidor doit se raltachci :i !;i piésence 
dans cvUr vilN- d'un PliililM ri Destrnvaux, ancien chef do chouans, niilré à la 
fnv<'in lir 1 iiiiiii tir .1 I. I, (M II hitions avec la Vendée et l'Angleterre, soudoyé 
par <f tir (in tiiri r .. |H.iii s, I unir aux conspirateurs qui se rassemblent à l'elFet 
de favoriser un inou \ r inml royaliste ». 



30 L \ CONSPIRATION ANGLAISE 

retour un rapport très satisfaisant. Mes propositions avaient plu à 
tous ces anciens et intrépides défenseurs du trône et de l'autel -, ils 
m'envoyèrent tous leur adresse, et jusqu'à l'époque de mon arresta- 
tion notre utile correspondance a été toujours très active. » [Cf. 
Essaie p. 81.] 

La lettre de Georges Cadoudal du 19 juin 1800, que nous publions plus 
loin, confirme les relations de l'Ouest avec le Midi. 

L'Institut bordelais correspondait aussi avec le comte d'Artois et avec le 
duc de Lorges, qui recevait lui-même ses instructions de Monsieur. Nous 
citons plus loin la lettre de Papin au duc de Lorges, 9 mai 1800. Il importe 
aussi de connaître les passages suivants du Mémoire historique de Dupont- 
Constant : 

<{ Peu de jours avant ou après le 18 Brumaire, je profitai d'une 
occasion pour rendre à S. A. R. Monsieur, comte d'Artois, un 
compte exact et sommaire de tout ce que j'avais fait jusqu'alors pour 
le service du roi. Je mis sous ses yeux 1 état de nos forces, de nos 
ressources, de nos besoins, et en lui faisant connaître les bonnes 
dispositions des royalistes, je lui demandai des instructions et des 
ordres. » 

{Mémoire historique, p. 31.) 

Après son voyage à Augsbourg (il est de retour à Bordeaux le 9 mars 1800) : 

« Je reçus à cette époque une lettre de S. A. R. Monsieur, frère du 
Roi, par l'occasion d'un sieur Burkcl, suisse, établi à Bordeaux. 
J'en fis part à tous les agents en chef de l'Institut, dans la seule vue 
d'exciter leur confiance et leur zèle. Elle portait en substance que le 
prince était très satisfait de tout ce que nous avions fait ; qu'il nous 
engageait à continuer, et qu'il allait incessamment nous envoyer des 
commissaires chargés de nous faire connaître ses intentions. Elle 
nous assurait aussi que S. A. R. allait donner des ordres pour que 
l'on nous fît des remises à mesure des besoins. » 

{Mémoire historique^ p. 34. Cf. Essai, p. 91.) 

« Une nouvelle occasion pour l'Angleterre se présenta, et j*en 
profitai pour annoncer à S. A. R, Monsieur que nous étions prêts 
et que nous n'attendions que les ordres pour prendre les armes. Je 
lui donnai un aperçu de nos forces disponibles. Je crus devoir 
instruire S .A. R. que les commissaires qu'elle m'avait annoncés 
par sa dernière lettre n'étaient pas encore venus. » 

(Mémoire historique, p. 35.) 

Bordeaux, transition entre le Midi et l'Ouest, recevait des ordres d'Augs- 
boûrg et de Londres. L'intrigue girondine rattachait le complot de Provence 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 31 

au complot parisien ou chouan. Dupont-Constant et Papin donnaient la main 
à Willot d'une part, à Hyde et à Cadoudal de l'autre. 

En effet, une conspiration s'ébauchait à Paris et à Londres contre Bona- 
parte au lendemain de Brumaire, la Conspiration anglaise dont la police a 
publié les pièces (lettres de Hyde de Neuville à l'agent des princes à 
Londres, lettres de Dutheil à Hyde, etc.), après la découverte de cette conspi- 
ration, le 12 floréal an VHI 2 mai 1800. 

Au moment où l'Ouest déposait les armes, Hyde et l'agence de Londres 
voulaient le soulever à nouveau : Monsieur devait débarquer à Brest, livré 
par Dubouchage ; Pichegru le rejoignait avec les troupes de l'Ouest ; à Paris, 
un coup de main réduisait Bonaparte à l'impuissance ^ Comme la combinai- 
son Willot, celle de Hyde utilisait Pichegru -. Ce n'était point la seule ana- 
logie. Hyde comptait sur une insurrection du Midi, de Bordeaux en particu- 
lier, pour appuyer celle de l'Ouest. « Le Midi était prêt, écrit-il dans ses 
mémoires, à se lever de nouveau, à se placer sous les ordres du général 
Willot, qui y avait laissé les plus honorables souvenirs... Bordeaux s'était 
tout à fait enrégimenté par les soins du général Pépin (sic) et pouvait se ral- 
lier à la Vendée par de nombreuses intelligences ^. » Dans sa correspondance, 
Hyde signalait le passage à Paris, le 4 février, d'envoyés du Midi : « Les 
commissaires pour le Midi sont arrivés. Ils ont vu Isaac Larue) et Paul 
(Hyde). Leurs moyens paraissent être très grands. Si leur levée d'hommes 
réussit, Willot se mettant à leur tête, ce sera un bien grand moj^en de diver- 
sion *. » Déjà, le 11 janvier, Hyde entrait en relations avec Wickham pour 
établir une concordance entre les complots de l'Ouest ou du Nord et ceux du 
Midi 5. 

Son complot découvert, Hyde passa la main à Georges Cadoudal, le chef 
de la chouannerie bretonne, qui attendait oisif à Londres l'occasion d'agir 
de nouveau. Les plans de Georges furent adoptés dans un conseil secret qui 
se tint à Londres chez le premier ministre, conseil auquel Pitt. Dundas, 
Grenville, assistèrent avec le comte d'Artois (16 mai 1800) *. on devait 
s'emparer de Calais, de Lorient, de Nantes, avec l'aide des forces anglaises 
et, tandis que les royalistes s'insurgeraient dans la Bretagne et qu'un prince 
y débarquerait, le « coup essentiel »> serait frappé à Paris contre Bonaparte. 
Trois jours après, Georges partait pour soulever la Bretagne, annonçant sa 
venue, dès le 15, à Bourmont, comme son arrivée, le 3 juin, à Grenville ^. 



1. Voir dans la Conspiration anglaise surtout les lettres de Hyde des 13 et 
15 janvier, du 4 février. 

2. Surtout comme commandant du corps russe de Jersey, débarqué en Bretagne, 
et des levées bretonnes ou vendéennes. Cf. Conspiration anglatsCf p. 61, lettre du 
11 janvier à Pichegru; p. 62-63, lettre i\ Larue, et p. 58, 79,87, 97, lettres à 
Dutheil ou au comte d'Artois ; Mémoires de Hyde^ p. 290, et lettre de Bourmont du 
17 janvier, p. 531, 

3. Mémoires de Hyde de Neuville, p. 238. 

4. Conspiration anglaise, p. 107. 

5. Lettre du 11 janvier, Conspiration anglaise, p. 60. 

6. Le comte de Martel a publié une partie des lettres de Georges conservées au 
Foreign Office ( France i dans les Pacifications de l'Ouest. Nous en avons publié 
d'autres dans la Revue historique de novembre-décembre 1900. M. Vandal 
utilise ces lettres duns l Avènement de Bonaparte , t. Il, 354-356, 395. 



32 LA CONSPIRATION ANGLAISE 

Mais il entendait bien que l'Ouest girondin prendrait les armes avec l'Ouest 
breton. Sa lettre du 19 juin que nous publions en témoigne. 

Il paraît donc hors de doute que l'Institut bordelais fut en relations avec le 
comte d'Artois, comme avec les chefs vendéens, et qu'il était destiné à jouer 
un rôle dans le plan de Hyde comme dans celui de Cadoudal. 

Reste à prouver, par la publication des pièces ci-des«ous, que les insurrec- 
tions ou complots royalistes de 1799-1800 dans l'Ouest ou à Paris se ratta- 
chent à l'intrigue anglaise comme les complots de l'Est et du Midi, et que 
le comte d'Artois ne les autorisait et ne les encourageait qu'avec l'assen- 
timent du ministère anglais et ses promesses de subsides 

Ces pièces témoignent aussi que le comte d'Artois voulait, en appelant 
Pichegru à Londres avec Dandré, enlever à Wickham la direction du mou- 
vement royaliste, du Sud-Ouest, et même accaparer tous les ressorts de 
Tintrigiie des Instituts. 

Est ce à dire qu'il voulait affranchir le parti royaliste dans le Midi de lin- 
fluence anglaise, le soustraire à ses compromissions avec nos ennemis ? 
Nullement, car il sollicitait les secours de l'Angleterre II n'agissait ainsi 
que par hostilité contre Wickham, auquel il reprochait d'avoir empêché 
son voyage en Suisse avant Zurich, et surtout ses procédés à l'égard de son 
frère, le Prétendant ^ 

31. — 6 septembre 1799, Stratford House 2. Le comte cT Artois 
à Grenville. 

(Analyse ) 

A la suite des conférences qu'il a eues avec Grenville à Stowe, Monsieur 
a recommandé aux chefs royalistes de ne pas se soulever encore. 

Il pense d'ailleurs que le soulèvement n'aura de succès que si le gouver- 
nement anglais consent à solder 70.000 Vendéens ou Bretons, à les armer 
et les équiper, et s'il les fait appuyer par un corps de débarquement anglais 
ou russe d'au moins 20 000 hommes. 

/ [Record Office^ Foreign Office, France, à la date.) 

32. — 11 et 14, 15 septembre. Dutheil à Frère. 

(Analyse et extrait.) 
Le 11 septembre, Dutheil annonce à Frère que le comte d'Artois a l'inten- 

1. Extrait d'une lettre du roi de France à Monsieur, de Millau, le 17 mai 1800, 
Chantilly, Z, t. II, p 30 : « Je ne sais pas ce que j'ai fait à Wickham pour 
qu'il ait commencé en 1797 par me faire une grossièreté, en se dispensant de 
répondre à une lettre très honnête que je lui avais écrite. Je sais depuis qu'il a 
constamment cherché à me nuire.. Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une voix contre 
lui sur la manière dont il conduit les affaires. Ceci entre nous; mais Condé, 
Pichegru, Willot et le baron de Salis ne peuvent s'en taire, et j'ai lieu de penser 
que Roll ne vous en aura pas fait un rapport plus favorable. » 

2. Cf. ci-dessus les n''* 18, 21 et 23. Le comte d'Artois met à profit son séjour à 
Londres pour solliciter en faveur des Vendéens et des chouans les secours du 
gouvernement anglais. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 33 

tiou de se rendre demain à Londres pour parler soit au ministre Grenville, 
soit à Frère. 

D'une lettre du Comte d'Artois qu'il joint à la sienne, Dutheil infère que le 
ministre a bien accueilli les demandes de Monsieur en faveur des Vendéens 
et des Bretons. 

Le 14 septembre, il sollicite le versement d'une somme de 5.000 livres 
sterling aux royalistes de l'Ouest II viendra voir Frère pour toucher ces 5.000 
livres restant à payer sur les 12.000 livres promises. Il a fallu déjà avancer 
1.200 livres sur ces 5 000. 

Suit, en effet, un état de répartition des 12.000 livres accordées par le minis- 
tère britannique, répartition faite par Monsieur : 2.000 à la Vendée et à l'ar- 
mée située sur la rive gauche de la Loire depuis Saumur ; 1.800 à l'Anjou; 
1.500 au Maine ; 1.600 au Morbihan ; 1.200 à l'Ille-et-Vilaine ; 1.500 aux 
Côtes-du-Nord et au Finistère ; 1 200 à la haute Normandie ; 1.200 à la 
basse Normandie. 

Au dos de cet état de répartition, Dutheil a écrit : 

« Reçu du département des Affaires étrangères, le 29 août 1799, 
7.000 livres sterling pour être distribuées entre les différentes divi- 
sions de l'armée de l'Ouest de France. 

« Employé 8.200 livres. 

({ Avance faite. » 

Sur cet état de répartition, il est fait mention des reçus de La Prévalaye, 
de La Boessière, de Mercier, de Bourmont, de Frotté, de Mallet, reçus datés 
aussi du 29 août. 

Le 15 septembre, Dutheil envoie un état « de tout ce qui est nécessaire en 
armes, vêtements, solde, vivres par fantassin * ». 

[Record Office, Foreign Office, France, aux dates.) 

X]. — 28 octobre 1799, Portsmoiith. Le comte de CrénoUes à 
Monsieur. [La lettre est en copie aux archives du Record 
Oflicc] 

(Analyse.) 

Le comte de CrénoUes annonce qu'il arrive de France avec Hyde de Neu- 
ville - qui est. dit-il, « le chef de l'entreprise dont nous aurons l'honneur 
de vous soumettre le plan ". 

Ils sont partis de Paris le 14 octobre, et sont arrivés aux îles Saint-Marcou 

1. Sur la pacification de la Vendée, voir Martel, p. 24, les négociations de 
Pouoncé ; p. 57, la paix de Montraucon. 18 janvier 1800 ; p. 65 et 125, La Préva- 
laye adhère à celle paix le 24 janvier et Hourniont le 4 février. Hourmoiit espérait 
une diversion qui lui permettrait d<' ne pas rendre les armes : il écrivoit, le 
17 janvier, à Hyde de Neuville, que les royahstes de la Vendée seraient heureux 
d'avoir pour chef Pichegru {Mémoires de Ilijde, p. 531), Il était au courant des 
projets de Hyde et croyait peut-être que les Anglais débarqueraient Pichegru avec 
une petite armée (par exemple celle des Husses de Jersey) sur les cAtes de l'Ouest. 

2. Sur l'intrigue de Hyde de Neuville, voir ses Mémoires et lu publication signée 
d'£.mery, Cbaptul, Urune et Chumpugnv, la Conspiration anglaise. 



34 CONSPIRATION ANGLAISE 

le 22 seulement, car ils étaient poursuivis. Ils ont dû jeter à la mer leurs 
dépêches. 

Ils se rendront demain, 29 octobre, chez le duc de Portland. Crenolles 
ajoute : 

« L'importance de la mission dont je suis chargé me prescrit de 
ne dire quà S. A. R. le nom de la personne qui m'envoie et de ne 
pas le confier au papier. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

[Il est possible que cette copie ait été jointe à la lettre suivante de Dutheil.] 

34. — 23 novembre 1799. Dutheil à Frère. 

(Analyse et extrait.) 

Dutheil insiste pour qu'on accepte le plan des deux députés que Frère a 
vus et que Grenville et Pitt n'ont encore vus ni l'un ni l'autre. 

Ce plan offre de grandes chances de succès, proposé « par un homme aussi 
considérable et voyant aussi bien que celui par qui ont été envoyées lés 
deux personnes ». 

« Si beaucoup de chances de succès existaient avant la révolu- 
tion du 20 novembre en faveur du plan proposé, on ne peut pas dire 
que ces chances soient diminuées depuis que les généraux Andréossi, 
Beurnonville et Lefèvre ^ qui ont des engagements plus ou moins 
positifs avec le roi et qui devaient concourir à Texécution du plan, 
ont été mis à la tête des troupes, et que Berthier et quelques autres, 
dont les dispositions sont connues de Monsieur, ont été placés au 
Ministère ou dans des administration's. » 

Pourtant le ministère britannique s'est déterminé « à suspendre l'exécution 
du projet envoyé de Paris à Monsieur ». Dutheil demande qu'il revienne sur 
cette décision. 

(Record Office, Foreign Office, France, à la date ) 

Le ministère anglais refusa longtemps, semble-t-il, de subventionner une 
entreprise, fort semblable, en somme, à celle de Talbot, puisqu'elle devait 
avoir pour résultat l'enlèvement et sans doute la mort du premier consul. Il 
s'y décida cependant en février 1800. Voir, en effet, la lettre de Hyde à 
Dutheil dans la Conspiration anglaise, p. 107 et 108. 

35. — 8 avril 1800. Billet de Dutheil [à Frère]. 

(Analyse.) 
Une personne qui a communiqué à Malmesbury, en 1797, à Lille, des ren- 

1. Cf. Conspiration anglaise, p. 63, 79, 111. Deux de ces lettres sont chiffrées et 
difficiles à traduire. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 35 

seignements sur les intentions du Directoire au sujet des conquêtes de l'An- 
gleterre dans les possessions hollandaises et qui en a reçu 5.000 livres ster- 
ling, offre ses services à Dutheil. 

[Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

Cf. la lettre suivante. Depuis le mois d'août Dupérou sollicitait les agents 
des princes à Londres d'offrir ses services au ministère anglais. 

36. — 5 mai 1800. Lettre de Dupérou [à Grenville ou à Frère]. 

(Analyse et extrait.) 

Dupérou offre encore de procurer au ministère anglais des rensei- 
gnements des « mêmes personnes qui, dans le temps des négociations 
de Malmesbur3\ à Lille, avaient touché cinq mille livres sterling 
pour faire connaître si le Directoire regarderait la restitution du cap 
de Bonne-Espérance et du port de Trinquemale comme la condition 
sine qua non de la paix ». 

L'abbé Ratel et Hyde de Neuville n'ont point encouragé ces ouver- 
tures faute d argent. 

Suivent des renseignements surtout diplomatiques. Dupérou ajoute : 

« Bonaparte vient d'organiser une police secrète dont les membres 
sont môme inconnus à ses familiers. A cet égard, je peux annoncer 
que les personnes dont je suis l'organe peuvent en partie dicter les 
rapports des individus attachés à cette police et s'engageraient égale- 
ment à transmettre au gouvernement anglais le précis de leurs 
opérations. » 

[Cf. la Correspondance dé Dupérou, chargé de la police secrète de Hyde, 
dans la Conspiraiion anglaise, p. 20G et suiv. 

Le même individu qui signe Dupérou écrit à Flint à l'Alien Office, le 
7 mai, et signe Martin.] 

[Record Office, Foreign Office y France, à la date.) 



37. — Bordeaux, le 9 mai 1<S()(). « Le (jènêral comninndnnt la 
division de la Gironde » au duc de Loryes. 

(Analyse et extraits.) 

I^e général fonde les plus grandes espérances « sur la glorieuse 
nitic prise dont les Bordelais attendent impatiemment rexéculion ». 
11 apprend avec joie (|u'un prince viendra se mettre ii la tète des 
forces de la Gironde et que le duc de Lorges est nommé gouverneur 
de la Guyenne. 



36 CONSPIRATION ANGLAISE 

Le corps formé par Servant s'accroît de jour en jour : « Nous 
avons reçu des armes et des munitions... J'attends les fonds que 
vous m'annoncez, ainsi que les deux envoyés. » 

Signé: Servant [nom philanthropique de PapinJ \ 
[Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 



38. — Londres, 8 mai 1800. Monsieur à Ch. de Tinseaii 2, a lieu- 
tenant de Tétat-major du corps d'armée suisse à la solde de 
S. M. britannique ». 

Monsieur a chargé le baron de Roll, qui lui a remis la lettre de Tinseau, 
de le prévenir qu'il ne tarderait pas à faire appel à son dévouement 

« Le moment n'a pas tardé à arriver, puisque je vous donne 
l'ordre de vous rendre le plus promptement possible près de moi. 
« J'adresse un ordre pareil au général Piche^ru 3, et je vous 



1. La parenthèse n'est pas dans le texte; mais nous savons par Dupont et 
Rollac quePapin portait le nom philanthropique de Servant. — Les fonds annoncés, 
Cf Essai, p. 92 : C( L'agence royale me promit des fonds pour les premiers achats 
à faire... les plus considérables me seraient portés par le général Pichegru .. C'est 
la première fois que l'agence me donna de l'argent. » 

Le prince attendu. D'un interrogatoire du chimiste Gazalet, qui avait vu Willot 
en Angleterre en 1803 et qui le connaissait intimement, nous extrayons le passage 
suivant : « Sur ce qu on avait dit au comte d'Artois qu'il y avait à Bordeaux 
douze à quinze mille hommes prêts à agir pour lui, le duc de Berry avait résolu de 
prendre un passe-port pour venir à Bordeaux, en qualité de commis négociant. 
Willot, qui me dit le fait, ajouta: « Ce jeune fou veut exposer sa vie. » Archives 
départementales, série M, liasse intitulée : Police générale, affaires politiques, an IX, 
1804-1808. 

Les envoyés : Forestier et Céris sans doute. Ils ne sont venus à Bordeaux que plus 
tard, avant le complot des Plombs de 1804. Papin les a logés chez Acquart-Vreilhac. 

2 Voir surTinseau d'Amondans, qui en 1795-1796 avait été l'un des chefs de l'insur- 
rection franc-comtoise, la Trahison de Pichegru. p. 71, 129, 131, 163, 191, 197, 221. 
Cf Mémoires de Fauche Borel, t. Il, p 324 : « Pichegru avait été envoyé en Suisse 
avec le colonel Tinseau, lorsqu'on nourrissait encore l'espoir que la négociation avec 
Barras aurait un plein succès. » 

3. Voir sur la vie de Pichegru à Leitershofl, près d'Augsbourg en Souabe, le 
récit des Mémoires de Fauche- Borel, t. II, p. 337 à 345. Fauche passa une partie 
de l'hiver de 1799-1800 auprès de Pichegru (récit du bal masqué) ; il ne partit 
pour Londres qu'au printemps. Lire une très importante conversation de Pichegru 
avec Fauche, où il résume le plan royaliste et anglais de 1799, plan qui est, à peu 
de différences près, celui de 1800, p. 337 à 339. 

Sur le rappel de Pichegru à Londres, cf. Lebon, p. 286. — Se préparait-il à « aller 
d'Augsbourg en Italie », comme le croit M. Daudet, Histoire de VÉmigration, t. III, 
p. 192? Dans ce cas, il devait se rendre d Italie à Bordeaux. — Dupont-Constant 
prétend qu'il passait par l'Angleterre afin d'arriver plus sûrement à Bordeaux : 
(( J'attendais le général Pichegru dont le départ d'Augsbourg m'était annoncé et 
qui était passé en Angleterre pour de là se rendre à Bordeaux », Essai, p. 100. Il 
est probable que le comte dArtois l'appelait en Angleterre pour lui donner un rôle 
dans le grand plan élaboré avec Cadoudal. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 37 

engage à vous arranger avec lui pour que vous puissiez faire le 
voyage ensemble. 

« M. Wickham, qui reçoit par le même courrier les instructions de 
lord Grenville, est prié par moi de subvenir aux frais de votre route 
ainsi qu'à celle du général Pichegru. Lord Grenville m'a promis que 
vous conserveriez le traitement dont vous jouissez aujourd'hui. Je 
n'entrerai point dans plus de détails, me réservant de causer avec 
vous sur la manière dont je compte employer votre zèle et vos 
talents... 

« Je vous recommande d'éviter que l'on connaisse le motif de 
votre voyage. Je fais la même recommandation au général Piche- 
gru. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

39. — Londres, 10 mai 1800. Lord Grenville à Wickham, 

(Analyse et traduction.) 

«Comme les circonstances peuvent donner occasion de tenter une 
entreprise sur les provinces du nord et de l'ouest de la France, 
Monsieur a exprimé le désir que le général Pichegru soit consulté 
au sujet de cette expédition, à laquelle Sa Royale Altesse peut 
prendre part, et qu'il soit employé à son exécution. » 

Le ministre prie donc Wickham de faire passer Pichegru en Angleterre le 
plus tôt possible, l'opération en question devant avoir lieu vers la fin du 
mois prochain, à moins d'imprévu. 

{Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

40. — Londres, 27 mai 1800. Lord Grenville à Wickham. 

(Analyse.) 

Monsieur veut donner des instructions à Dandré ' et désire qu'il passe en 
Angleterre. A lui et à Wickham d'aviser si la chose est possible. Le comte 
d'Escars, qui porte cette lettre, est chargé de fournir à Dandré toutes les 
explications qui lui permettront de se décider en connaissance de cause. 

(Ibidem.) 



1 , En réalité, le comte d'Artois voulait attirer Dandré à Londres pour l'y garder. 
Dandrc, en effet, était nu courant de toutes les relations de l'agence de Sounbe avec 
les Instituts du Midi, qu'il avait contribué à fonder. (Vest pour cela que Wickham 
tenait à conserver auprès de lui cet important dépositaire des secrets royalistes 
(voir la pièce 47 de ce recueil). Dandré refusa de quitter Au^sbourg, c'est-à-dire 
Wickham, dont il avait la confiance et qui disposait de crédits considérables, dont il 
entendait se servir au profit de la cause royaliste. 



38 CONSPIRATION ANGLAISE 

41. — Londres, 13 mai 1800. Dutheil à M. Frère. 

(Analyse.) 

Le comte d'Artois envoie en Souabe son capitaine des gardes * pour s'ex- 
pliquer avec l'agence sur de prétendues missions qu'il aurait envoyées dans 
le midi delà France, et qu'il n'a pas envoyées en réalité, car il s'interdit tout 
ce qui touche à ces régions qui dépendent de Wickham et de l'agence. 

[Record Office, Foreign Office, France, à la date -.) 

42. — 19 juin 1800. Georges à lord Grenville^. 

(Lettre écrite de Bretagne. Extrait.) 

(( Tout est prêt; j'ai parlé à tous les chefs ; ils sont en mesure. 

(1 Le peu de troupes républicaines qu'il y a encore dans l'Ouest s'est 
concentré dans le Morbihan et le Finistère. L'Anjou, le Maine, le 
Poitou, la Normandie, sont absolument dégagés. Nantes n'a pas 
800 hommes de garnison et, depuis le Croisic jusqu'à celte ville, il 
n'y en a pas 600. Rien ne peut empêcher le plan que j'ai présenté à 
votre gouvernement, mais il faut faire diligence... 

« Il suffira de prévenir les chefs de l'intérieur huit jours avant le 
débarquement et V insurrection éclatera dans tout V Ouest et même dans 
une partie du Midi avec laquelle nous correspondons *. 

<( Plusieurs villes conséquentes seront prises le même jour par les 
insurgés. Ceux du Morbihan, du Finistère, des Côtes-du-Nord et de 
rille-et-Vilaine feront leurs efforts pour détruire partiellement et 
empêcher la réunion de la petite armée qui est contre eux et lui ôter 



1. La vraie cause de la mission confiée au comte d'Escars et au marquis de 
Rivière nous est connue par une lettre de l'abbé Delamarre à TAlien Office, lettre 
qui se retrouve au British Muséum (papiers de Puisaye, vol. LXXVI). La lettre est du 
16 octobre 1805 : le comte d'Artois envoya « en Allemagne le marquis de Rivière et 
le comte François d'Escars pour y casser une agence établie par Louis XVIII... Ils 
étaient spécialement chargés d'offrir à M. Dandré, membre de cette agence, la place 
de M. Dutheil, en qui, disaient-ils, Monsieur ne pouvait plus avoir confiance. » 
Celte mission, qui devait servir à endormir les défiances de Wickham, avait pour 
but réel d'enlever Dandré (et avec lui le parti royaliste du Midi) à son influence. 

Wickham s'était plaint que le comte d'Artois envoyât des agents dans le Midi, 
bien que le Midi ne fût pas placé par le Prétendant sous sa direction et ne relevât 
que de l'agence de Souabe. 11 avait chargé le baron de Roll de faire à ce sujet des 
représentations amicales au comte. Cependant un Suisse, du nom de Bourrât, s'était 
présenté dans le Midi comme agent de Monsieur. Cf lettre de Wickham du 26 avril 
1800, Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date. 

2. Martel, p. 232, place à tort cette lettre à la date du 18 mai. 

3. Martel, Pacifications, p. 212, ne publie que les dernières lignes de cette lettre, 
et la suite. 

4. Dupont-Constant s'était mis en relations avec l'Ouest vendéen et chouan par 
Destravaux. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 39 

tout moyen de se porter, du moins en corps, sur l'armée débarquée. 
Alors les royalistes de l'Anjou, du Poitou et du Maine réunis à la 
grande armée... peuvent espérer le plus grand succès. Surtout si 
on n'a pas manqué le coup essentiel de Paris... » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

Je ne publie pas les autres lettres de Georges, car M. de Martel les a 
analysées ou publiées en partie dans Les Historiens fantaisistes. Cf. aussi 
mon article de la Revue historique de novembre 1900, 



43. — Londres, 23 juin 1800. Fauche-BoreU [à Frère], 

(Extrait.) 

« En rentrant chez moi dimanche dernier, au sortir de chez Son 
Altesse royale, j'ai trouvé MM. Montferrat et Montchenu, qui m'ont 
remis une lettre de M. de la Neuville ^, qu'ils ont demandé que 
j'anéantisse après lecture, ce que j'ai fait. Ladite lettre portait en 
substance qu'on m'adressait ces deux messieurs pour les mettre à 
même de faire la connaissance du Major [Pichegru] à son arrivée, 
qu'il était important de lui faire connaître le terrain, c'est-à-dire de 
lui donner connaissance des personnes qui entouraient Monsieur ; 
que M. de la Neuville correspondait de l'intérieur avec ces Messieurs 
et qu'il leur ferait part de son succès auprès des chefs vendéens, 
auxquels il allait s'adresser pour demander leur signature 3, afin de 
déterminer le Major à se mettre à leur tête. » 

Fauche s'est tenu sur la réserve, a répondu que Pichegru n'était 
pas arrivé, et qu'il ne savait pas quand il arriverait. Il croit que 
M. de la Neu^^ille, dont la « légèreté » est connue, n'aura guère de 
prise sur Pichegru, « à cause de l'extrême réserve du Major. » 

(Record Office^ Foreign Office^ France, à la date.) 



1. Fauche partit presque aussitôt pour Augsbourg, Voir le n" 46 du recueil. 
On trouve dans ses Mémoires un long récit de son voyage, très mouvementé, car le 
vaisseau qui le portait fut arrêté par un corsaire français. Fauche dut jeter à la 
mer les lettres et instruclious que lui avait confiées Grenville. 

2 Après la découverte de la conspiration anglaise, Hjde, qui étaitalorsà Londres, 
repartit pour la France, afin de « tout disposer dans le plus grand secret pour 
revenir ensuite avec le général Georges ». Voir Martel. Pacifications., p. 298. Mais 
il voulait gagner Pichegru à l'idée de venir ù Paris s'entendre avec les généraux 
ennemis du premier consul pour, de lA, aller prendre le commandement des forces 
insurgées de l'Ouest. C'est pourquoi il avait chargé ses amis de parler & 
Pichegru. 

3. Cf. la lettre de Hourmont du 17 janvier 1800, citée en appendice dans les 
}fémoire$ de Hyde. Bourmont aurait accepté de servir sous les ordres de Pichegru. 



40 CONSPIRATION ANGLAISE 

44. — Lundi, 4 h. après-midi [reçu 30 juin 1800]. Le baron 
de Roll \à Frère]. 

« Monsieur, je suis venu pour avoir l'honneur de vous voir de la 
part de S. A. R. Monsieur et pour vous dire que le général Pichegru 
vient d'arriver ^ Ce prince vous prie d'en informer lord Grenville 
et M. Pitt et de leur demander de sa part s'il désire voir le général 
Pichegru encore (sic) aujourd'hui ou demain matin. Monsieur, 
désirant le leur amener lui-même, vous prie de lui envoyer une 
réponse dans la journée, afin qu'il puisse se régler en conséquence. » 

{Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 

45.— ^Londres, 2 juillet 1800. Lord Grenville au général Georges \ 

(Minute.) 

Accuse réception de trois lettres de Georges, dont la dernière est du 19 juin. 

(( J'avais déjà préparé mes réponses aux deux premières et tout 
était arrangé pour l'exécution des mesures que le gouvernement du 
Roi avait décidé d'adopter, quand on a appris ici la nouvelle de l'ar- 
mistice conclu en Italie. 

« Il n'est que trop évident que si cet armistice venait à être prolongé 
et mieux étendu aux autres armées, les républicains se verraient par 
là en état de tourner contre les royalistes une masse de forces supé- 
rieure à celle dont ils auraient pu disposer dans d'autres circons- 
tances. Les mesures dont il a été question deviendraient par consé- 
quent infiniment plus hasardeuses et ne serviraient qu'à compromettre 
sans avantage réelles braves gens auxquels vous avez la gloire de 
commander. Je ne puis donc que vous inviter de leur persuader de 
rester tranquilles pour le moment... » 

(Record Office, Foreign Office, France, à la date.) 



1. Pichegru, après Marengo (Voir la leUre ci-dessous de Grenville), dut renon- 
cer à se rendre à Bordeaux. C'est alors qu'il ébauche avec Georges Cadoudal, 
revenu de Bretagne, le plan du complot de l'an XII. Le duc de Bourbon écrit 
au prince de Condé, le 4 août 1800 ; « Pichegru est ici, attendant les événe- 
ments ; il voit souvent Georges ; ils sont bien traités par le gouvernement. » 
Chantilly. Z, t. VIII, p. 331. — Il repartit pour le continent en août 1800. Le 
17 août, Monsieur écrivait à Grenville : oc D'après ce que M. Frère m'a dit hier de 
votre part relativement au retour du général Pichegru sur le continent, je dois vous 
proposer de conférer avec moi d'abord et ensuite avec le général Pichegru, 
afin que nous puissions convenir ensemble de la nature des instructions qu'il 
faudra donner à ce général, pour tirer un parti utile de son zèle et de ses 
lumières. » 

2. Grenville renonçait au plan du Midi comme au plan de l'Ouest, momentané- 
ment au moins. 



ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI 41 

46. — Ambert, 17 juillet 1800. Wickham à lord Greiwille. 

(Traduction.) 

« M. Fauche de Neufchâtel est arrivé ici la nuit dernière ^ et 
m'informe qu'il ma été envoyé avec une dépêche de Votre Excel- 
lence et aussi avec des instructions pour trouver le général Pichegru 
et retourner avec lui à Londres, mais qu'il a eu le malheur d'être 
pris à bord du Dolphin Packel, par le Buoiiaparte, corsaire fran- 
çais, et emmené au Texel après avoir jeté ses dépêches par-dessus 
bord. 

« Comme le général Pichegru doit être depuis longtemps déjà en 
Angleterre, je renvoie Fauche sans perte de temps. » 

[Record Office, Foreign Office, Suisse, à la date.) 

47. — Crems Munster, 16 août 1800. Wickham à Greiwille 2. 

(Analyse et extrait.) 

Répond à la lettre de Grenville du 27 mai, relative à Dandré, Dandré ne 
peut pas se rendre en Angleterre En voici les raisons ostensibles : Wickham 
avait besoin de lui jusqu'à la fin de la mission de Willot, pour diriger le 
service de renseignements, «la correspondance de l'Intérieur », dont il est 
chargé ; il en a besoin encore, car il ne peut le remplacer dans ces fonctions 
dont il s'acquitte fort bien. 

Voici maintenant les raisons secrètes : Dandré ne veut pas communiquer 
au comte d'Artois et à son indiscret entourage les noms de ses correspondants 
en France. Surtout Wickham veut le garder pour « avoir l'œil » dans la 
correspondance des agents de Louis XVIII en France, dont il ne connaîtrait 
rien sans Dandré. Les correspondants de Dandré en France sont des roya- 
listes qui ne se sont pas compromis au 18 Fructidor, en particulier le con- 
sul Lebrun, qui a écrit une lettre avant son consulat au roi Louis XVIII et 
qui en a reçu réponse ; Lebrun n'a pas écrit depuis qu'il est consul, mais 
il voit souvent le correspondant de Dandré et déclare qu'il est prêt à servir 
le roi, mais que l'occasion est loin d'être propice. C'est par Dandré que 
Wickham a connu la correspondance de Thugut et de Talleyrand l'hiver 
dernier, 1'" état exact et la force de l'armée française »... 

(( Votre Excellence se rappellera que M. Dandré fut employé 
comme agent principal pour amener un changement d'opinion dans 

1. Cf. Mémoires de Fauche, t. II, p. 345 et suiv. A 354. Le Dolphin fut capturé en 
vue du Texel, et Fauche fut cntiduil h In Haye. Il trouva Wickh.un à Munzingen, 
couvent fameux, à 10 ou 12 lioues de Vienne. 

2. Je cite cette curieuse lettre qui prouve les relations de W'ieklinm avec Dandré 
dès avant Fructidor. Grâce à Dandré, Wickham tenait les fils de l'organisation 
royaliste du Midi. C'est pourquoi il voulait garder auprès de lui l'ex-constituant. 



42 CONSPIRATION ANGLAISE 

les deux conseils aussi bien que dans l'esprit public, avant le coup 
d'état du 18 Fructidor ou 5 septembre 1797 '. » 

Dandré sera très utile, même à Londres, pour diriger le service de rensei- 
gnements secrets avec les royalistes de l'Intérieur. 

{Record Office^ Foreign Office, Suisse, à la date ) 



1. Document essentiel, un de ceux qui prouvent que les lettres signées Kilien et 
Berger, lettres de l'agent de Wickham à Paris, sont bien de Dandré. Voir, sur son 
rôle à Paris, ma thèse principale, la Trahison de Pichegru, les deux derniers 
chapitres . 



DEUXIÈME PARTIE 



1800 



LA DECOUVERTE 



COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIIP 



A. — l'arrestation de DUPONT, COSSE -, etc. Correspondance 
de Desmarets avec le commissaire Pierre et le préfet Thihaii- 
deau. 

A la suite de la découverte de la Correspondance anglaise, le 12 floréal 
an VIII, chez la veuve Mercier, la police de Fouché surveilla de plus près les 
intrigues royalistes et découvrit celle de Bordeaux. Comment ? C'est ce qu'il 
est fort difficile de dire avec certitude Voici des hypothèses : Dupont était 



1. Les documents de la sériç F^ (Archives nationales) qui concernent l'Institut 
Philanthropique de Bordeaux et cet Institut en général, ainsi que le complot 
royaliste du Midi en l'an VIII, sont contenus dans les cartons 6256 (dossier 5121) 
[carton de la Conspiration de Bordeaux], 6258 à 6260 [Affaires du Midi] et 6419 
(dossier 8375) 

Les autres documents cités dans c«lte seconde partie du recueil appartiennent 
aux Archives administratives de la guerre (dossier Papin), aux Archives départe- 
mentales de Bordeaux, série M, très pauvre en ce qui touche au Consulat, h la 
Bihliothèque de la Ville {Tablettes de Bernadeou). Il est malheureux que l'incendie 
de l'Hôtel de Ville ait consumé la plupart des pièces des Archives municipales 
relatives à la période du Consulat ou de l'Kmpire à Bordeaux. 

On trouvera dans l'introduction le commentaire des pièces qui suivent, au moins 
tous les renseignements sur la fondation de l'Institut bordelais, son organisation et 
son rôle avant le 18 Fructidor. 

2. Le nom est écrit tantôt Cosse, tantôt Causse. J'adopte l'orthographe de la 
signature (interrogatoire). 



44 LA DÉCOUVERTE 

entré en relations avec les chefs de TOuest par Destravaux. Après la pacifica- 
tion, Fouché n'a-t-il pas reçu des confidences ? On connaît ses relations avec 
Bourmont ; plusieurs officiers chouans servirent depuis cette époque d'indi- 
cateurs à la police. Autre hypothèse : Bayard, l'ancien agent de Wickham 
et de Dandré à Paris, était l'amant de la fille Meyer, maîtresse elle-même du 
prince de Carency qui avait livré les secrets des royalistes à Barras avant 
Fructidor. Or Bayard connaissait l'intrigue de Bordeaux. On peut admettre 
aussi que Dupérou, arrêté par la police (pour la 2® fois) le 24 prairial, fit des 
révélations. 



48. — Paris, 29 prairial an VIII [18 juin 1800]. Desmarets au 
commissaire général de police de Bordeaux * . 

(Minute.) 

« Je vous expédie, citoyen commissaire, un courrier qui vous porte, 
avec la présente, huit mandats d'arrêt contre divers agents et chefs 
du parti royaliste à Bordeaux, sur lesquels l'instruction ci-jointe 
vous donne tous les renseignements nécessaires. Les faits consignés 
dans cette note sont un extrait pour cette partie de la France du plan 
général payé par l'Angleterre et qui, depuis quelque temps, a comme 
institué et organisé la Monarchie au sein môme de la République. 

« Vous prendrez sur-le-champ toutes vos mesures pour la recherche 
et l'arrestation de ceux de ces individus qui sont à Bordeaux. Et en 
même temps vous vous concerterez avec le préfet du département et 
le chef militaire qui procureront l'arrestation des autres. J'écris à cet 
effet au préfet. 

« Les prévenus subiront des interrogatoires que vous me trans- 
mettrez avec le résultat de l'examen des pièces saisies chez eux et 
votre avis sur le tout. 

« Vous ferez arrêter les individus qui, par suite de déclarations ou 
de vos recherches, vous paraîtraient prévenus de complicité Vous 
donnerez l'ordre de retenir les prévenus au secret et sous bonne 
garde. Je vous donnerai à leur égard des ordres ultérieurs, sur le 
rapport que vous m'aurez transmis. Vous mettrez tous vos soins, 
citoyen commissaire, de concert avec le préfet, pour approfondir 
ce complot, en suivre toutes les ramifications et, en liant vos décou- 
vertes avec mes renseignements, vous porterez le plus grand jour sur 
cette nouvelle intrigue de l'étranger. » 

(F^ 6256 ) 



1. Voir sur le commissaire Pierre Pierre l'élude de M. de Perceval.Ln policier de 
jadis, dans ]sL Revue Philomathique de septembre 1904, d'après les Archives munici- 
pales et les papiers d'Emerigon. Il fut remplacé à Bordeaux, comme commissaire 
principal, par Jolicler. C'était un ami personnel des Bonaparte et surtout de Lucien. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 45 

49. — [Même date.] Lettre de Desmarets au préfet de la Gironde. 

(Minute.) 

« Citoyen préfet, je ôonfie à votre zèle la recherche et l'arrestation 
des individus dont je joins ici les mandais. Ils sont, pour votre 
arrondissement, ou chefs ou agents de la conspiration royaliste 
payée par l'or de l'Angleterre. Ce complot, qui avait institué et or- 
ganisé la Monarchie au sein même de la République, est connu et 
découvert dans toutes ses parties. 

Dupont^.— i< [Je vous envoie 1'] Ordre d'arrêter Dupont, Américain, 
oncle, dont le neveu a été arrêté l'an dernier, se disant agent de 
change, logé cours Fructidor. Cet agent a des pouvoirs du roi ; ils 
doivent être, ainsi que ses papiers, dans une 

^me Duval. — « cachette chez lui... ou chez sa sœur, M™^ Duval, 
institutrice qui demeure vis-à-vis et qui a aussi une cachette chez 
elle dans une chambre. 

Lacombe. — « Cet individu correspond à Lyon avec un nommé 
Lacombe, prêtre, qui a pour secrétaire M. de Florac. et à Paris avec 
un nommé Léon, chirurgien, ces deux derniers également agents du 
roi (Lacombe et Léon). Dupont correspond avec M"'^ de Donnissant- 
Lescure. 

Causse. — « Les lettres adressées à Bordeaux sont presque toutes 
adressées à un nommé Causse, musicien, demeurant sur le chemin 
de Peyssac. Toutes les lettres sont écrites avec un procédé chimique 
et on fait reparaître les caractères avec de Teau forte. 

Dumas, Lavalette. — « L'agent de change de l'Institut à Bordeaux 
est un nommé Dumas. Il a chez lui le commandant de la cavalerie 
royale, nommé Lavalette, aide de camp de Charrete (sic). 

Papin. — «Il y a en outre, à Bordeauxquatre commissaires généraux 
chargés d'insciter (,s/c) les provinces environnantes. Le commandant 
militaire royal de Bordeaux est un nommé Papin, jadis olïicier mu- 
nicipal et aujourd'hui fermier de M'"^ Lescure. Il y a tous les jours 
des mots d'ordre, défausses patrouilles. Ils correspondent à Londres 
aveclc duc de Durfort, frère de M"'*^ de Donnissant, oncle de M'"^ Les- 
cure ; en Espagne, avec le duc d'Havre. Ils ont reçu à Bordcau^c, il 
y a un mois. 5. ()()() guinées. Dupont s'est occupé parmi eux de les faire 
valoir sur la place. 

Brochon « — Le caissier de ces commissaires généraux est un 
vieil avocat nommé Brochon. 

« Ils ont un noyau d'armée dans le Médoc, composé de conscrits et 
de déserteurs payés par l'Institut. 

1. Ce nom dans la marge ainsi que les suivants Les renseignements sont précis, 
mais contiennent des erreurs : voir l'Introduction. 



46 LA DÉCOUVERTE 

« Il y a un lieutenant général pour le roi qui a sous son comman- 
dement les anciennes provinces de l'Aunis, Gascogne, Périgord, 
Landes. Il y a dans tous ces pays des commissaires qui correspon- 
dent avec rinstitut. 

« Le lieutenantgénéral est le chevalier de Magnol; le correspondant 
de Saintonge est un nommé Brûlé, médecin. 

« N. B. — L'Institutest le nom convenu pour désigner lesassemblées 
du parti royaliste. 

« Papin,qui est le chefde la force armée, fait attribuer tous les jours 
des mots d'ordre. Il a des aides de camp et des commandants de 
cavalerie. Il commande tous les jours des hommes qui sont chargés 
de voler les diligences et de faire de fausses patrouilles. C'est à l'aide 
de fausses patrouilles qu'il fit enlever, il y a quelques jours, un 
émigré qu'on mettait en prison. Dans les premiers jours du mois, il 
a fait distribuer des fusils à tous les initiés. 

« N. B. — Pour être initié dans leurs complots, le candidat est 
discuté dans les quatre arrondissements de Bordeaux. » 

(F' 6256.) 

50. — Bordeaux, le 3 messidor an VIII. Le préfet Thihaudeau 
au ministre de la police générale. 

« Je reçus le l^'" de ce mois, à 11 heures du soir, par votre 
courrier extraordinaire, votre lettre du 29 prairial et le paquet joint 
par vous adressé au commissaire général de police. 

« Sur-le-champ, je le fis prévenir, ainsi que le général de division 
Dufour *, et nous fîmes toutes nos dispositions pour mettre à exécution 
dès le matin les huit mandats d'arrêt que vous aviez décernés. 

« Il paraît que six des prévenus ont été arrêtés. Le citoyen Papin 
était absent de cette ville, et on croit que le Maignol arrêté n est pas 
celui qui était désigné dans le mandat d'arrêt par la qualité d'ex- 
chevalier. 

« Le commissaire général vous rend compte au surplus de l'exécu- 
tion de vos ordres dont il a été plus spécialement chargé. 

« Je me réserve de vous exprimer mon opinion sur cette conspira- 
tion qui n'est pas une chose nouvelle pour moi, et sur les intrigues 
de toute espèce dont j'ai été spectateur ou confident depuis que je 
suis dans ce département. J'ose vous assurer que le commissaire 
général la partagera. 

« Peu facile à efifrayer par les complots presque tous exagérés - que 

1. Dufour commanda la 11« divis. militaire de 1800 à 1802. Voir son rôle à l'ar- 
mée de Rhin-et-Moselle, en 1795, dans La Trahison de Pichegru. Fut député de la 
Gironde pendant les Cent- Jours. 

2. Thibaudeau, surpris par le complot, afiPecte de n'y pas croire. 11 semble que 
Bonaparte lui en ait gardé rancune. En septembre 1800, il le remplaçait par Dubois. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 47 

s'imputent les divers partis, je ne les ai pas jugés assez menaçants 
pour vous en instruire. Je me suis plus occupé de l'administration, 
jaloux de présenter au gouvernement des résultats satisfaisants ; et 
j'ai compté, pour en imposer aux agitateurs, sur rattachement incon- 
testable de la majorité des citoyens au gouvernement, sur mon 
inflexible impartialité, sur la fermeté dont je n'ai cessé de donner des 
preuves, et sur le dévouement personnel dont je donnerai l'exemple 
si des circonstances malheureuses l'exigeaient. 

« J'ai toujours pensé que la confiance qu'un fonctionnaire avait dans 
la puissance du caractère dont il était revêtu était plus propre à en 
imposer aux conspirateurs que cette inquiète crédulité qui s'alarme à 
tous les bruits et qui encourage l'audace des ennemis de l'ordre. 
Depuis trois mois, chaque jour, j ai reçu allernativementla dénoncia- 
tion d'un complot anarchique et d'une conspiration royaliste Si 
j'avais voulu croire les uns et les autres, le lendemain devait voir 
éclater des scènes sanglantes. Et cependant la paix a constamment 
régné. J'ai éclairé ; j'ai rassuré ; j'ai prêché la concorde ; j'ai promis 
protection à tous ; je n'ai Cessé de dire qu'avec un gouvernement 
aussi fort que le nôtre il n'y avait rien à craindre de personne... 

« Je vous adresserai des pièces officielles qui prouvent que ceux 
qui poussent le gouvernement vers des mesures extraordinaires ne 
croient pas à l'imminence des mesures qu'ils dénoncent. J'ai néan- 
moins pris toutes les mesures qui sont en mon pouvoir pour exciter 
la surveillance des sous-préfets. 

(1 L'arrondissement de Lesparre (Médoc), que vous paraissez croire 
en proie à des troubles et que, depuis plus de huit jours, quelques 
personnes disaient être très agité, est parfaitement tranquille. J'en ai 
la preuve par une lettre que j'ai reçue hier du directeur du jury de 
cet arrondissement. . 

«J'attends des renseignements positifsque j'ai demandés surl'arron- 
dissemenl de Ha/as, que vous indiquez aussi comme un des points à 
surveiller. Il ne m'est rien parvenu jusqu'à présent qui pût motiver 
la moindre inquiétude. 

« Quanta Bordeaux, celte grande ville où la force publique est pres- 
que nulle, il n'y a eu non plus aucun symptôme de mouvement ; il 
s'y est commis seulement quelques vols, mais l'ordre public y a été 
constamment maintenu. 

« P. S. — Je dois vous expliquer une phrase de ma lettre. La cons- 
piration n'est pas nouvellepourmoi, parce que, depuis plus d'un mois, 
le citoyen Fartarrieu ', commissaire près les tribunaux, nous en a 
donné, à moi et au commissaire général de police, le plan presque 

1. l'nrt.irrieu-LafoBSC (I?.')*) IM.'t.'t), chargé d'importantes fonctions administratives 
duiis 1m (iirondc pendant lu Hévolulion, député au Corps Législatif de 1800 tV 1808. 
Cf. Delpit. Tahlellv» des HihliophUe» de Guyennet t. m. 



48 LA DÉCOUVERTE 

littéralement conforme à celui qui est contenu dans votre instruction. 
Le commissaire général faisait surveiller les individus dénoncés, 
mais il ne lui était pas parvenu de donnée assez positive pour motiver 
des arrestations. » 

(F' 6256.) 



51. — 3 messidor an VIII [22 juin 1800]. Le commandant 
général de police, Pierre, au ministre de la police générale. 

« Citoyen ministre, le préfet du département delà Gironde me remit, 
le V^ de ce mois, à 11 h. 1/2 du soir, votre lettre du 29 prairial 
dernier, à laquelle étaient joints huit mandats d'arrêt contre divers 
agents, et chefs du parti royaliste à Bordeaux. Après un moment 
d'entretien sur les moyens d'exécution des dispositions que vous 
ordonniez, nous nous rendîmes ensemble et sur-le-champ chez le 
général commandant la 11^ division militaire Cet officier supérieur, 
désirant nous seconder de tous ses moyens, donna aussitôt des 
ordres pour que la troupe casernée au château Trompette fût prête 
à agir au besoin et que toute la gendarmerie nationale fût à ma dis- 
position... 

« Le 2 au matin, entre 4 et 5 heures, les dénommés aux mandats 
d'arrêt étaient arrêtés et tenus au secret... à l'exception du nommé 
Papin, qui se trouve absent depuis quelques jours et qu'on assure 
être parti pour la Rochelle, où il a été accompagner son beau-père 
qui part pour l'Inde. Comptez sur mon exactitude... Je vous dois 
cependant une observation que la justice, la vérité, le devoir et l'opi- 
nion publique commandent. Parmi les individus arrêtés, le nommé 
Brochon, avocat, excite la plus grande surprise. Agé de 75 ans, père 
d'une nombreuse famille qui compte des enfants remarquables par 
leur entier dévouement et leur attachement prononcé à la Répu- 
blique, jouissant d'une grande réputation de probité, de moralité, 
ce vieillard est généralement estimé et attire toute l'attention et la 
pitié du très grand nombre de personnes qui le connaissent. 

« P. S. — On m'annonce que le citoyen Magnol, ex-chevalier, que 
j'ai fait arrêter ici, n'est pas celui désigné par vous ; que c'est son 
oncle, parti pour Paris il y a quelques jours. Ce Magnol arrêté est 
un jeune homme qui vit ici avec M'"^ Latapy, directrice du Grand- 
Théâtre de Bordeaux. Je l'interrogerai aujourd'hui; mais les rensei- 
gnements que j'ai peignent le Magnol actuellement à Paris comme 
dangereux. » 

(F- 6256.) 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 49 

52. — Notes de Desmarets, 

(Minutes isolées). 

Dupouy, médecin, rue du Hâ, est le receveur des contributions. 
Ajouter aux [inculpés] déjà indiqués par les anciens rapports le duc 
de Loches ^ [sic). 

Ecrit le 3 messidor au commissaire de Bordeaux. 

Louis 2, menuisier, vis-à-vis le commissariat de police à Bordeaux. 
Initié dans les affaires. Bavard, qu'on peut faire parler, en feignant 
devenir de la part de M'"^ de Donnissant. 

Ecrit, le 4 messidor, pour le citoyen Louis. 

Correspondant de l'Institut de Bordeaux à Paris : un Léon Du- 
bois, chirurgien. 

(F' 6256.) 

53. — [Paris], 8 messidor an VIII (27 juin 1800). Desmarets 
au préfet de la Gironde, Thibaiideau. 

(Minute . ) 

<( J'ai reçu, citoyen préfet, votre lettre du 3 courant, en réponse 
à celle que je vous adressai par un courrier extraordinaire en date 
du 29 prairial. 

« Les renseignements quejevousai transmis sont positifs et incon- 
testables. Le caractère et la situation particulière des personnes qui 
me les ont communiqués, qui ont été initiées dans le plan général 
et qui ont lu la liste des agents désignés et vu la commission royale 
de Dupont, des aveux et des révélations importantes^, des correspon- 
dances saisies qui ont coïncidé avec leurs renseignements % ne m'ont 
point laissé de doutes sur une vaste organisation du royalisme dans 
l'intérieur de la République et ont déterminé les mandats que j'ai 
lancés sur les chefs dans votre département. 

« L'activité que vous avez apportée à leur exécution m'assure que 
l'affaire sera suivie avec soin ; et si l'instruction préliminaire est 
bien conduite, si les recherches ont été faites avec toute l'attention 
qu'exigeait l'importance de l'objet, vous obtiendrez des données qui 
établiront la réalité du complot et convaincront les coupables. 

« C'est ainsi qu'en saisissant à Paris les chefs du Comité anglais"^ 

1. Duc de Lorges, 

2. Hagry. voir l'Introduction, son arrestation en thermidor VU. 

3. Voir l'ovant-propos, p, 43 et 44. 

4. Une seule lettre fort obscure au dossier, adressée & une inconnue, « Marie », et 
non signf'c. •!« crois iiuitlle de In publier. 

5. Voir l'Introduction de la Conspiration anglaise. 



50 LA DÉCOUVERTE 

qui avaient fait disparaître toutes les pièces de conviction, je suis 
arrivé par suite aux divers dépôts qui recelaient ces pièces. 

« Je compte donc sur tous vos soins et sur ceux du commissaire 
général pour les recherches ultérieures relatives à cette intrigue. 

« Il est possible que, dans un certain nombre d'arrondissements, 
on n'ait encore fait qu'instituer les chefs et former les cadres. Peut- 
être aussi les agents que je vous ai désignés n'ont-ils encore réalisé 
et mis en action aucune partie de leurs plans, de manière à rendre 
palpables les faits à leur charge... 

« Quoi qu'il en soit, vous n'en aurez pas moins frappé un coup 
décisif, en déconcertant ces agents et en mettant leur intention à 
découvert, en même temps que vous aurez ralenti l'audace que 
semblait leur donner partout l'apparente inactivité de la police. » 

(F' 6256.1 

54. — 9 messidor an VIII. Desmarets au commissaire Pierre, 

(Résumé de la minute.) 

Il l'engage à rechercher Papin; il pense que Maignol arrêté est le neveu du 
chevalier Maignol ^ qui est, paraît-il, à Paris et qu'on recherche. 

Le commissaire Pierre pourra faire élargir Maignol ainsi que Brochon -. 

55. — « Paris, 8 messidor. Extrait des renseignements re- 
cueillis par le général commandant la 11^ division militaire 
(Dufour) et transmis par lui au ministre de la guerre. » 

(Copie signée de Carnot.) 

« Il est sûr que les royalistes conspirent contre la liberté ; ils ont 
des agents sur tous les points de la République ; il se fait des amas 
d'armes et de munitions, des enrôlements secrets qui sont favorisés 
par les ci-devant seigneurs, les émigrés et les prêtres déportés ren- 
trés. Leurs places d'armes dans ce département sont les environs de 
Sainte-Foy et de Bazas Le bureau principal de correspondance est 
à Bordeaux, sous la direction des nommés Olivier, Lebrun et Chai- 
gneau, ce dernier signataire du journal le Spectateur de Bordeaux. 
La caisse y est vraisemblablement aussi. 

« Le corps des enrôlés de Bazas est composé de réquisitionnaires, 
de conscrits, de déserteurs et de paysans, des ci-devant seigneurs, 

1. Agent de l'Institut dans le Médoc. 

2. Extrait d'un article nécrologique sur Brochon par l'avocat Ferrère, dans les 
Etrennes royales de 1815, p 198 : « Son zèle actif pour le rétablissement du Trône 
l'exposa aux plus grands dangers. En 1799 un ordre de Bonaparte le fit traduire 
dans les prisons à l'âge de 70 ans, comme prévenu de conspiration roj'ale. La ville 
entière réclama un de ses meilleurs citoyens. Un cautionnement de près d'un mil- 
lion souscrit en quelques minutes abrégea sa captivité. » 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 51 

environ 2.000 hommes armés et équipés ; les chefs se rassemblent 
très souvent, et toujours la nuit, dans un bois voisin de Bazas. Le 
plus marquant de ces chefs et le plus actif paraît être le ci-devant 
marquis de Lanzac\ qui a pour agent immédiat un nommé de Pau, 
instituteur, homme sans considération personnelle, sans mœurs, et 
qui ne peut être devenu le confident du marquis que pour servir ses 
projets contre-révolutionnaires... 

« On a vu un armurier, connu par sa haiiie pour la Révolution, 
aller régulièrement tous les jours chez de Pau et tous les deux faire 
de fréquents voyages au Rocher-Taillade, chez le marquis de Lanssac 
(sic). Le valet de chambre de ce dernier est venu souvent chez de 
Pau en cachette. Celte liaison est d'autant plus remarquable que ce 
de Pau, relégué jusqu'à présent dans la classe la plus obscure des 
plébéiens et justement méprisé pour son immoralité crapuleuse, 
n'avait aucune espèce de rapport avec la maison de Roque-Taillade. 
Les différents châteaux qui sont dans ce pays doivent renfermer les 
armes et la correspondance; mais la plupart sont des espèces de 
forteresses dans lesquelles il est difficile de rien découvrir, à moins 
qu'on ne fît des fouilles très exactes. 

« Le juge de paix de Bazas, Pierron, est totalement dévoué à ce 
parti... 

« Le lieutenant de gendarmerie Mayeras est initié dans tous les 
secrets de la bande ; il connaît tous les émigrés et les prêtres 
déportés rentrés, et il les prévient exactement de toutes les mesures 
prises contre eux. . Le maire qui vient d'être nommé pour la com- 
mune de Bazas, Malot, est un de leurs plus chauds partisans... ; un 
adjoint est dans les mêmes principes... 

« Tout était prêt pour commencer le mouvement dans la quinzaine 
des ci-devant fêtes delà Pentecôte-. Ils n'attendaient que la nouvelle 
du débarquement des Anglaisa Quiberon -^ débarquement qui leur 
était connu depuis quelques jours. Ils devaient se porter sur Bazas, 
égorger tous les républicains, et surtout les acquéreurs de biens 
nationaux, s'emparer des caisses publiques. Le pillage était promis 
à tous les paysans qui prendraient part à Tinsurrection et, dans le 
cas où le mouvement n'aurait pas pu réussir, ils devaient se disperser 
sur-le-champ. Ils étaient munis de passeports. De Pau avait pris le 
sien pour Paris. » 

(Transmis par Carnot, le 11 messidor an VIII.) 

Au-dessous de la lettre de Carnot, note de Desmarels : « Remercier 



1. Lan sac bu Lanzac. Voir VArmorial de Guyenne. 

2. Le 1" juin 1800, fèU» dv lu PeulecAte. 

3. Tciilalives de lord Muiiluiid sur Purt-Navalo et Quibcron. Voir Martel, /\(c(- 
fieation de l Oueit, p. 235 et 262. Exécution prématurée du plan de Caduudal. 



52 LA DÉCOUVERTE 

le ministre, le général Dufour ; ordre parti, le 29 prairial, pour 
faire arrêter les chefs des conjurés. » 

(F^ 6256.) 

B. — LES PIÈCES SAISIES CHEZ COSSE e/ les interrogatoires. 

Je publie in extenso l'analyse de ces pièces, faite par le commissaire de 
police Pierre, à la suite de son rapport du 19 messidor an VIIL 

Je joins entre crochets des extraits de ces pièces. Comme le rapport de 
Pierre, elles ont été conservées aux Archives nationales (F"' 6256). 

On en trouve une partie dans la Conspiration anglaise et dans l'Essai. 

56. Pièces saisies chez Cosse, 

— Pièce 1. Le « Bulletin de Lyon de ce jour, «ans date. Les nou- 
velles qu'il contient sont toutes défavorables. On y annonce comme 
certaine une descente des Anglais sur la côte de Bretagne. 

(( Il paraît qu'il existait un bulletin des nouvelles qui se distribuait 
à jour fixe. » 

— « La pièce 2 est une note d'objets à faire. Elle est de Técriture 
de Dupont et la copie en a été envoyée au ministre de la police. » 

[« 1° La liste des aides et adjoints de l'arrondissement de M. Caudeval. 

« 2o L'état de la subdivision de Pessac. 

« 3" Recommander de faire des réceptions pour remplir promptement les 
cadres des compagnies. 

« 4° Ecrire à M. Durand de nous envoyer l'état de Vayres, Contran et 
Brannes. »] 

— « La pièce n° 3 est un discours sur l'existence de l'Institut des 
Amis de l'ordre : parmi les vrais et purs royalistes, il indique les 
qualités requises pour y être admis et le serment prêté par les socié- 
taires. Cette pièce est de l'écriture de Cosse, qui maladroitement 
prétend l'avoir copiée sur un papier déchiré qu'il a trouvé dans la 
rue, il y a six mois. » 

— « Les pièces n°^ 4 et 5 sont une note et une lettre dont la copie 
a été adressée au ministre. Le premier est de l'écriture de Dupont et 
le second, signé Périgord \ est une lettre précieuse ». 

[Pièce 4. « M. Caudeval est prié de mettre en activité M. Devospour les 
sections qui le compétent, ainsi que les subdivisions. Il voudra bien faire 
écrire sur-le-champ à M. Durand (de VajTcs) pour le prier de nous envoyer 
son état, celui de Brannes et celui de Fronsac ^... Il devra nous dire aussi 

1. II est difTicIle d'identifier ces noms, qui sont pour la plupart des noms de con- 
vention (philanthropiques). 

2. Vayres, Fronsac et Branne, (ces deux derniers ch.-I. de canton), sur la Dordogne, 
ou auprès, autour de Libourne. Contran, peut-être Coutras. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L AN VIII 53 

si M. Malescot * a accepté et s'il est en activité. Il faut écrire aussi à 
M. Périgord aîné pour lui demander ses états... M Caudeval voudra bien 
nous envoyer un état au moins approximatif de la subdivision extra-muros 
de Pessac » 

Pièce 5, lettre de Périgord aîné [sans doute adressée à M Caudeval, que 
Dupont avait chargé de lui demander ses états], datée du 8 juin 1800, s. 1. 
« Monsieur [Cassol cadet], ami de M. Servan ^, [est porteur j du tableau en 
retard. . . Je n'ai pu m'étendre sur les observations de ce tableau ; il est 
certain que tout dépendra du nom et de la réputation de celui qui sera envoyé 
pour conduire lafifaire. La présence d'un prince ébranlera tout. Ainsi le ta- 
bleau n'est que par aperçu. Il y a peu de fusils de munitions; nous avons ou 
nous aurons quelques petites pièces de campagne ; le reste des armes est en 
fusils de chasse. Nous n'avons aucune espèce de munition ; veuillez combi- 
ner cet article avec M. Cassol, afin de nous munir, s'il est' possible. 
M. Servan connaît ses talents militaires, sa réflexion, sa prudence et son 
sang-froid dans l'action ; il n'est d'ailleurs qu'à une heure et demie de 
distance de Libourne. Il a des occasions d'aller dans cette dernière ville 
toutes les semaines ; en outre, comme maire de la commune, il peut pa- 
raître plus facilement. Je crois que ce choix sera parfait. Veuillez lui faire 
part de ma réflexion... Faites-lui avoir une entrevue avec M. Constant^... 

« Je continue toujours mes voyages à Libourne ; toujours même incons- 
tance... Je n'écris point à M. Servan. Veuillez être mon interprète auprès de 
lui... »] 

— « Les pièces 6^, 7^, 8% 9^, lO'' et 11^ sont des pièces qui parais- 
sent toutes relatives à la Maçonnerie... Celle n° 11 est un discours 
fait et écrit par Cosse, provoquant l'expulsion de la loge de tous 
ceux qu'il désignait comme terroristes... La 12^ est la liste des 
dénonciateurs, hommes de sang... La 13^ contient des plaintes de 
lâcheté et de pusillanimité de quelques Messieurs initiés à l'Institut, 
à l'annonce de l'arrivée de quelques gendarmes dans une ville qui 
n'est pas Bordeaux et sur l'indiscrétion de quelques-uns. 

— « La 14e est de l'écriture de Dupont et copie en a été envoyée 
au ministre de la police. » 

[« M. Caudeval est prié d'écrire : 1° à M. Périgord, pour demander ses 
états ; 2° à M. Durand pour lui demander le sien, ainsi que celui de M Cle- 
menceau et de M. Magnol * ; il s'informera et nous fera savoir si M. Malinot"* 
a accepté et est mis en activité .. »] 

— « La 15*^ contient des noms sur lesquels il m'a fixé dans son 
interrogatoire. La 16^ renferme le nom de Tascher de la Pagerie, 

1. Voir ci-dessous, parmi les royalistes décorés du Brassard, de Malescot et Durand 
(Jacques et Jean). 

2. Papin. 

3. Dupont. 

4. Clemenceau et Maignol de Mataplan, décorés du Brassard. 

5. Malescot. 



54 LA DECOUVERTE 

écrit de la main de Cosse sur l'adresse du citoyen Caudeval, à 
Bordeaux. D'après la déclaration de la citoyenne Soubardière, du 
7 messidor, sur ce qu'a dit Cosse dans son interrogatoire y relatif, il 
paraît, d'après le mot Tascher de la Pagerie, qu'il sait ce qu'est 
Caudeval, dénommé souvent dans les actes de Constant i. 

— « Les 17% 18^, 19*" pièces convaincantes dont copies au ministre 
de la police. » 

[Les deux premières sont les tableaux demandés par l'intermédiaire 
de M. Caudeval à Pérîgord aîné (voir pièces 2, 4, 5 et 14), tableaux 
indiquant « les hommes à pied et à cheval », les « espèces d'armes » et les 
munitions des communes de Léognan, Martillac, Saint-Médard, Cadaujac, 
Villeneuve, Castres, la Brède, Saint-Selve, Saint-Morillon, Cabanac, etc., 
appartenant aux cantons de Saint-Médard d'Eyran (armée auxiliaire) et de 
Castres -. 

On y voit que Léognan et Martillac compteraient 4-SO hommes à pied et 
^ à cheval; Castres, la Brède et Saint-Selve, 5 hommes à pied ; ce sont les 
seules communes (sur 16) qui peuvent fournir des soldats à l'armée 
auxiliaire. On ne disposerait que de 100 fusils de chasse 1 de munition. 
10 paires de pistolets dans le canton de Saint-Médard, 5 fusils de chasse et 
1 sabre dans celui de Castres. Des observations sont jointes à ces tableaux. 
Dans le canton de Saint-Médard, « à une poignée de factieux près, qu'il 
sera facile d'anéantir, on peut compter sur la masse générale de la popula- 
tion. » Au contraire, dans le canton de Castres, « le canton fourmille, 
comme bien d'autres, de mécontents, et de gens disposés à revenir, s'il 
se peut, sous un autre régime ; mais comme ce canton n'est composé 
en grande partie que de bas peuple, o/î ne trouve personne qui soit entièrement 
décidé. )) 

La pièce no 19 est une circulaire adressée par Dupont aux présidents de 
l'arrondissement les prévenant que « le général s'occupe en ce moment de 
la réorganisation de la compagnie d'artillerie ; il lui manque un militaire 
capable de la commander »... « Vous voudrez bien, en conséquence. Mes- 
sieurs, vous occuper sans délai de la recherche d'un officier d'artillerie digne 
du grade de capitaine, et nous le désigner dès que vous l'aurez trouvé. » La 
circulaire est datée du 24 mai 1800.] 

— « Pièces 21®, 22®, 23®. Lettres du commissaire du roi, Constant, 
contresignées par le secrétaire général Tristan ''\ dont les copies ont 
été envoyées au ministre. Elles sont précieuses pour la conviction 
de l'existence du complot. » 

[La première adressée aux présidents d'arrondissement et datée du 26 
avril 1800 : « Le moment approche, écrit Dupont, où je dois m'occuper du 

1. Aucun éclaircissement à ce sujet dans le dossier de F,, 6256. 

2. Ces communes, situées entre Bordeaux et la Brède, excepté Saint-Morillon et 
Saint-Selve, au sud de la Brède. Aucune n'est chef-lieu de canton. Duchesne de 
Beaumanoir fut maire de Martillac. 

3. Mathieu de Boissac, 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 55 

résultat du mouvement que vous avez dû imprimer pour l'exécution des 
opérations qui vous ont été confiées.. Vous devez vous renfermer exacte- 
ment dans le cercle de votre arrondissement pour Vadmission des candidats 
qui se présentent ; il conviendrait même que vous établissiez plusieurs 
aides vers lesquels vous les renverriez pour leur réception. . Il serait à 
propos que vos subordonnés vous rendissent journellement compte, et qu'ils 
veillassent scrupuleusement sur la conduite et les mouvements des jacobins 
qui nous entourent. Je suis averti qu'ils agissent... Vous jugez combien il est 
important de n'être point arrêté dans l'exécution rapide du mouvement qui 
devra bientôt avoir lieu. » 

La seconde lettre est adressée aux administrateurs de subdivision, et 
datée du 5 mai 1800. Elle invite les « Amis de l'ordre », que le gou- 
vernement désigne pour occuper les places publiques, à les « accepter 
et même à mettre dans l'exercice des fonctions auxquelles ils sont appelés 
toute l'exactitude, le zèle et l'intrépidité nécessaires pour conserver leur 
place et justifier en apparence le choix qu'on aura fait de leur personne. 
Cette conduite nous est prescrite... par une politique bien entendue 
et se concilie parfaitement avec les intérêts et les vues de Sa Majesté, tandis 
qu'une inflexibilité de principes et une obstination mal entendue ne 
tendraient qu'à perpétuer l'exécrable domination des factieux qui jusqu'à 
présent n'ont fait que déchirer la patrie. MM. les présidents d'arrondissement 
communiqueront la présente aux agents de ÏInstitut dans toute l'étendue du 
département. » Au verso de la pièce, une note de Dupont annonce que les 
hostilités sont très vives en Italie, que Masséna est enfermé dans Gênes * : 
« Serait-on assez heureux, ajoute Dupont, pour le forcer à se rendre 
prisonnier: ou les Français sont-ils assez en force pour l'aider à se dégager? 
C'est ce qu'on ne peut savoir à la distance où nous sommes de ces lieux. » 

La troisième lettre est adressée aux présidents d'arrondissement et datée du 
1er juin 1800. « D'après les avis que j'ai reçus, Monsieur, écrit Dupont, nous 
approchons du ternie de la carrière glorieuse que nous suivons depuis plusieurs 
années : le mouvement intérieur, m'assure-t-on, ne tient plus qu'à la reddition 
de Gênes, qui ne peut pas être éloignée. On dit même cette place importante 
au pouvoir des Autrichiens depuis le 9 mai, mais il n'y a rien encore à 
cet égard de positif. )) Dupont se plaint que « les compagnies de ligne ne 
soient pas aussi nombreuses qu'elles pourraient l'être dans une ville aussi 
populeuse que Bordeaux, et que les compagnies auxiliaires ne soient pas 
encore complètes. . Devrait-il exister même un seul honnête homme à 
enrôler dans cette ville !... L'époque du dénouement approche. Gardons-nous 
d'une lassitude ou d'une indifférence qui nous ferait perdre le fruit de 
quatre années de travail. » Il faut remplacer tous les aides qui manquent, 
destituer et remplacer ceux {jui ne remplissent pas leur devoir, faire 
compléter le plus tôt possible toutes les compagnies soit de ligne, soit auxi- 
liaires, et en former même de nouvelles. Pour peu que les aides mettent 
du zèle et de l'activité dans l'exécution de leurs fonctions, il n'est pas rfo«- 
tcux que l'armée ne soit portée en moins d'un mois à plus de quatre mille 
hommes de toute arme -. » 

1. Le siège dure du 6 avril au 4 juin 1800. 

2. A Bordeaux ou dans les environs. Voir l'Introduction, p. xxui. 



56 LA DÉCOUVERTE 

A la suite de cette pièce est publiée dans la Conspiration anglaise une 
courte note écrite par Lavalette et trouvée chez Dumas ' : « M. Qu- ... est venu 
me faire part de l'intention où vous êtes de donner de nouveaux commandants 
à la cavalerie qui était déjà organisée. »] 

« La pièce n° 24 renferme d'un côté des adresses de deux individus 
avec lesquels Cosse a eu vraiment des affaires ; de Tautre des noms 
écrits au crayon par le prévenu pour des fonctions à remplir dans 
l'organisation du nouvel ordre de choses. 

« La 25*^ contient les mêmes désignations et de la même main. 

« La 26^ est une procuration, etc. 

«... Il est à remarquer que les pièces n°^ 17 jusqu'à 26 se sont 
trouvées dans un petit porte-feuille de maroquin que le prévenu 
reconnaît être à lui et que lui seul a pu ouvrir ; et que ces pièces sont 
en partie les plus précieuses. » 

57. — Les interrogatoires de Dupont-Constant 3. 

(Analyse et extraits.) 

Dupont subit trois interrogatoires, les 2, 5, 14 messidor. Dans le premier, 
après avoir fait connaître ses nom, prénoms, âge, lieu de naissance, domi- 
cile et profession, il répond avec beaucoup d'habileté aux questions que lui 
pose Pierre : il a fondé, dit-il, il y a 15 mois, une société de commerce, comme 
agent de change, avec le citoyen Hilaire Guichard ; mais son associé ne fai- 
sant que compromettre les fonds, la société fut dissoute au bout de deux 
mois. Pendant les deux mois qu'elle a duré, il n'a pas fait l'échange des 
monnaies étrangères, d'Angleterre, Prusse, Espagne, etc., et s'est borné à 
négocier le papier de la place. Il n'a aucune connaissance que son associé 
ait été membre de la société connue sous le nom d'Institut. Il n'est lui- 
même ni membre ni directeur de cette société ; « il n'est d'aucune société, 
vivant isolément avec son épouse et ses quatre enfants. » Il ne connaît pas 
les personnes qui fréquentent sa sœur, la veuve Duval, et ne croit pas qu'elle 
ait jamais reçu chez elle des prêtres réfractaires. Il connaît l'avocat Brochon 
père, parce qu'il était son voisin dans la rue de l'Intendance, il y a un an ; 
alors il le voyait habituellement, mais il ne l'a pas revu depuis trois mois. 
Il connaît le musicien Cosse, parce qu'il était son voisin lorsqu'il habitait 
aux allées d'Albret et parce qu'il est venu deux ou trois fois chez lui « pour 
accorder la guitare de son épouse ». Il n'a pas entendu parler du prêtre de 
Lyon, Lacombe,nideson secrétaire, le citoyen Florac. Il n'a eu que des relations 
d'agent de change avec Dumas, agent de change comme lui, avec son commis 
Lavalette, avec le négociant Papin qu'il a vu à la Bourse ; il ne connaît 

1. L'agent de change dont Lavalette est Temployé. Voir la liste des royalistes dé- 
corés du Brassard, ci -dessous. 

2. Sans doute Queyriaux aîné . 

3. Il me paraît inutile de citer in extenso ces interrogatoii'es qui n'offrent absolu- 
ment aucun intérêt, bien qu'ils soient très longs ; Dupont ne fournit aucune explica- 
tion à la police, assez complaisante d'ailleurs, sur l'intrigue de l'Institut à Bor- 
deaux. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 57 

aucunement le citoyen Brusié. La lettre saisie dans ses papiers, lettre adres- 
sée de Limoges au citoyen Saint-Prix, Américain, rue du Hâ, par le citojen 
Larivière, le 20 nivôse dernier, et annonçant que Larivière fait passer par 
la voie du courrier 3.600 livres tournois à Saint-Prix, lui fut envoyée par ce 
dernier, avec la modique somme de 12 ou 15 francs qu'il lui devait : il 
ignorait le contenu de la lettre. Il n'a jamais entendu parler du citoyen Léon 
et n'est pas entré en relations avec Mn'e de Donnissan-Lescure. Il n'a pas 
connaissance d'un projet « tendant à organiser la monarchie au sein même 
de la République », ni de « quatre commissaires généraux chargés par 
le Prétendant d'inspecter les ci-devant provinces d'Aunis, Gascogne, Péri- 
gord, Landes, etc. » 

Il n'est « pas d'étoffe )) à entrer en rapports avec le duc de Durfort ni 
avec le duc d'Havre. Il n'a pas vu depuis un an le père du citoyen Kirwan, 
qui est propriétaire du journal le Sp éclateur de Bordeaux. On ne peut 
l'accuser d'avoir voyagé en Europe et notamment en Russie, à Mittau, car 
il n'a pas quitté Bordeaux depuis 1795, ni d'avoir de pleins pouvoirs du 
Prétendant, car il ne s'occupe que de faire valoir sa petite fortune (50.000 fr,). 
Il avoue, d'ailleurs, qu'il est l'oncle du citoyen Pierre Dupont, arrêté en 
thermidor dernier, et remis en liberté. 

— Le 5 messidor, interrogé parle commissaire général de la police, Babut, 
il nie connaître l'existence des « compagnies auxiliaires de Bordeaux », 
l'Institut, le serment exigé de ses membres, les réunions clandestines des 
royalistes, les états de l'armée auxiliaire envoyés par les divers cantons de 
Bordeaux, l'organisation des présidents d'arrondissement, de la compagnie 
d'artillerie auxiliaire, l'époque où le complot conçu par l'Institut devait être 
exécuté, la liste des aides et des adjoints de l'arrondissement de Bordeaux, 
MM. Caudeval (Codebal), Durand, Périgord, de Malescot, Tascher de la 
Pagerie, Tristan, Constant, Servant, etc. Il ne reconnaît même pas son 
écriture et sa signature dans la pièce n'^.lO saisie chez Cosse. 

Un seul passage de cet interrogatoire nous intéresse, en ce qu'il peut nous 
aider à connaître le nom du personnage qui a livré les secrets de l'Institut. 

I. — « S'il ne connaît pas un nommé Bayard et s'il n'a pas entendu parler 
d'une indiscrétion commise par quelque sociétaire de l'Institut ? 

R. — <( Qu'il ne le connaît pas; qu'il n'a nulle connaissance delà deuxième 
question. 

I. — « S'il connaît le nommé Clemenceau ? 

R. — « Qu'il en a entendu parler comme d'un fonctionnaire public, mais 
qu'il ne l'a jamais vu. 

I. — « S'il n'a pas entendu parler des difficultés que ferait M. Malescot 
d'accepter la place de commissaire général du roi ? 

R. — « Qu'il l'ignore absolument. » 

Dupont prétend aussi n'avoir aucune relation avec des individus que la 
police regarde comme ses agents en dehors de Bordeaux : M. de Saint-Laurent, 
Latour, à Pessac, Pénicaud à Mérignac, le marquis de Lansac à Bazas, de 
Luccemond, ancien capitaine de cavalerie, à Martillac '. 

— Nouvel interrogatoire, le 14 messidor. La police avait interrogé le 

1. Je ne vois que Latour parmi les membres du Brassard. 



58 LA DKCOUVERTE 

traiteur Pouget, chez lequel les conspirateurs se réunissaient, et son inter- 
rogatoire, « quoique négatif », pouvait être intéressant pour l'instruction 
de cette affaire. Elle avait saisi chez Dupont des pièces dont deux au moins 
avaient attiré son attention : l'une, tableau des citoyens composant la 
compagnie n«^ 5 du 7e bataillon du centre ; l'autre, contenant des chiffres 
(106.888 fr. 50) et aussi des mots en abrégé, indiquant vraisemblablement les 
dépenses que les 106.888 fr. avaient servi à payer, impressions, appointe- 
ments et salaires, cannes, etc. 

Dupont se contredit dans quelques explications qu'il fournit sur un dîner 
qu'il avait donné chez Pouget récemment. Il affecta d'ignorer le nom des 
personnes qu'il avait invitées, en réduisit le nombre, prétendit que le citoyen 
Sabès, militaire [un des organisateurs de l'armée de Papin] *, avait été amené 
à ce dîner par un de ses amis. Ses explications sur les deux pièces saisies 
chez lui présentèrent aussi peu de vraisemblance. 

Ne retenons de cet interrogatoire que le passage suivant, intéressant, car il 
nous fait connaître les personnes que la police soupçonnait de connivence 
avec Dupont. 

I. — « S'il ne connaît pas les citoyens Latour, pharmacien aux Chartrons; 
Alexandre 5cr/;n'n, rue Sainte-Thérèse, n" 17, aux Chartrons ;Sa&ès, rue Brutus, 
nf> 5 ; Lelellier, rue Saint-Seurin ; Tavernier, rue Désirade ; Marcarteau, rue 
Castelnau ; Speau^ rue Sainte-Catherine ; Lamarqiie , marchand de vins aux 
Chartrons ; Planette, rue Rotaillon ^, et s'il ne s'est pas trouvé quelquefois 
avec ces individus, soit chez lui, soit chez aucun d'eux, soit ailleurs. 

R. - - « Qu'il connaît les citoyens Latour, Sabès et Letelliery mais qu'il 
ne connaît aucun des autres et qu'il ne s'est pas trouvé soit chez lui, soit 
chez aucun des trois individus qu'il vient de nommer, soit ailleurs avec eux, 
si ce n'est qu'il a quelquefois acheté des drogues au citojen Latour, pharma- 
cien, pour un de ses enfants qui était malade. » 

(F' 6256.) 

58. — Interrogatoires de Cosse, 4-6 messidor VIII. 

(Analyse.) 

Le musicien Cosse se renferme comme Dupont dans un système de déné- 
gation absolue, mais il est moins habile, et ses réponses manquent parfois 
de vraisemblance. 

Dans son /er interrogatoire cependant (4 messidor), il répond avec assez 
d'aisance aux questions que lui pose le secrétaire général de police, Babut. 
A-t il fait des voyages depuis un an? — Un seul à Agen, pour trouver des 
leçons dans les pensionnats. — N'a-t-ilpas reçu des lettres à son adresse ou 
sous des noms convenus pour les distribuer à d'autres personnes ? — Il ne 
reçoit de lettres que de son frère et très rarement — Ne s'est-il pas occupé 
d'entreprise d'équipement ou d armement ? —Jamais. — De « propager 
l'instruction dans la ville ou dans la campagne »? — Encore moins. — De 
colporter des journaux ? — Pas davantage. 

1. Voir Introduction, p. xxii. 

2. Voir Latour, Seguin, Lamarche, Planet, parmi les royalistes décorés du Bras- 
sard et Letellier parmi les membres de la Légion d'honneur. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L AN VIII 59 

Connaît-il l'Institut, les conditions d'entrée dans la société, le lieu de 
réunion, les membres, les commissaires généraux, les chefs, comme Lacombe 
ou Florac, l'organisation militaire, etc. ? — Non ; il a simplement entendu 
parler de l'Institut, mais pas depuis cinq ou six mois. — Babut cite plu- 
sieurs personnes soupçonnées d'en faire partie. — Il a entendu parler d'elles : 
de Brochon comme avocat, de Papin comme militaire, de Magnol comme 
amant de la comédienne Latapy, mais il n'a pas de relations avec elles. 
Il a vu Dupont en voisin ; il est allé chez lui pour accorder la guitare 
de sa femme 

Mais dans son second interrogatoire, 6 messidor, il lui est plus difficile 
d'expliquer la provenance ou le sens des pièces trouvées chez lui. Il refuse 
de reconnaître comme lui appartenant les principales (p. ex. n'^s 14, 17, 18, 
19 20 21, 24, 25), celles qui intéressent surtout la société dont il est 
membre, sous le prétexte qu'elles ont été introduites dans le paquet qui 
renfermait ses papiers, par une ouverture qu'il fait constater. Mais il ne 
peut nier qu'il ait écrit la plupart des autres. Aussi prétend-il qu'elles n'of- 
frent aucun intérêt: ce sont des chansons ou des rapports d'une loge maçon- 
nique dont il est membre ; ou c'est la copie d'un papier manuscrit tout déchiré, 
qu'il a trouvé rue Sainte-Catherine (pièce n° 3, Discours sur l existence de 
Vlnstitut des Amis de l ordre ; ou c'est le tableau d'une compagnie de 
garde nationale dont il était sergent-major en 1790-1791 (pièce n** 9), etc. Il 
termine son interrogatoire en déclarant qu'il a été « l'un des plus em- 
pressés à signer la Constitution de l'an VIII » . 

G. — LES RAPPORTS DE PIERRE ET LA DÉCLARATION d'ÉDOUARD 

59. — Premier rapport du commissaire général de police Pierre 
au ministre de la police, 7 messidor an VIII (26 juin 1800). 

(Extrait.) 

... « J'ai fini depuis hier soir d'interroger les prévenus. J'ai 
examiné une très grande partie des papiers saisis chez eux. Ceux 
qui restent ne me paraissent pas bien importants. Il en résulte que, 
dans leur interrogatoire, ils ont adopté un système de dénégation ; 
que les papiers trouvés chez Cosse, musicien, coïncident parfaite- 
ment avec les instructions que vous m'avez transmises. Quelques 
lettres originales dont les dates sont d'avril, mai, juin derniers, deux 
états de l'armée auxiliaire des cantons de Castres, Saint-Médard 
d'Eyran de la Gironde, des notes informes contenant des noms, 
prouvent lexistence d une société d'Inslitut à Bordeaux, dont ils 
renvoient cependant rétablissement à l'époque du 18 fructidor 
an V, de commissaires du roi, de présidents d'arrondissement, 
d'aides et d'adjoints chargés de diriger l'opinion publique et le mou- 
vement, la formation de compagnies, et notamment d'une artillerie. 

« L'évacuation de Gènes paraissait être l'épociuc choisie par les 
chefs pour frapper le grand coup. Mais on se plaint du petit nombre 



60 LA DÉCOUVERTE 

d'enrôlés, de l'apathie et de l'inactivité des aides et adjoints, du peu 
de dévouement du peuple ; leur remplacement par des hommes 
dévoués, plus amis de leur devoir, est réclamé. 

« Cependant on pense que la présence d'un prince ébranlerait tout. 

« Une des lettres, sous la date du 8 juin 1800, offre le nom de 
Servan * et, d'après les renseignements qu'on suppose demandés par 
ce dernier, je pense qu'on a voulu désigner le général de ce nom, 
commandant la 20^ division militaire. 

« Il serait peut-être essentiel de saisir les papiers de Labriac, à 
Soumensac, département de Lot-et-Garonne. Sa maison était le 
quartier général de Servan, et Ton sait que cet homme lui est tout 
dévoué et qu'il a fait un voyage, il y a quelques jours, à Bordeaux, 
dans l'intérêt de ce général. 

(( Enfin, C. ministre, pour vous mettre à même d'avoir une idée de 
cette affaire, je vous fais passer ici neuf pièces sous les n°^ 1, 5, 4, 
2, 14,17, 18,19,21,22,23. 

« Rien n'a présenté Brochon comme complice... 

« Les papiers de Papin n'ont rien présenté sur la prévention de 
conspiration et de correspondance avec les ennemis extérieurs. Il est 
toujours absent. 

(( Le rapport général vous fixera sur le sort des autres prévenus. » 

(F' 6256.) 

60. — Second rapport de Pierre au ministre. 

« G. Ministre, — Il était difficile de penser que, sous le gouverne- 
ment qui régit la France depuis le 18 Brumaire, l'on pût compter de 
véritables conspirateurs contre lui. Cependant rien de plus certain 
que l'existence matérielle d'un complot dont le but était le renverse- 
ment de la République pour y substituer un roi. Le dépouillement 
des pièces saisies chez les prévenus arrêtés à Bordeaux, en exécution 
de vos ordres du 29 prairial dernier, les renseignements acquis sur 
cette trame ourdie par l'étranger, le caractère et les principes connus 
de quelques-uns de ceux qui figurent dans ce plan, les tentatives de 
séduction, de corruption, qui ont été vainement employées, tout, en 
un mot, malgré le système de dénégation adopté par les prévenus, 
prouve que les royalistes s'étaient réunis et organisés à Bordeaux 
sous le nom d'Institut des Amis de Tordre ; que cette ville était 
divisée en quatre arrondissements dont les présidents étaient chargés 
de recevoir ceux qui s'agrégeaient à cette association ; qu'il existait 



1 . Le nom philanthropique de Papin (Servant) avait été choisi sans doute à 
dessein pour compromettre l'ancien ministre de la guerre, qui commandait à cette 
époque la 20^ division, au moins pour dérouter la police. Le général Servan 
accusé se défendit avec vigueur. On trouve sa lettre dans F' 6256. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 61 

des subdivisions, des aides et adjoints qui, en l'absence des prési- 
dents, remplissent leurs fonctions ; qu'un commissaire du roi diri- 
geait ce plan ; que des compagnies d'élite, de ligne, de cavalerie, 
d'artillerie, étaient organisées et généralement armées de fusils, 
pistolets et sabres ; que le parti avait de l'argent et en avait exacte- 
ment reçu ; que les noms de guerre et de convention déguisent les 
véritables noms des agrégés ; que des signes et des mots de rallie- 
ment étaient établis pour reconnaître entre eux les membres de cette 
association ; que des rassemblements ont eu lieu chez Pouget, trai- 
teur, où des compagnies ont été passées en revue ; que le projet 
était, au signal convenu, de s'emparer, au nom du gouvernement, 
et sous prétexte de comprimer les jacobins, du commissaire général, 
du Château-Trompette, et d'arborer ensuite, quelque temps après, 
le signal de la révolte ; que Bordeaux ne devait agir que lorsque les 
descentes particulières ou générales des Anglais auraient eu lieu sur 
nos côtes et que les départements circonvoisins se seraient montrés ; 
que le pillage devait avoir lieu ; que des quartiers et des maisons 
étaient désignés et qu'un tiers au moins de ce parti était composé 
d'hommes qui, par leurs principes et leurs habitudes, étaient disposés 
à exécuter cette indigne violation des propriétés. 

« Déjà j'avais découvert les traces de ce complot dont je dési- 
rais m'assurer de la réalité, lorsque vos ordres me sont parve- 
nus et ont justifié la certitude des renseignements que j'avais 
acquis. 

« Cependant il paraît toujours que cet Institut est une branche de 
la société philanthropique découverte en l'an V, que grand nombre 
de sociétaires qui, de bonne foi, voulaient s'opposer au rétablisse- 
ment de la Terreur, sont aujourd'hui à leur insu compromis par les 
agents actifs de la contre-révolution qui n'abandonnent jamais leurs 
délirants projets de renverser la République et ont profité de cette 
institution, des règlements, des ordres et de l'organisation établie 
pour exécuter leur infâme dessein. 

« Les lettres saisies chez Cosse prévenu, sous les dates du mois 
d'avril, mai, juin, vieux style, les notes qui s'y trouvent, en prou- 
vant la justesse de ces observations, contiennent des plaintes faites 
par le chef sur l'inactivité des agents civils établis par lui, sur le 
petit nombre d'enrôlés que présentaient les tableaux de l'armée 
auxiliaire de Bordeaux et des cantons environnants, sur l'insou- 
ciance et l'apathie du peuple à seconder le mouvement (|ui devait 
ramener la Royauté. La pénible situation des armées, le succès 
passager de l'ennemi, avaient enhardi l'audace de ces incorrigibles 
conspirateurs. Déjà, dans leurs criminels projets, le sol de la Répu- 
blique était foulé par d'insolents vainqueurs ; déjà hi l^épublique 
était anéantie ; déjà leurs vœux étaient accomplis à révacuation de 



62 LA DÉCOUVERTE 

Gênes, époque que, dans leur délire contre-révolutionnaire, ils 
avaient choisie pour frapper le grand coup. 

« Mais il est vrai de dire que beaucoup d'hommes qui, il y a un an, 
soupiraient après l'ordre et la paix, sont, depuis le 18 Brumaire, 
tout dévoués au gouvernement juste, modéré, vainqueur et bientôt 
pacificateur qui dirige la République ; que l'exécution de leur trame 
ourdie par l'étranger n'eut pas été complète ici : aussi la découverte 
et l'arrestation des prévenus de ce complot ont fait une grande 
sensation. On ne pouvait y croire. 

« Généralement on espère et on compte beaucoup sur la clémence 
qu'amène la victoire, la justice el la paix ; on pense que, quoique la 
trahison soit mise à découvert, le gouvernement triomphateur des 
nombreuses cohortes de l'ennemi, foulant aux pieds cette malheu- 
reuse entreprise, en deviendra plus cher aux Français par le carac- 
tère de grandeur et de magnanimité qu'il déploiera en cette circons- 
tance .. » 

(F' 6256, publié dans VEssai de Dupont-Cons- 
tant. Voir la suite dans cet Essai.) 

61. [Thermidor an Vllt]. Déclaration d'Edouard \ 

(Extrait.) 

(( Le citoyen Edouard a l'honneur de prévenir le gouvernement de 
la République française, et particulièrement le C. Bonaparte, 
premier consul, qu'il existe une conspiration contre la chose pu- 
blique. 

« Pour faire agir et exécuter tous ses odieux projets, l'Angleterre 
a déjà donné, rien que pour la partie du Dauphiné, Provence, Lan- 
guedoc, Vivarais, Gévaudan et Cévennes, une somme de quatre 
millions que le cit. Duport le jeune, banquier à Lyon, a reçue et 
payée sur les mandats des principaux agents commis pour cela... 
Ces principaux agents sont le général Willot, le général Pichegru. 
Ces deux généraux ont été faits lieutenants-généraux par Louis XVIIL 
Le général Willot a le commandement du Dauphiné, Provence, 
Languedoc, Vivarais, Gévaudan et Cévennes. Le général Pichegru a 
celui de toute la partie du côté de Bordeaux. Je crois ce dernier 

1. Edouard, dit « l'infâme Caroline ». Il se nommait en réalité Fernand Pelage 
Duclos de la Morlière. Né à Istre (Bouches-du-Rhône), lieutenant aux gardes du 
corps du roi avant la Révolution. En 1800. il était l'agent de Puivert et de Willot. 
Edouard commença à cette époque (thermidor an VIII) à livrer le secret de l'intrigue 
du Midi. Ce sont ses déclarations qui ont fait arrêter l'abbé Rougier, agent de 
Puivert à Gap (1800), et Puivert lui-même il804). L'abbé Rougier fut enlevé par une 
bande d'hommes masqués qui le délivra ; mais, certain d'être repris, il se remit 
entre les mains de la police et fit des aveux qui contribuèrent aussi à l'arrestation 
de Puivert à Paris. Celui-ci, comme le comte de Noyant, garda le silence ; mais 
la police le retint longtemps en prison. Voir son Livre déraison. Revue de Paris, \ c. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 63 

déjà arrivé, mais caché aux environs de sa destination. La Vendée 
doit se rallumer au même moment que les autres points commence- 
ront les hostilités, ainsi que Lyon, le Beaujolais, le Forez, etc., aux 
ordres de Precil (sic) [Précy] qui doit aussi être à Lyon, mais caché. 
Il existe à Lyon un comité de régence à la tête duquel sont les 
nommés M. deFlorac^M. de laChassagne^ et autres que je ne 
connais pas. Le secrétaire de ce comité de régence est un nommé 
M. Manem, connu sous le nom de Magnen, ancien capitaine de 
dragons. Il correspondait avec toutes les agences de Marseille, 
Avignon, Gap, Digne et autres. 11 a appris dernièrement qu'on avait 
arrêté les agents de Bordeaux. En conséquence, il a mis ordre à ses 
papiers et s'est caché par précaution. 

« A Gap, il y a un nommé l'abbé Rougier-^, qui est un des agents 
principaux. Il a beaucoup d'argent dans une cache, des papiers, des 
instructions, des magasins de poudre, de blé, de farine, de fusils. 
Son adresse est « au cit. Tronchon, ouvrier chez le cit. Rougier, 
chef de l'atelier d'armes à Gap », et, lorsqu'il écrit, il se signe 
Alexandre. 

« Ensuite il y aie marquis de Puitvers* fs/c), fils d'un ancien prési- 
dent au parlement de Toulouse. Son adresse est « au cit. Roger ». Il 
n'a point de demeure fixe. Tantôt il est à Gap, tantôt à Digne, à 
Seyne, à Manosque et à Marseille, où je le soupt;onne à présent. 
Sa signature, lorsqu'il écrit, est Picot. 

« Lorsque dans la correspondance on parle du général Willot, on 
le désigne sous ces mots : « Mon oncle ». Ses deux noms d'adresse et 
de signature sont Pansard et Ménard... 

« Au comité de régence à Lyon, il y a un nommé Willems, qui 
est rhomme de confiance, et un nommé FrancouP, qui fait des 
recrues... 

« Le général Willot a deux régiments piémontais à ses ordres que 
le roi lui donne... Le duc de Berry doit venir sous ses ordres avec 
une partie de l'armée de Naples. Le prince de Condé débarquera en 
Languedoc avec son armée... 

« Le général Pichegru débarquera à Bordeaux (je ne connais pas 
ses moyens), et le comte d'Artois en Vendée, avec le duc d'Angou- 
léme, et à Lyon M. de Precil [Précy] ^ doit agir en même temps. 



1. M. de Floirac, voir Introduction, p. 13, et d'Haulerive, La Police secrète, n° 12L 

2. Agent royaliste du Lyonnais. Voir Conspiration de Pichegru^ p. 130 

3. Voir d'Hauterive, n<^» 121, 139. Sources, 0258 à G2(>0. 

4. Voir, sur Puivert, d'FIauterive, surtout les »«» 121, 351, etc. Sources, F,, G256, 
6258. 

5. Voir sur Francoul, principal agent de Willot, après 1800, en Provence, d'Hau- 
terive, n«» 114, 115, 172, 190. Sources. F, 6259, 6440, 6448. 

6. Voir sur Précy (L.-Fr. Perrin, comte de), défenseur de Lyon, la Trahison de 
Pic/iegru (consulter l'index), et d'Hauterive, n<» 332,11420, 1611. Sources. F7, 6268à6260. 



64 LA DECOUVERTE 

« Le chevalier de Revel,filsdu comte de Saint-André*, doit servir 
dans cette armée, sous les ordres de Willot. » 

(F' 6258.) 

62. — 13 thermidor an VIII. Lettre de Desmarets ^ à Pierre. 

(Minute.) 

« Il m'est parvenu, citoyen commissaire, divers renseignements 
sur un plan général de soulèvement des côtes et des frontières com- 
biné avec les mouvements des flottes anglaises. 

« Ces renseignements ne sont pas aussi précis ni aussi authen- 
tiques que ceux que je vous ai transmis sur l'Institut. Il suffit donc 
de les suivre avec attention, d'approfondir les faits, et de prendre 
ensuite, s'il y a lieu, toutes les mesures que la sûreté publique exige- 
rait. 

« Pichegru, lieutenant-général pour le roi, doit prendre le comman- 
dement de Bordeaux et provinces environnantes. On le croit même 
déjà à sa destination et entré du côté de Bordeaux. Des fonds ont été 
versés à Lyon pour les opérations, et le banquier Duport jeune paye 
sur les mandats des principaux agents. 

(( Le parti de Pichegru correspond avec Willot, son collègue en 
Provence, etc. 

« Willot est désigné dans la correspondance par les mots « mon 
oncle ». Son adresse et sa signature sont Pansard et Ménard. 

« Les agents se servent pour correspondre de diverses encres 
blanches dont je vous transmets la recette et le moyen de faire ressor- 
tir les caractères. 

« Je vous recommande en même temps de veiller sur les démarches 
d'un nommé Vassal de Puvert, chef chouan amnistié, qui vient 
de partir pour Bordeaux. Il a fait délivrer ici beaucoup de faux 
certificats d'amnistie, et j'ai lieu de croire qu'il est chargé de 
mission pour votre ville ou dans le département où il doit prendre 
un commandement. 

« Il est inutile de vous recommander de vous concerter avec le 
préfet. » 

(F' 6258.) 

63. — Pierre répond à Desmarets le 9 août. 

(Extrait.) 

... « Je ferai surveiller les démarches du nommé Vassal Purcet 
(sic), chef de chouans amnistié, que vous m'annoncez être parti pour 
Bordeaux et qui est ici depuis trois jours. 

1. Voir sur Saint-André d'Hauterive, n» 121. 

2. Cette lettre fixe la date de la précédente, car elle a été certainement écrite 
^près. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 65 

« Mais comment se fait-il qu'on enlève de Bordeaux la seule troupe 
destinée à la police, pour aller sur les côtes, lorsqu'on présume que 
Pichegru doit prendre le commandement de Bordeaux ? » 

{Ibid.) 

D. — l'élargissement des prévenus ; optimisme officiel. 

Dès l'envoi de son rapport au ministre de la police, le commissaire 
général Pierre conseillait la clémence à l'égard des prévenus. Il écrivait au 
frère du premier consul, Lucien Bonaparte, le 25 messidor : 

« Je te fais passer sous ce pli une copie de mon rapport envoyée à 
Fouché sur les arrestations faites par nos ordres. Je l'invite à y 
prêter son attention, et je crois que la clémence sera la plus belle 
punition que pourra se permettre le gouvernement iuste et fort. En 
déjouant la trame de nos ennemis, nous en avons arrêté l'exécution. 
Pardonnons-leur en républicains généreux et contentons-nous de 
les surveiller. » 

{Essai, p. 221-222.) 

De son côté, le préfet Thibaudeau engageait le premier consul à la clé- 
mence. Les prévenus multipliaient les pétitions, protestaient de leur inno- 
cence. [Voir leurs lettres dans F, 6256, par exemple la pétition du 9 fructidor 
an VIIL] On met en liberté d'abord Maignol, propriétaire du Médoc, arrêté 
à Paris le 8 messidor, car on l'avait confondu avec l'ex-chevalier Magnol; puis 
Dupouy et sa femme, les femmes de Cosse et de Dupont, la sœur de ce der- 
nier, veuve Duval, l'agent de change Dumas, etc. 

On garda en prison Lavalette, Cosse et Dupont. Mais ces derniers, après 
l'élargissement des autres, assurés de l'appui de Pierre, réclamèrent avec 
plus d'énergie leur liberté : lettres au ministre du 15 germinal an Vlll, du 
28 thermidor an IX, du 1er frimaire an IX. Le commissaire Pierre intercéda 
lui-même en faveur de Dupont, malade, pour ol)tenir sa liberté sous caution, 
2 fructidor an IX. Le 8 frimaire an X, la police du quai Voltaire fit un rap- 
port à Fouché au sujet de cette mise en liberté sous caution. Elle conclut en 
faveur de l'élargissement. Le 22 frimaire an X, Pierre annonçait au ministre 
qu'il avait mis en liberté provisoire sous caution Dupont, Cosse et Lavalette. 
Il joignit à la lettre leur serment de fidélité à la Constitution, daté du 17 fri- 
maire. Cosse, Lavalette et Dupont avaient quitté la prison, le 16 frimaire. 

Mais ils restaient sous la surveillance de la police. Le l^*" fructidor an X, 
ils réclamaient la levée de leur surveillance; le 14 fructidor, Pierre intercédait 
en leur faveur; le 27 pluviôse an XI, même requête de Dupont : il veut, dit- 
il, partir pour Saint-Domingue; Fouché l'y autorise, le 28 ventôse. Mais 
la guerre avec l'Angleterre éclate et Dupont ne peut partir pour Saint- 
Domingue. 

Il demande alors à se rendre à Paris, 27 fructidor an XII, V.) vendémiaire 
an XIII : sa famille est partie pour Paris, y tient un petit commerce ; il veut 
la rejoindre. Le commissaire Pierre appuie encore sa requête, le 7 nivôse 



66 LA DÉCOUVERTE 

an XIII. Nouvelles sollicitations de Dupont, le 14 germinal an XIII, le 
6 floréal; ou de sa femme, domiciliée à Paris, rue Feydeau, n» 238, 4 prairial. 
Enfin rapport favorable de la police secrète au ministre, le 15 messidor 
an XIII. Mais on réclame à Dupont une caution : c'est le notaire De La Ville 
qui la fournit. On l'autorise enfin à partir, le 7 thermidor an XIII. 

64. — Extrait des Tablettes de Bernadeau, 16 frimaire an X. 

« On a mis hier en liberté Gausse, Dupont • et Lavalette, détenus 
depuis 17 mois à Bordeaux pour cause de conspiration contre le 
gouvernement républicain et accusés d'être les principaux agents 
d'un parti qui s'était formé sous le nom de Fils légitimes et qui 
s'était secrètement armé et organisé pour faire un coup de main au 
besoin. Les preuves ont manqué aux fortes présomptions, mais ce 
hors de cour ne les disculpe pas : Quot libérât notaty dit-on en 
droit. 

(Bibliothèque municipale, Collection hérédi- 
taire de mes œuvres : tablettes.) 

65 . — Extraits des Comptes moraux 2 du département 
rédigés conformément à la circulaire du ministre de la 
police générale du 25 messidor an X. 

Compte moral pour le 2^ semestre de Van X. 

Esprit public. — « Le plus grand calme règne partout et particu- 
lièrement à Blaye, à Libourne, et dans l'arrondissement rural de 
Bordeaux. Partout on est las des révolutions. On ne s'occupe plus 
d'affaires publiques; on ne lit plus de journaux; chacun se contente 
et ne songe qu'à réparer sa fortune ou qu'à l'accroître. On ne peut 
se dissimuler qu'il existe à Bordeaux quelques têtes échauffées à qui 
tous les actes du gouvernement ne plaisent point. La grande majo- 
rité, qui toujours donne le ton et entraîne les dissidents en dépit 
d'eux-mêmes, se félicite du repos dont elle jouit. » 

Compte moral pour le P^ trimestre de Van XL 

Esprit public. — « On s'accorde en général sur un point, c'est que 

1. Voir sur la fin de la vie de Cosse et de Dupont les notes de l'introduction. 

2. Appelés comptes moraux ou de situation, ces documents forment une forte 
liasse de la série M des Archives départementales de la Gironde, intitulée : arrêtés 
du préfet, imprimés, rapports du piéfet sur la situation du département, 1802-1809. 
— Le compte moral est rédigé à partir de l'an XI par trimestre, pour la fin de 
l'an X par semestre ; il est divisé, suivant les instructions envoyées par le ministre 
de la police, le 5 fructidor an X, en 6 chapitres : sûreté publique, subsistances, 
commerce, cuhes, police personnelle, esprit public, observations particulières. — 
Les Archives ne possèdent que les minutes de ces rapports de Delacroix, préfet 
après Thibaudeau et Dubois, et de ses successeurs ; ces rapports furent rédigés 
sans doute par un chef de bureau de la préfecture. 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 67 

le repos et la tranquillité dont on jouit sont mille fois préférables 
aux guerres extérieures et domestiques sous lesquelles on a si long- 
temps gémi. Dans un pays que le commerce rendit florissant, tous 
les vœux ont sa prompte restauration pour objet. Il est utile que 
vous n'ignoriez pas... que la ville de Bordeaux a des ennemis... Les 
Bordelais sont, en général, doux, sociables, humains. Un tel carac- 
tère est ennemi des agitations. Je dirai plus : quand ils auraient le 
génie inquiet et remuant, les opérations commerciales auxquelles 
ils sont entièrement livrés leur feraient un indispensable besoin de 
calme et de repos... 

« L'opinion se rattache au gouvernement. » 

Compte moral pour le 2^ trimestre de Van XL 

« L'esprit public est bon : on s'attache de plus en plus au gouver- 
nement... » 

Compte moral pour le 3^ trimestre de l'an XL 

Esprit public. — « Le gouvernement est aimé ; on lui tient grand 
compte des sacrifices qu'il a voulu faire pour éviter une rupture 
avec les Anglais. Tant d'avances insolemment méprisées devaient 
réveiller l'orgueil national. Ici plus particulièrement qu'ailleurs on 
s'est facilement résigné à la dure nécessité de combattre, et quand 
le gouvernement a fait entendre qu'il fallait des moyens extraordi- 
naires, la Gironde ne s'est souvenue de ses énormes sacrifices pour 
le triomphe de la liberté que pour ne point manquer à elle-même 
quand il s'agit de conquérir celle des mers. Elle oftVe au gouverne- 
ment 1.000.000 francs pour la construction de chaloupes canon- 
nières et d'un vaisseau de premier rang. » 

Compte moral pour le ¥ trimestre de lan XL 

Esprit public. — « Il est généralement bon, malgré la détresse où 
la guerre maritime réduit les habitants de la Gironde. La haine 
publique s'accroît tous les jours contre le peuple violateur des 
traités. Elle vit dans tous les cœurs. Quelque dillicile que paraisse 
l'expédition projetée par le premier consul, on l'a vu exécuter des 
plans si difficiles, si glorieux, qu'on ne doute plus de celui qui doit 
les couronner tous. » 

Compte moral pour le t" trimestre de Van XIL 

Esprit public. « — Le gouvernement est respecte ; ses volontés ne 
trouvent plus d'entrave. On applaudit aux clVorts qu'il fait pour 
triompher du perfide ennemi de notre commerce et de la liberté des 
merS. Le résultat de ce grand mouvement est attendu avec une 
impatience mêlée d'inquiétude. Si le sort favorise l'expédition à 



68 LA DÉCOUVERTE 

laquelle le génie préside, il sera impossible d'ajouter à l'enthousiasme 
qu'inspirera le premier consul. » 

Compte moral pour le 2^ trimestre de Van XII. 

Esprit public. — « Tous les vœux sont pour le gouvernement 
actuel, soit à cause du bien qu'il a fait et de celui qu'on en attend, 
soit pour éviter les crises révolutionnaires inséparables d'un nou- 
veau changement. Cet esprit se manifeste dans toutes les occasions... 
Toutes les allusions auxquelles donne lieu la représentation des 
pièces dramatiques sont saisies avec avidité, surtout quand elles ont 
trait à notre situation par rapport aux Anglais. La punition de ce 
peuple tyrannique et perfide est attendue avec impatience. Il n'est 
point de ville qui vît perdre aux Anglais avec plus de satisfaction le 
trident des mers... 

(( L'arrestation de Moreau, couvert de gloire, ne fut pas générale- 
ment applaudie. On aimait à douter. Mais celle de Pichegru fut un 
trait de lumière qui frappa tous les yeux. Leurs complices successi- 
vement arraches des divers asiles où ils se tenaient cachés, l'inter- 
ception de la correspondance de l'ambassadeur anglais à Munich, 
le développement successif des plans de conspiration, ont changé 
en mépris l'estime que s'était acquise l'un de nos plus grands géné- 
raux. » 

Compte de situation pour le 3^ trimestre de Fan Xll. 

Esprit public. — ... « Quant aux opinions sur la forme actuelle de 
gouvernement, il est difficile d'en faire un tableau bien exact. Les 
habitants de Bordeaux applaudissent du plus profond de leur cœur 
aux améliorations qui viennent de s'opérer. Elles exciteraient leur 
enthousiasme si la paix rendait au commerce son ancienne acti- 
vité. » 

Compte de situation pour le P^ trimestre de Van XIII. 

Esprit public. - «Toute l'attention publique s'est portée pendant 
ce trimestre au couronnement de l'empereur et au voyage de Sa 
Sainteté en France. L'esprit qui anime la généralité des citoyens est 
bon. On ne craint plus le retour des désordres qui ont accompagné 
la Révolution. L'hérédité de l'empire mettra la nation à l'abri de ces 
crises terribles dont le souvenir cause tant d'amertume. » 

Compte de situation pour le 2*^ trimestre de Van XIII. 

Esprit public. — « La plus profonde tranquillité régne sur toute 
retendue du terrain. Il ne reste pas le moindre germe de rébellion à 
Sainte-Foy qui fut, en l'an VII, un théâtre d'horreurs, ni à Lesparre 
où s'était formé, en l'an IX, un plan de conspiration royale... 

... « C'est à tort qu'on a accusé la jeunesse bordelaise d'avoir fait 
des allusions malignes dans les spectacles . » 



DU COMPLOT BORDELAIS EN L'AN VIII 69 

Compte de situation pour le 3^ trimestre de Fan XIII. 

Esprit public. — « On se réunit, on se presse autour du chef 
suprême de Tempire. Toutes les espérances reposent sur son génie, 
qui paraît maîtriser les événements. Ses succès inespérés ont détruit 
le préjugé assez généralement répandu que nous n'aurions jamais la 
paix, et déjà le négociant, humilié du repos sous lequel il languit, 
brille d'envoyer ses vaisseaux sur les mers. » 

Compte de situation pour le 4*= trimestre de l'an XIII. 

(( L'esprit public, pendant le trimestre qui a terminé Tan XIII, a 
été dans un état peu satisfaisant, sans qu'on soit en droit d en.témoi- 
gner de la surprise. On voyait évanouir le grand projet d'une 
descente chez la plus implacable ennemie de la Gironde ^ Une nou- 
velle coalition, prête à embraser le continent, éloignait jusqu'à 
l'espérance de la paix, cette paix après laquelle soupire l'industrie 
enchaînée. 

« Mais l'espoir s'est ravivé depuis qu'on a vu cette odieuse coalition 
dissoute presque aussitôt qu'organisée. Je ne pourrais peindre avec 
quelle impatience on attend le héros pour le voir bientôt s'élancer de 
Boulogne sur l'île d'où sortent tant de calamités publiques et parti- 
culières. » 

1 . Surtout après Trafalgar. 



CONCLUSION 



L'INSTITUT APRES LE COMPLOT DE 1800 

* JUSQU'A L'ENTRÉE DES ANGLAIS 

ET DU DUC D'ANGOULÊME A BORDEAUX (12 Mars 1814) 



A. -~ l'institut et le complot de 1804. 

Dans ce temps d'apparente tranquillité, une nouvelle conspiration philan- 
thropique s'organisait à Bordeaux. M. Daudet l'a racontée dans la Police et 
les Chouans : V Agence anglaise de Bordeaux, p. 141 à 163. 

En août 1804, la police de Fouché recevait une lettre du préfet de Nantes 
annonçant la réapparition, dans le Bocage, de chouans regardés comme 
redoutables : Forestier, Géris, Bertrand Saint-Hubert, et la découverte 
d'un dépôt de plomb chez le curé de la Guyonnière, l'abbé Jacqueneau. Les 
préfets de la Gironde et des Deux-Sèvres dénonçaient les fréquents voyages 
de Louis de la Rochejaquelein. Les déclarations de quelques prévenus arrêtés 
à la suite de ces rapports, celle du médecin Gogué (arrêté à Bordeaux avec 
Bertrand Saint-Hubert), celle du trésorier du complot, Daniaud-Duperrat, 
révélèrent les voyages à Bordeaux de Forestier et de Géris et l'existence d'une 
agence royaliste, dans cette ville, agence dont trois membres de l'Institut, 
PapinS Acquart-Vreilhac, Roger 2, recevaient des fonds de l'Angleterre 

1. Papin, à la nouvelle de la découverte du complot de 1800, s'était enfui à 
Paris, où grâce à l'appui de ses amis, Lannes, Augereau, Moncey (chez lequel il 
logeait), il obtint de ne point passer en jugement. Il fit même des promesses de 
dévouement au premier consul. 

Revenu à Bordeaux, il recommença ses intrigues et ce fut lui qui servit d'inter- 
médiaire entre Forestier et Géris, en 1804, et les membres de l'Institut de Bordeaux 
qu'on voulut instruire du nouveau complot. Il fit loger Géris et Forestier chez 
Acquart-Vreilhac. Voir l'Introduction, p. xix, xxn, xxvn. 

2. Jean Baptiste Augustin Roger (né en 1770), fils aîné du fondateur de la maison 
Marie Brizard et Roger [fondée vers 1764 par Marie Brizard et le gendre de son 
frère Martial Brizard, Jean Baptiste Roger]. Roger, membre de V Institut avant 1800, 
comme Acquart (Cf. Mémoire historique p. 17, Rollac, p. 212 et M'ue de La Ro- 
chejaquelein, p. 231), fut arrêté, le 3^ jour complém. an XII, parvint, grâce aux 
démarches de sa mère, à obtenir un acquittement, bien qu'il eût reçu d'importantes 
sommes de Géris. (Gf. d'Hauterive, n^^ 293, 338, 363, 387, 433, 461, 515, 520.) Il 
vécut en surveillance à Bayonne jusqu'à la fin de l'Empire. La maison Marie 
Brizard et Roger fut continuée par ses frères Augustin et Théodore. [Communiqué 
par M. Harlé.l 



CONCLUSION 71 

par un banquier de Madrid, Diego Carrera, qui faisait des traites sur 
Bethman de Bordeaux et Batbédat de Bayonne. Acquard-Vreilhac avait logé 
chez lui Forestier et Céris ; il avait pour complices des membres de l'ancien 
Institut qui voulaient faire insurger les départements du Sud-Ouest, sous le 
commandement de Papin et du duc de Lorges, comme en 1800. 

Par jugement du 14 décembre 1805, à Nantes, Céris, Forestier, Papin, 
Gogué furent condamnés à mort, Acquart-Vreilhac à la détention ; Roger fut 
acquitté. Gogué fut seul exécuté, les autres s'étant enfuis. 

66. — Paris, l^"" jour complémentaire an XII. Rapport de la 
division de sûreté générale au ministre de la police. [Dans la 
marge : Vendée, Bordeaux, révolte d'Espagne, conspiration 
des Plombs.] 

« En recherchant avec attention les agents supérieurs de la trame 
dont on a saisi à Nantes les agents subalternes, on ne doit pas perdre 
de vue une indication d'un des complices et qui est fondamentale, 
savoir que le foyer de cette trame est à Bordeaux et communique 
avec l'Angleterre par le Portugal, en traversant l'Espagne. La 
division de sûreté générale a indiqué avec quelque certitude les 
membres de Fagence de Bordeaux dans la famille Donnissan, 
La Rochejaquelein et sa femme, fille de M'"^ Donnissan, veuve du 
fameux Lescure. On a rappelé Vaiicien Institut royal de l'an VIII et* 
surtout les vues que le duc de Lorges à Londres a toujours eues sur 
cette province, que ses deux fils parcoururent en l'an V, déguisés 
en marchands, conduisant leur marchandise sur des mulets... 

« Un vaste plan est organisé contre le Midi. On veut lier cette 
combinaison à la Vendée par Bordeaux et la côte de la Rochelle. 
Les expéditions qui se préparent dans les ports de l'Angleterre n'ont 
peut-être pas d'autre destination. La trame ourdie récemment contre 
Nantes et la Vendée est le produit de cette intrigue, qui a son foyer, sa 
caisse et ses moyens principaux à Bordeaux * . » 

(Arch. départ, de la Gironde, série M, police générale, 
affaires politiques, 1804-8.) 

67. — Paris, 20 pluviôse an XIII. Le conseiller d'Etat chargé du 
>' arrondissement de la police générale au préfet de la Gironde^ 
à lui seul. 

« Vous savez qu'il a existé, en l'an V, dans le Midi, une association 

1. Les deux pircos ((UJ et 67) sont empruntées au dossier du chimiste Cnzulet, 
auquel nous avons emprunte déjà une note relative nu duc de Berry. Cnxalet 
fut accusé de complicité avec Forestier et Céris, et arrêté en vendémiaire XIII. Ce 
dossier est aux Archives départementales de la Gironde, série M. Il est intitulé : 
« Police générale, nflaires politiques, an IX, 1804-1808 », non numéroté, comme 
toutes les liasses de la série M. 



72 CONCLUSION 

royaliste connue sous le nom dlnstitut philanthropique ou d'Institut 
des Amis de l'ordre. Le nommé Dupont, dit Constant, était, sous le 
titre de commissaire général nommé par Louis XVIIL le chef de 
cette association. Les députés des difiérents comités ne pouvaient 
arriver à lui que par l'intermédiaire d'un ex-apothicaire de la Char- 
treuse, auquel ils étaient directement adressés. . . 

(( Cette association fut désorganisée par l'arrestation qui eut lieu en 
messidor an VIII de plusieurs de ses membres. Dupont, Causse, un 
de ses principaux agents, Dumas, Lavalette, Papin et autres furent 
de ce nombre. Les papiers constatant l'existence de Tagence et l'or- 
ganisation royale qu'elle préparait furent trouvés chez Causse. Ces 
individus furent cependant mis en liberté, en l'an X, sous caution... 

« Les partisans de Louis XVIII renouvelèrent bientôt leur trame, 
mais ils donnèrent leur confiance à d'autres individus. Dès l'an IX, 
Forestier parcourut les départements de l'Ouest pour y rétablir les 
relations que l'arrestation des principaux membres de l'Institut avait 
interrompues. Il s'associa Céris,qui s'était distingué dans les guerres 
de Vendée, et le nommé Papin, ancien militaire, officier municipal 
de Bordeaux, désigné par les états de l'Institut comme commandant 
de cette ville. Papin s'adjoignit, à ce qu'il paraît, Acquart-Vreilhac, 
négociant, qui n'avait figuré jusque-là dans aucune des précédentes 
associations ^ à moins qu'il ne fût le marchand de sucre de la place 
Saint-Pierre chez lequel l'Institut tenait ses séances. 

«Onn'avufigurer dans la nouvelle association aucun des membres 
de l'ancienpe 2, si ce n'est Papin qui était accusé par la première de 
lui avoir soustrait une somme d'à peu près 80.000 francs et qui avait 
perdu entièrement sa confiance. » 

{Ibidem.) 

68. — Requête adressée par Papin au roi Louis XVIIL 

(En marge : demande de grade de 
lieutenant-général en activité. Le 
29 mai 1817, écrit à M. le maré- 
chal de camp Papin.) 

« Depuis plus de douze ans que je fus condamné à la mort pour 
m'étre attaché à la cause sacrée de Votre Majesté, j'ai parcouru les 
mers du nouveau monde, j'ai erré dans les contrées les plus loin- 
taines, sans presque trouver un abri contre le tyran qui me pour- 
suivait. Trois naufrages m'ont enlevé successivement toutes mes 
ressources et privent ma famille des résultats de mes longs et dou- 
loureux travaux. 

1. Inexact. Voir Acquart. Mémoire historique, p. 17 et M™^ de la Rochejaquelein, 
p. 231. Un des principaux membres de l'Institut au contraire. 

2. Inexact Au moins Acquart et Roger et sans doute plusieurs autres. 



CONCLUSION 73 

« Mais, Sire, pourrais-je me plaindre aujourd'hui que la Providence, 
qui vous a replacé sur le trône de vos pères, me ramène dans le sein 
de ma famille pour y vivre sous la protection de V. M. et me conisa- 
crer plus particulièrement encore à son service ? 

« Je ne craindrai pas de l'avouer à V. M., Sire, c'est la Révolution 
qui m'a fait entrer dans la carrière militaire. Elle avait exalté ma tête. 
Aussi, lors des premières levées de troupes en 1792, je fus fait, par 
le choix unanime de mes concitoyens (malgré que je me refusasse à 
cet honneur) lieutenant-colonel commandant un bataillon et confirmé 
par le ministre de la guerre. Tel était l'enthousiasme alors qu'au bout 
de quatre mois de garnison mon bataillon manœuvrait comme de 
vieilles troupes. 

« Envoyé dans le comté de Foix, j'apaisai les troubles religieux 
qu'on y avait suscités, sans avoir à regretter une goutte de sang. 

« La guerre avec l'Espagne me plaça bientôt sur un plus grand 
théâtre. Je fus chargé parle général Dagobert de diriger plusieurs 
colonnes dans la Cerdagne et le val d'Aran Le général en chef 
Muller m'offrit le commandement du régiment de Cambraisis, celui 
d'une colonne de grenadiers; je refusai. Nommé agent militaire, j'or- 
ganisai les chasseurs basques et divers autres dépôts de troupes. 

« Le ministre de la guerre me dirigea à l'armée des Pyrénées-Orien- 
tales ; le général Augereau, m'ayant distingué dans diverses occa- 
sions, me nomma commandant de son avant-garde, quoique je ne 
fusse que lieutenant-colonel. Bientôt après, je fus promu au grade 
d'adjudant-général, chef de brigade. Enfin, lors de l'attaque de 
Figuières, je pénétrai sous les retranchements à la tête de 6.000 chas- 
seurs, et le brevet de général de brigade me fut envoyé. 

« Toujours ennuyé deservircontremongré, je récidivai la demande 
de ma démission ; elle me fut encore refusée. Alors je prétextai de 
ma santé qui ne me permettait pas de continuer le service, et, à 
force d'argent, j'obtins enfin mon congé de réforme. 

« Quelle fut ma surprise en entrant à Bordeaux ! Le deuil était uni- 
versel par suite du sang qui avait été versé. Mon indignation contre 
le gouvernement atroce et sanguinaire fut portée à son comble. Mon 
cœur était trop droit, j'ose dire, trop pur pour n'être pas révolté à 
jamais d'une pareille Révolution. Je résolus donc de m'ensevelir dans 
le sein de ma famille et de mes amis. 

« Cependant il fallut céder aux vœux de mes concitoyens. Je fus 
nommé général commandant la garde générale bordelaise ; j'occupai 
successivement différentes places administratives ; je n'ai eu alors 
d'autre idée que de servir mes citoyens, et mes concitoyens peuvent 
me rendre le témoignage que j'ai souvent empêché le sang de couler 
dans cette ville. 

« C'est à cette époque, Sire, que je me liai avec les royalistes de la 



74 CONCLUSION 

Vendée et de Bordeaux. Ils méjugèrent digne d'être associé à leurs 
travaux. Et telle fut la confiance que je leur inspirai que je fus désigné 
à l'agence d'Augsbourg et nommé général commandant en chef la 
province de Guyenne, dans le temps où V. M. en avait nommé gouver- 
neur M. le duc de Lorges, homme universellement estimé parce qu'on 
l'a toujours vu dans le sentier de l'honneur et jamais dans celui de 
l'intrigue. Conformément aux instructions que me communiqua votre 
fidèle commissaire, M. Dupont-Constant, je travaillai à remplir les 
vues de V. M. avec un zèle qui devait suppléer au talent. J'organisai 
dans les formes un corps d'armée composé d'hommes fidèles ; cette 
organisation, Sire, était perfectionnée au point queles revues d'infan- 
terie, cavalerie, artillerie, se passaient régulièrement et nuitamment 
par trimestre, et que ces corps, malgré tant de circonstances décou- 
rageantes, se sont toujours considérés comme organisés. 

<( C'estalors, Sire, que lepeuple bordelais s'est attaché à votre cause. 
C'est avec les braves qui composaient cette organisation que j'ai eu 
le bonheur de délivrer plusieurs émigrés, soit en les enlevant des 
prisons, des hôpitaux, soit en attaquant militairement sur les grandes 
routes les escortes de gendarmerie qui les accompagnaient. Au 
moindre ordre, ces braves royalistes se trouvaient au poste désigné 
comme des troupes de ligne. 

« Quelque longs qu'aient été les malheurs du parti royal, quelques 
trahisons qui aient eu lieu, jamais on n'a pu le dissoudre *, et qu'il me 
soit permis de m'en glorifier. Sire, c'est à sa tête que le brave mar- 
quis de la Rochejaquelein a préparé et fait le 12 mars 1814, journée 
dont s'honoreront à jamais les Bordelais et qui a eu une si grande 
influence sur les destinées de la France. Hélas ! je n'ai qu'un regret, 
c'est de n'avoir pu en partager les dangers ; mais j'étais enchaîné 
dans le nouveau monde par des opérations commerciales que je ne 
pouvais abandonner sans blesser ma délicatesse. 

« Il était impossible, Sire, d'agir aussi activement que je le faisais 
et d'échapper à la police. En 1799, on lança contre moi un mandat 
d'arrêt; mais comme on ne trouva chez moi ni papier ni preuve, mes 
amis obtinrentma liberté; je ne restai pas moins sous la surveillance 
de la police pendant deux années. En 1800, je reçus du général comte 
deWillot,commandanten chef les provinces du Midi, le brevet de ma- 
réchal de camp dontje joins ici copie, ainsi que celle de l'ordonnance 
en vertu de laquelle il agissait. Peu après, les espérances des royalistes 
furent trompées. Cependant notre zèle fut le même ; aussi un second 
arrêt fut lancé contre moi par suite de l'affaire des généraux Pichegru 
et Moreau: quoique sans preuve, je fus condamné à mort par une 
commission militaire ; je me vis donc forcé d'abandonner mon 

1. Le corps d'armée. 



CONCLUSION 75 

poste, mon pays, mes affaires, mon épouse et mes quatre enfants. 

« Mais, Sire, dans cette situation j'ai senti toute la dignité de mes 
infortunes, et si jamais j'ai éprouvé des regrets, ce n'est point sur 
ce qui m'a attiré tant de maux, car je sens que j'ai fait mon devoir. 

« Une suite inconcevable de malheurs m'a empêché d'arriver en 
France en 1814. Dans ce dernier moment encore, je revenais sur un 
bâtiment à moi, lorsqu'à onze heures de la nuit, à deux lieues de 
l'île Ohénéague, entraîné par les courants et la tempête sur les récifs 
qui avoisinent cette île, jeTai vu se briser, ma cargaison s'engloutir. 
Moi-même, après avoir lutté entre la vie et la mort, j'ai été assez 
grièvement blessé pour craindre de perdre la main. Aujourd'hui 
qu'elle est rétablie, je viens de nouveau l'offrir à votre Majesté. 
L'honneur de vous servir est de toutes les récompenses celle que 
j'ambitionne le plus. 

(( Qu'il me soit permis. Sire, de rappeler à Votre Majesté que, 
depuis seize ans, je suis nommé, en vertu de vos ordres, maré- 
chal de camp, que j'ai été condamné à mort pour la cause de V. M. 
Et, si elle me juge digne d'une récompense, je la supplie de m'ac- 
corder le grade de lieutenant-général en activité de service. 

« Je suis avec un très profond respect, etc. 

(* Le maréchal de camp , 
Papin. 
(Archives administratives de la guerre, dossier Papin.) 



69. — Etat des services fourni par Papin [sans doute à la suite 
de la requête ci-dessus]. 

<( Papin E. J., né à Bordeaux le 27 février 1771. Lors de la forma- 
tion de la garde nationale à Bordeaux, il fut employé comme sous- 
officier en 1789; fit partie de la division commandée par le général 
Courpon, qui fut dirigée en 1790 sur Montauban, lors des troubles 
de cette ville. Nommé lieutenant-colonel, commandant le 8* bataillon 
de la Gironde, envoyé à l'armée des Pyrénées, le 15 octobre 1791, 
fut adjudant-général chef de bataillon, le 28 novembre 1794 ; promu 
au grade de général sur le champ de bataille de Figuières, grade qu'il 
a refusé ; il continua de servir en sous-grade jusqu'au 30 mars 1795. 

« De retour dans ses foyers, il fut nommé général commandant la 
garde nationale bordelaise. Passé au service du roi dans l'armée royale 
de Guyenne, le 27 août 1796 ; breveté maréchal de camp en vertu des 
lettres patentes du roi adressées au général Willol, 10 mars 1800. En 
cette qualité, commandant en chef l'armée royale en Guyenne. 

« Condamné à mort par une commission militaire formée par ordre 



76 CONCLUSION 

de l'usurpateur, comme étant au service du roi, obligé de se sous- 
traire aux poursuites, il se réfugia en Amérique. 

« Le général Papin, quoique éloigné de sa patrie, n'a pas cessé de 
s'occuper de l'armée dont le commandement lui avait été donné par 
le roi et d'entretenir une correspondance aussi active que les cir- 
constances le permettaient avec MM. le comte de Lorges, alors gou- 
verneur général pour le roi de la Guyenne, le général Willot, 
commandant en chef les armées royales, et avec le chef d'état-major 
de l'armée de Guyenne» Labarthe, qui l'informait plus particulière- 
ment de tout ce qui concernait cette armée, recevait ses ordres et les 
faisait passer, ce qui a duré jusqu'à l'entrée du roi en France en 
1814. 

(( Le maréchal de camp Papin a été confirmé dans son grade par 
ordonnance de Sa Majesté en date du 1^*" février 1817; son jugement 
a été cassé le 29 avril, même année. 

« Campagnes. — A fait les campagnes de 1792, 1798, 1794, 1795, aux 
armées des Pyrénées-Orientales et Occidentales, sous les ordres 
des généraux en chef Servan, Dagobert, Muller, Dugommier et 
Pérignon. » 

Actions et blessures [longue énumération ; la fin seule nous inté- 
resse]. (( Le général Papin organisa dans les formes un corps d'armée, 
malgré la stricte surveillance de la police et les dangers qu'il courait. 
L'organisation était perfectionnée au point que les revues d'infan- 
terie, de cavalerie et d'artillerie se passaient régulièrement par 
trimestre. 

«Il l'employa avec succès à faire enlever sur les grandes routes des 
émigrés escortés par la gendarmerie et, par des manœuvres hardies, 
il en fit arracher des prisons et des hôpitaux militaires. 

« C'est à la tête de cette organisation, au moment où il n'attendait 
que de nouveaux ordres pour agir, que, trahi et dénoncé, le général 
Papin fut condamné à mort par une commission militaire et, pour 
éviter l'exécution de ce jugement, il s'expatria. » 

(Archives administratives de la guerre, dossier Papin.) 



70. — Rapport fait au ministre, le 7 août 1817. 

(En marge : 3^ division. Bureau de 
la justice militaire.) 

<( Monseigneur a ordonné que le bureau de la justice militaire lui 
présentât un aperçu des incohérences qui se rencontrent dans la 
déclaration de M. le maréchal de camp Papin, comparée avec la con- 
duite qu'il a tenue. 

« On a l'honneur de faire remarquer que, si l'on se borne à com- 



CONCLUSION 77 

parer son dire avec ce qu'on connaît de ses actions, le Bureau ne 
pourra s'exprimer qu'avec beaucoup de réserve. En effet, on voit le 
maréchal de camp Papin quitter l'armée des Pyrénées et aban- 
donner le service de la République au moment où, parvenu au grade 
dégénérai de brigade, la carrière militaire semblait ne devoir lui 
présenter désormais que de belles espérances sous le rapport des 
honneurs et sous celui de la fortune. Et tout semble se réunir pour 
faire croire qu'il a fait ce sacrifice à son opinion pour la monarchie et 
et pour la monarchie légitime. 

<( A peine rentré dans ses foyers à Bordeaux, il se lie d'intention 
d'action avec les amis du roi. Ceux-ci ont une telle confiance en 
M. Papin qu'ils concourent de tous leurs moyens pour le faire nom- 
mer commandant de la garde nationale. Cet emploi étant compatible 
avec des occupations civiles, M. Papin se livre à des opérations 
commerciales, et c'est encore pour lui un moyen de servir la cause 
du roi. Il accueille à Bordeaux des agents de Sa Majesté et de Son 
Altesse Royale, Monsieur, lieutenant-général du royaume. Il obtient 
leur confiance, les loge chez des amis pour les soustraire aux inquiètes 
recherches du pouvoir usurpateur, se charge de diverses négocia- 
tions d'effets qui peuvent, malgré sa prudence, le compromettre au 
premier chef, éprouve des revers. 

« Une partie des fonds qui lui sont confiés sont saisis entre 
les mains d'un courtier. Ne pouvant plus tenir compte du dépôt, 
il offre des vins en paiement et part pour Paris presser des rentrées 
de fonds qui lui sont dus. Il loge chez M. le maréchal Moncey qu'il a 
connu à l'armée des Pyrénées. Cet asile semble le mettre à l'abri de 
tout soupçon. Cependant il est mandé à la police générale ; on lui fait 
subir plusieurs interrogatoires ; il nie tout, ne compromet ni la cause 
ni les individus et parvient, pour cette fois, non seulement à rassurer 
l'autorité sur son compte, mais même à inspirer quelque confiance 
au ministre de la police générale. Mais de nouveaux renseignements 
viennent éclairer le gouvernement. M. Papin ne peut plus abuser les 
dépositaires de l'autorité. Il est impliqué dans une conspiration 
connue sous le nom d'agence anglaise ; poursuivi devant une com- 
mission militaire à Nantes, il est, ainsi que ses principaux complices, 
condanmé à la peine de mort; ses biens sont confisqués. 

«M. Papin parvint ù s'échapper; il s'embarqua pour rAmérique 
où il est resté jusqu'à la Restauration du monarque pour le service 
duquel il avait exposé ses jours. 

<( Tel est l'historique de la vie politique de M. Papin. Les pièces 
nombreuses de son dossier et des témoignages honorables l'appuyant, 
sa déclaration ne dément point ces faits. Elle ne pourrait donc lui 
être opposée comme les contredisant ou comme j)rcscntant des inco- 
hérences ; mais Si on la compare aux déclarations faites par-devant 



78 CONCLUSION 

M. Viotte par MM. Ducloset de Céris, on est porté à croire que celle 
de M.Papin est inexacte et incomplète. 

« M. Duclos affirme que M. Forestier s'est plaint à lui, Duclos, 
d'avoir été indignement trompé par M. Papin qui, sur une somme de 
100.000 francs qu'il lui avait confiée, ne lui avait donné au moment 
de son départ pour l'Espagne que celle de 12.000 francs en or. 
Par conséquent M. Papin aurait gardé 88.000 francs. 

« M. Duclos ajoute que, d'après la narration de M. Forestier, 
M. Papin se serait excusé de ce qu'il avait été obligé de se servir 
des fonds de M. Forestier pour éviter d'être arrêté pour dettes. 

« On doit dire que cette version paraît plus naturelle que celle que 
M. Papin aurait faite alors à M. de Céris; qu'on avait opéré une saisie 
entre les mains du courtier chargé de négocier les effets de ces Mes- 
sieurs. Du reste, s'il y eut une saisie, elle eut lieu nécessairement en 
vertu d'actes réguliers dont M. Papin pourrait retrouver des traces. 

« M. de Céris, compagnon de M. Forestier, déclare avoir connu 
M. Papin en 1796, et M. Papin établit cette connaissance huit ans 
plus tard, en l'an XII. C'est par l'intermédiaire de M'"^' Donnissan 
et de Saluées que ces Messieurs se seraient trouvés en contact. La 
déclaration de M. de Céris relate des faits et des circonstances qui 
semblent lui donner la priorité. 

« MM. de Forestier et de Céris, porteurs d'ordres écrits de la main 
de S. A. R., Monsieur, le lieutenant-général du royaume, se rendi- 
rent à Bordeaux, en 1796, pour y établir un comité royal. MM. Dudon 
père et fils, qui en firent partie, découvrirent bientôt qu'il en existait 
un autre. C'est alors que M. Papin fut élu général de la force armée 
qui devait se lever dans la ville et dans le département. Et M. de 
Céris lui rend la justice qu'il déploya du zèle et de l'intelligence. La 
connaissance de ces Messieurs daterait donc de 1796. Elle se renou- 
velle vers la fin de 1803 ou au commencement de 1804. MM. Fores- 
tier et de Céris auraient engagé M. Papin à reprendre ses anciennes 
opérations sous leurs ordres. Ils lui auraient remis des traites à 
escomptes; leur valeur se serait élevée à 60 ou 80.000 francs. M. Papin 
aurait tenu compte d'une partie, peut-être même aurait-il réglé avec 
M. Forestier. Enfin M. Forestier aurait été obligé de partir pour 
Madrid, tandis que M. Papin serait parti pour Paris. Avant de 
quitter Bordeaux, M. Papin aurait écrit à M. de Céris pour l'assurer 
qu'il allait faire les plus grands efforts pour se liquider et, en atten- 
dant, il consentit un billet qui se trouve, ainsi que la lettre, parmi les 
papiers de M. de Céris en Angleterre. 

« Il résulte de l'ensemble de ces détails que la déclaration de 
M. Papin doit paraître inexacte et incomplète. 

« Que celle de M. Céris en ce qui concerne laquestion financière de 
M. Papin, paraît avoir été dictée par un sentiment de générosité. 



CONCLUSION 79 

(( Celle de M. Duclos porte toutes les apparences de la vérité, et on 
ne voit pas quel pourrait être le motif de M. Papin à déguiser sa 
véritable situation. Car, s'il y a eu force majeure pour 21.440 francs, 
la même force majeure justifierait un défaut de 60 à 80.000 francs 
comme celui d'une moindre somme. 

« En bas: Faire un rapport sur tout ce qui concerne M. Papin. Le 
roi décidera s'il veut lui accorder ou non la croix de Saint-Louis. » 
(Archives administratives de la guerre, dossier Papin.) 

Les pièces qui précèdent prouvent donc que Papin a servi d'intermédiaire 
entre les envoyés du comte d'Artois et du duc de Lorges, Forestier et Céris, 
et les membres de l'Institut philanthropique qui, comme Roger et Acquart- 
Vreilhac, ne renonçaient point, malgré la proclamation de 1 Empire, à l'espoir 
de rétablir en France la royauté. Dupont-Constant resta à l'écart du nou- 
veau complot. C'est pourquoi il voudrait laisser croire que les « travaux 
de l'Institut furent suspendus à Bordeaux comme dans toute la France », 
après 1800 {Essai, p. 110) et que l'Institut ne fut point mêlé au complot de 
1804 {Essai, p. 134). 

En réalité, des deux influences qui jusqu'alors avaient prédominé dans 
l'Institut, celle de Dupont et celle de Papin, la dernière l'emportait décidé- 
ment après l'arrestation de Dupont. Ce dernier était trop compromis pour 
qu'on l'employât de nouveau. En outre, il était l'agent de l'abbé Lacombe et 
de Dandré ; or Lacombe avait dû se cacher après 1800, car la police le cher- 
chait ; Dandré quittait Augsbourg ; l'agence de Souabe était dissoute, après 
l'arrestation de deux de ses membres, Précy et Imbert-Colomès, à Bayreuth, 
en 1801, la découverte et la publication de leurs papiers. 

Jusqu'en 1800, l'Institut bordelais avait reçu des ordres d'Augsbourg et 
de Londres. Désormais, il n'en reçoit plus que de Londres, par l'intermé- 
diaire du duc de Lorges et de ses amis. Et Papin, en relations avec le duc de 
Lorges, est considéré à Londres comme le véritable chef de l'Institut. 



B. — l'institut et l'entrée des anglais et des BOURBONS 

à Bordeaux (12 mars 1814). 

Après la découverte du complot de 1804 et la fuite de Papin en Amé- 
rique, pendant la durée de l'Empire jusqu'en 1813, les anciens membres de 
l'Institut n'osent se réunir en secret, en petit nombre et rarement, que chez 
les moins suspects d'entre eux, Queyriaux par exemple, ou Estebenet. 
Hoger est à Bayonne, où il fonde avec Hollac un commerce de liqueurs (qui 
le ruine) ; Acquart-Vreilhac est en fuite ; les Donnissan se terrent à Citran, 
surveillés de près par la police, qui essaie même de faire arrêter, sans succès 
d'ailleurs, Louis de la Rochcjaquelein. 

Mais, lorsque l'empereur est vaincu en Russie et en Allemagne, les roya- 
listes de Bordeaux reprennent courage. Louis de la Hochejaquelein, gendre 
de Mn'o de Donnissan, neveu par alliance du duc de Lorges, se cache à 
Bordeaux et devient le centre d'un petit comité royaliste dont un ancien 



80 CONCLUSION 

membre de Tlnstitut, Taffard de Saint-Germain, « capitaine » en 1800 d'une 
compagnie du Médoc, est le chef reconnu par Louis XVIIL 

Dans ce « conseil royal » de Bordeaux, dans cet « état-major * » de l'orga- 
nisation nouvelle, qui continue l'Institut sans lui être identique, nous 
retrouvons quelques membres de cet Institut, restés fidèles à la cause 
monarchique pendant l'Empire : Taffard, de Lur-Saluces, Queyriaux aîné, 
Marmajour, Estebenet, le médecin Dupont, parent sans doute de Dupont- 
Constant ^. 

Ce nouveau « conseil royal » organise une petite armée de défenseurs du 
trône, la garde royale, dont nous ne connaissons d'ailleurs que deux compa- 
gnies formées, la « compagnie d'infanterie d'élite », commandée par Badin, et 
la « compagnie de cavalerie des clievau-légers », commandée par Roger. 
Roger qui, dans l'Institut, avait commandé la « compagnie des guides à 
cheval )), se cachait à Bordeaux, pour échapper à la surveillance du redou- 
table Joliclerc, prévenu de son départ de Bayonne. 

Lorsque la défaite de Napoléon, après les premiers succès de la campagne 
de 1814, parut inévitable, à la fin de février, le maire de Bordeaux, Lynch, 
fut mis en relations avec Taffard et son conseil. Un envoyé de Bordeaux alla 
trouver Wellington à Saint-Sever et Wellington confia au maréchal Beresford 
la mission d'entrer à Bordeaux et d'y faire proclamer les Bourbons. 

Le 12 mars 1814, le maire Lynch ^, les adjoints, les membres du conseil 
de la garde royale, se rendirent au-devant du maréchal sur la route de Tou- 
louse, et l'accompagnèrent à l'hôtel de ville. Deux heures après, ils allaient 
à la rencontre du duc d'Angoulême, qu'on ramenait en triomphe à la cathé- 
drale, où l'archevêque célébrait le 2 e Deiim. 

Bordeaux est donc la première de nos grandes villes qui ait accueilli les 
Bourbons. Désormais, les coalisés pouvaient croire que la vieille famille royale 
était restée populaire en France. Le 12 mars influa donc d'une façon certaine 
sur les décisions du tsar Alexandre et des alliés, qui n'auraient peut-être 
pas rétabli les Bourbons sur le trône s'ils les avaient crus impopulaires. 
Songeons que le congrès de Châtillon ne se sépare que le 19. 

Les extraits suivants des Etrennes royales de 1818 prouveront que 
les anciens membres de l'Institut de 1800 ont joué un rôle décisif dans 
l'événement du 12 mars. — Cf. d'ailleurs Rollac, Exposé fidèle, p. 121 et 
suiv., et, dans cet Exposé, la lettre importante de Roger, p. 173 et suiv. ; 
les Mémoires de la marquise de la Rochejaquelein, dernier chapitre. 

1. D'après les Etrennes royales de 1818, cet « état-major » se composait du che- 
valier Taffard de Saint-Germain, « commandant en chef [de la garde royale] et 
président du conseil » ; le chevalier de Gombault, membre du conseil ; le baron de 
Budos, membre du conseil ; le comte Alex, de Lur-Saluces, membre du conseil ; le 
baron de Pomiés, membre du conseil ; J.-J. Luetkens, membre du conseil ; L.-Fr. 
Queyriaux aîné, capitaine adjoint, membre du conseil ; le marquis de la Rocheja- 
quelein, Fr. Queyriaux jeune, G. Bontemps-Dubarry, le chevalier de Clérans, le 
vicomte de Pontac, de Grivel, Arrouch, Marmajour, Estebenet, Dupont, etc. 

2. Ce fut Rollac, ancien membre de l'Institut, qui servit d'intermédiaire à Londres 
entre le Prétendant et les royalistes de Bordeaux. 

3. Lynch, maire de Bordeaux en mars 1809, successeur de Lafaurie-Monbadon. 
Cf. O'Reilly, Gradis et surtout Jullian, sur la journée du 12 mars. 



CONCLUSION 81 

71. — Extrait du récit de la journée du 12 mars 181^. 

« ... Depuis plus de dix ans, il existait dans cette ville une garde 
royale à pied dont la fidélité et le dévouement ne sauraient être 
mieux attestés que par le secret gardé sur sa formation. M. de Taf- 
fard, occupé, depuis plusieurs mois, à utiliser l'excellent esprit 
dont elle était animée, donna, la veille du jour mémorable, des ins- 
tructions aux principaux chefs... » 

[Le lendemain Lynch se rend au-devant du maréchal Beresford.] 
« La troupe fidèle, sous les ordres de M. Taffard de Saint-Germain, 
était disséminée le long de la route. Les membres du comité royal, 
un grand nombre de roj^alistes, la plupart à cheval, parmi lesquels 
on distinguait MM. d'Auch, de Pichon, Roger, de Lautrec, Duluc, 
deBouquies, Darmailhacq, de Canolle, Bontemps-Dubarry, suivaient 
le cortège sans affectation. » 

{Etrennes royales de 1818, p. 171.) 
Gf Etrennes de 1814. 

[Les Etrennes royales de 1817 adressent un appel aux anciens membres 
de l'Institut, lors de l'anniversaire du 12 mars :J 

« Officiers et soldats de cette légion mystérieuse, qui avez traversé 
les tempêtes révolutionnaires sans trahir le secret de votre associa- 
tion, venez célébrer le' 12 mars... » 

[Etrennes royales de 1817, p. 128.) 

72. — Certificat donné à M. de Boissac par le maire Lynch. 
[M. de Boissac est l'ancien secrétaire -général de l'Institut en 1800. 

« Le maire de la ville de Bordeaux certifie que M. Gh. Henri Ma- 
thieu de Boissac, ancien magistrat, s'est rapproché de lui, à l'époque 
du 12 mars dernier, pour justifier de son dévouement à la famille de 
nos rois et des principes qu'il n'a jamais cessé de professer. 
« En foi de quoi, je lui ai délivré le présent. 
« A Bordeaux, le 15 novembre 1814 

« Le g. de Lynch. » 
(Original conservé par la famille). 

73. — Pétitions adressées à la duchesse dAngoulème, en 1823, 
par d'anciens membres de Tlnstitul. 

(Extraits.) 

P. Domcc. — « Il a été toujours constant à ses principes ; il était 
un des membres de l'Institut qui a coopéré à l'organisation do la 
garde royale de Bordeaux. Il a été décoré du Brassard, donné à ceux 
qui ont contribué au 12 mars. » 

Marc Faure. — « B. Faurc, son père, et J.-P. Faure, son frère, 

6 



82 CONCLUSION 

sont des premiers qui formèrent la compagnie Badin, au 12 mars 
1814. C'est à eux que Mgr le duc d'Angoulême, dans la nuit du 12 au 
13, assis à sa table, demanda s'il pouvait compter sur eux... Ils 
eurent le brevet du Brassard. Ils étaient de l'Institut. » 

Jarry. — « Il n'hésita point, ily a 20 ans, à se faire inscrire au nom- 
bre de ceux qui offraient leurs biens, leurs personnes et leur vie pour 
travailler à relever un trône abattu. Au jour glorieux du 12 mars, on 
le vit un des premiers dans les rangs de la garde royale. Il y obtint 
une décoration dont cette garde fut honorée. » 

(Archives départementales, série M, pétitions à la duchesse 
d'Angoulême, 1823.) 

74. — Les décorés du Brassard. 

La comparaison de deux documents essentiels, la liste des principaux 
membres de l'Institut en 1800, donnée par RoUac en appendice de son 
Exposé, p. 209 etsuiv., et la liste des royalistes décorés du Brassard * en 
1814, liste donnée par les Etrennes royales de 1818, p. 171 et suiv., nous per- 
met d'apprécier le rôle joué par les anciens membres de l'Institut lors du 
12 mars. 

Nous relevons, parmi les treize cents noms (environ) des décorés du Bras- 
sard, quatre-vingt-dix des chefs civils ou militaires de l'Institut, Certaine- 
ment, si nous possédions la liste des simples membres de l'Institut, nous 
pourrions en signaler un plus grand nombre. 



1814 

Décorés da Brassard. 

(D'après lesEtrennes royales de 1818, 
p. 171 et suiv.) 

Acquart(R. Vreilhac). 



1800 

Membres de YInstiiut, avec leur 

grade dans l'Institut. 
(D'après Rollac, Exposé fidèle, p. 209 

et suiv.^.) 
Acquart [Mémoire historique de 
Dupont, p. 17]. 



1. Extrait des Etrennes royales de 1818, p. 168 et suiv. : d Depuis longtemps, la 
province de Guienne renfermait un très grand nombre de sujets fidèles, organisés 
secrètement en compagnies royales par les soins d'un chef plein d'activité et prêts à se 
montrer au premier signal... S. A. R. Madame la duchesse d'Angoulême avait dai- 
gné permettre que M. le comte de Blacas leur envoyât en son nom un ruban vert, 
comme signe de ralliement et un symbole d'espérance... S. M. Louis XVIII a bien 
voulu, après le 12 mars, donner son assentiment à l'institution de la décoration du 
Brassard, en faveur de tous ceux qui se sont signalés en cette occasioUf soit en servant 
dans les compagnies royales organisées par M. Taffard de Saint-Germain, et dans les 
corps de volontaires royaux à cheval, soit par leurs écrits ou leur participation aux 
mesures qui ont assuré le triomphe de la cause royale... Cette décoration a con- 
sisté d'abord en un brassard blanc attaché au bras gauche et orné d'un écusson 
portant ces mots: «Bordeaux, 12 mars 1814 »... Toutefois ce brassard ne pouvant être 
porté qu'avec le costume militaire, S. M. a daigné autoriser ceux qui auront reçu le 
brevet à le remplacer par une décoration suspendue à la boutonnière par un ruban 
vert liséré de blanc. » 

2. Je complète la liste de Rollac avec quelques noms de membres de l'Institut 
empruntés à diverses sources que je cite entre parenthèses. 



CONCLUSION 



83 



Andrieux père et Andrieux Jac- 
ques. 
Archbold(J.-B.). 

Aux (Le comte d') [V. d'Auch 
dans le passage cité des Etrennes 
de 1818]. 

Bacqué. 

Barbe J. -Baptiste. 

Barbe-Labarthe. 
Barrère. 

Beguey [3 cités: Jean, Jacques, Ber- 
nard]. 
Blanc (Noguès de). 

Bordes Marc. 
Boyé Pierre. 
Brochon Louis. 



Brussac Pierre. 
Castaing-Promis . 
Chaliva André. 
Clemenceau H. 
Cosse. 

Cruchon. 
Decharmois. 

Decours François. 
Delpech [3 cités]. 

Deschamps-Martin. 
Deynaud père et fils. 



Domcc [2 cités]. 

Duboscq aîné. 
Dumas [2 cités]. 

Dupont [médecin]. 



Andrieux, capitaine. 

Archbold, chef d'arrondissement 

à Bordeaux. 
Paris d'Auch, aide de camp. 



Bacqué, adjudant. 

Barbe, chef d'arrondissement à 
Bordeaux. 

Em.Labarthe,chefd'état-major(?) 

Barrière-Laberne, adjoint à l'état- 
major (?) 

Beguey [commis aux octrois, in- 
terrog. de Cosse]. 

Blanc-Noguez \_Mémoire historique, 
p. 23]. 

Borde [interrog. de Cosse]. 

Boyer, aumônier de l'Institut. 

Brochon Louis, fils de Brochon, 
membre du Conseil de l'Ins- 
titut, mort en 1815. 

Brussac, lieutenant. 

Castaing [interrog de Dupont]. 

Chaliva, capitaine. 

Clemenceau [interrog.de Cosse] . 

Cosse, président d'arrondisse- 
ment de Bordeaux. 

Cruchon [interrog de Cosse]. 

Descharmes , commandant en 
Médoc (?) 

Decours, adjoint à Bordeaux. 

Delpech [Mme de laRochejaquelein, 
p. 231]. 

Deschamps, capitaine. 

Deynaud, membre du conseil in- 
time et secret. 

Domec [pétition à la duchesse d'Ân- 
gouléme]. 

Dubosc, capitaine. 

Dumas, adjoint pour les opéra- 
tions de la comptabilité. 

Parent sans doute de Dupont (dit 
Constant). 



84 



CONCLUSION 



Diipouy Pierre [2 cités]. 

Duprat [4 cités]. 
Diipuch J.-B. 
Durand [2 cités]. 

Estebenet. 

Eyquem Louis. 
Faget [2 cités]. 

Faure [4 cités dont B. et J.-B.J. 

Fieuzal Jean. 
Fumel Jacques. 
Gaudin [2 cités]. 
Gautier [2 cités]. 



Gérus de Laborie, père et fils. 

Grillet. 

Hagry Louis. 

Laborde [3 cités]. 
Laclotte J.-L. 

Laffite André. 
Lamarche Jean. 
Laporte J.-B. 

Latour Bernard. 

Lavidalie Bernard. 
Laville Guillaume. 
De la Ville Miremont. 



Laurent Léopold. 
Leclerc aîné, Martial. 



Dupouy, chet d'arrondissement 
à Bordeaux. 

Duprat [Essai, p. 46]- 

Dupuch, lieutenant. 

Durand (de Vcyrer) [intcrrog. de 
Cosse]. 

Estebenet, chef d'arrondissement 
à Bordeaux. 

Eyquem, capitaine. 

Faget aîné, capitaine, et Faget 
jeune, lieutenant. 

Faure B. et J.-B. [pétition à la du- 
chesse d'Angoulême] . 

Fieuzal, lieutenant. 

Pons Fumel [interrog. de Cosse]. 

Gaudin, lieutenant. 

Gauthier, major de l'infanterie, et 

Gaultier, major attaché à l'état- 
major. 

Gérus, capitaine. 

Grignet [Essai, p. 46] (?) 

Hagry [M'^e de la Rochejaquelein, 
p. 231, 260J. 

Laborde, adjoint à Bordeaux. 

Pitar-Laclothe, lieutenant [Cf. 
Laclotte, Essai, p. 46, 134]. 

Lafitte, lieutenant. 

Lamarque [interrog. de Cosse] ? 

Laporte J.-B. [pétition à la du- 
chesse d'Angoulême] . 

Latour, président d'arrondisse- 
ment à Bordeaux. 

Lavidalie, lieutenant. 

Laville, notaire, membre du con- 
seil général de l'Institut [d'a- 
près Rollac, p. 210]. Delà Ville, 
notaire, sert de caution à Du- 
pont-Constant, en messidor 
an XIII [lettre de Pierre à Fou- 
ché, dans F, 6256]. 

Laurent (de Saint-) [interrog. de 

Cosse]. 
Leclerc [interrog. de Cosse]. 



CONCLUSION 



85 



Lestrade [2 cités]. 



Lur-Saluces (de), Eugène et 
Alexandre. 

Magnac. 

Maignol de Mataplan. 

Malescot (de). 
Marmajour. 

Mercier Etienne. 
Meslon '^de) [6 cités]. 

Moreau [3 cités]. 

Papin, le général et son fils. 



Pascal [2 cités]. 
Périer Jean 
Perrin ' (le chev. de). 
Planet André. 

Poujet jeune et du Pouget de 
Belair. 



Poupart J.-B. 
Prunier (de) Mathieu. 

Queyriauxaîné. 

Renard Pierre. 
Rey [4 cités]. 

Riffard Jean. 
Roger .I.-B.-A 



Lestrade !dit Kitton, Mémoire his- 
toriqucy p. 23 ; Essai, p. 80 ; Es- 
trade, lieutenant, dans Rollac, 
p. 213]. 

Lur-Saluces (de) [les deux cités par 
Mme de la Rochejaquelein, p. 231 
et 233J. 

Magnan, membre du conseil in- 
time de M"'^ de Donnissan. 

Magnol, chef d'arrondissement 
en Médoc [appelé Maignol dans 
les pièces de F7 6256 ou Magnol] . 

Malescot (de) 'interrog. de Cosse]. 

Marmajour, chef d'arrondisse- 
ment. 

Mercier [interrog. de Cosse]. 

Meslon (de), colonel du régiment 
sédentaire. 

Moreau, chef d'arrondissement 
en Médoc. 

Papin, membre du conseil intime 
de la marquise de Donnissan 
et général commandant la divi- 
sion de la Gironde. 

Pascal-Sabès, major-général (?) 

Perrier, lieutenant. 

Perrin [interrog. de Cosse]. 

Planet, lieutenant. 

Pouget [restaurateur, interrog. de 
Dupont] et du Pouget de Be- 
lair [pétition à la duchesse 
d'Angoulême] . 

Poupard, capitaine. 

Prunier, trésorier et payeur de 
l'Institut. 

Queyriaux, membre du conseil 
intime de M'"*^ de Donnissan. 

Renard, capitaine. 

Rey, armurier [interrog. de Du- 
pont]. 

Richard J. [interrog. de Cosse] (?) 

Roger (.I.-B.-A.), capitaine de 
la compagnie des guides à 
cheval. 

6* 



86 



CONCLUSION 



Rollac père 



Roquet père et fils. 



Seguin [2 cités]. 
Seignouret Pierre. 

Taffard de Saint-Germain, 



Véran [3 cités]. 



Rollac, capitaine de rétat-major 
de l'Institut, auteur de VEx- 
posé fidèle. 

Roquet père, lieutenant. 

Roquet [armurier, interrog, de 
Cosse] . 

Seguin [interrog. de Cosse]. 

Seignouret, major du régiment 
sédentaire. 

Taffard de Saint-Germain, capi- 
taine de rinstitut dans le Mé- 
doc. 

Veran, lieutenant. 



Le duc d'Angoulême resta à Bordeaux jusqu'au 23 mai 1814. Les Anglais, 
commandés par lord Dalhousie, n'en repartirent que le 23 juillet. 

L'Angleterre, nous l'avons prouvé, avait contribué à la fondation 
de l'Institut. Elle avait essayé de tirer parti de cette organisation, en 
l'an V, contre le Directoire, en l'an VIII, dans le Midi, en l'an XII, 
au moins à Bordeaux, contre Bonaparte. Elle avait dépensé des 
sommes considérables, pour l'étendre à toute la France ou pour la 
fortifier dans le Midi. Elle retirait, en mars 1814, le bénéfice de ses 
intrigues : l'entrée du maréchal Beresford à Bordeaux était pour 
elle et pour la monarchie légitime, qu'elle protégeait ouvertement, 
une grande victoire politique. 



vu : 
Le 18 janvier 1908. 
Le Doyen de la Faculté des Lettres 
de l Université de Paris, 
A. Croiset. 



vu ET PERMIS D IMPRIMER : 

Le Vice-Recteur de l Académie de Paris, 

L. LiARD. 



INDEX 

DES NOMS DE PERSONNES ' 

[Ajouter les noms des royalistes décorés du Brassard, p. 82]. 



Acquart-Vreilhac, 36 n., 70, 71, 72, 79. 

Andréossj^ 34. 

Angouléme (duc d'), viii, x, xxi n., 

XXIII n., 63, 70,82. 
Angouléme (duchesse d'), xviii n. 
Arnozan, xxiv. 
Artois (comte d'), vu, ix, xii, xvii, xviii, 

3, 9, 11, 14, 17, 18, 19, 23, 25, 29, 30, 

31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 

41,63,77,78,79. 
Arvor (iW^e d'), ix n. 
Augereau (général), xxii n., 70, 73. 
Aulard, viii, xi n., xxvi n. 
Avaray (d), 7, 8. 
Aymé (J.-J.), xix n., xx n. 

Baboin. 5, 26. 

Babut,57, 59. 

Badin, 80, 82. 

Ballot, 5, 7. 

Baquenier-Desormaux, ix n. 

Bâtante (de), ix n. 

Barras, xviii n., 2 n., 12 n., 44. 

Barsac, xv. 

Barthélémy, 16. 

Batbédat, 71. 

Bayard, 4, 44. 57. 

Beauchamps ^de), xiv. 

Becquey, 7 n. 

Beresford (maréchal de), viii, xxi n , 80. 

Berger, 42. 

Hernadauy x, xv n., xxiv, xxv n., xxvii, 

43, 66. 
Bernier (abbé), xvii n. ' 

Berry (duc de), 26 n., 36 n.,63, 71 n. 
Herthier, 34. 
Bethman, 71. 

Bertrand Saint-Hubert, 70. 
Beurnonvillc, 34, 43. 
Boessiùre (de la), 33. 



Boissac (Mathieu de), Tristan, xix n., 

xxvii, xxviii, 54, 57, 81. 
Boissac (de), x n., 22 n, 
Bonaparte (Napoléon), vu, 8, 12 n., 

16 n., 31, 35. 
Bonaparte (Lucien), 65. 
Bonnaffé, xiv. 
Boulay de la Meurthe, viii, xii n., xiii n , 

xvi n., 25 n. 
Bourbon (duc de). 40 n. 
Bourmont, 31 n., 33, 39 n., 44. 
Bourrât, 38 n. 
Brochon père (avocat), xvii, xix, 45. 48, 

50, 56, 59, 60. 
Brochon fils, xv. 
Brottier (abbé), xi, 2 n., 3. 
Brizard (Marie), 70 n. 
Brûlé, 46, 57. 
Brune (général), 33 n. 
Brunet, 29. 

Brunswick ^duc de), 2 n. 
Buckingham (duc de), 19. 
Burkel, 30. 

Cadoudal, vu, ix, 29, 30, 31, 32, 36 n., 

38, 39, 40. 
Caire {Jardin), xiii n., xvi, xvii, 3. 4, 

5 n., 6, 7. 
Canning, 8, 12 n. 
Carency (prince de), 44. 
Carnot, 6 n., 51. 
Gassol cadet, 52, 53. 
Castelbert. xxiv. 
Castelnau (de), 17 n. 
Caudevnl, 52, 53, 64, 57. 
Caudrillier, xii n., 2 n;, 7 n. 
Cazalet, 36 n, 71 n. 
(déleste, X n. 

Céris, XVII. 36 n, 70, 71, 72, 78,79. 
Chaigncau, 50. 



1 . LcH num> d'auteuri en italique. 



INDEX 



Ghampagny, 33 n. 

Chaptal, 33 n. 

Charles (archiduc), 9, Un., 18, 24. 

Charette, 1, 45. 

Chassagne (de la), 63. 

Chassin, vin, xi n., xvii n., xxiii n. 

Chauvot, XVII n. 

Civrac (duc de), xvii. 

Clauzel, XVIII, 

Clemenceau, 53, 57. 

Clermont-Gallerande, 7 n. 

Coigny (chev. de), vu. 

Condé (prince de), xii, 1, 20, 26, 32 n., 

40n.,63. 
Cornu, XV. 
Cosse, XX, XXV, 43, 44, 45, 52, 53, 54, 56, 

57,58, 59,61, 65, 66, 72. 
Craufurd fcolonel), 9, 10, 11, 14. 
Crénolles (de), vu, 33, 34. 

Dagobert, 73, 76. 

Dandré, x, xii, xiii, xvi, 1, 3, 4, 5, 6, 7, 

8, 9, 15 20, 22 n., 23, 24, 26 n., 27, 

28 n., 32, 37, 38, 41, 42, 43, 44, 79. 
Daniaud-Duperrat, 70. 
Danican (général), 28 n. 
Daudet (E.), viii, xvii, 7 n., 12 n., 22 n., 

24 n., 28 n., 36 n., 70. 
David-Monnier, 12 n. 
Delacroix, 66 n. 
Delamarre, 4, 38 n. 
De La Ville, 66. 
Delerse, xvii. 
Delormel, xv. 

Desmarets, 6 n., 43, 44, 49, 50, 51, 64. 
Despomelles, xi, xii, 2 n., 3, 4, 5, 6, 7. 
Destang, xv, xxiii. 
Destravaux, xxvi, 29, 38 n., 44. 
Devos, 52. 
Deynaud, xviii, xxii. 
Diego Carrera (banquier), 71. 
Donnissan (marquis de), xvii n. 
'Donnissan (marquise de), xvii, xviii, 

XIX, xxi, xxn, 49, 57, 71, 78, 79. 
Donnissan-Lescure (V. M^^ de la Ro- 

chejaquelein). 
Doppet (général), xxii, 78. 
Dubois (Voir Léon). 
Dubois, préfet, 66 n. 
Du Bouchage, 31. 
Dubourg de Pourquerie, xvi. 
Duchesne de Beaumanoir, xvi, xix, xxi n. 
Duclos, 78,79. 
Dudon père, xviii, xxi, 78. 
Dudon de Lestrade, xviii, xix n., xxi, 

XXV n. 
Dufour (général), 46, 52. 
Dugommier, 76. 
Dumas, 45, 56, 65, 72. 
Dundas, 31. 



Dupérou, 10, 13, 20, 35. 
Dupont (Pierre), 22, 57. 
Dupont-Constant, viii, xiii n., xiv, xvi, 
XIX, XX n., xxi-xxv, xxvii, xxviii, 4, 7, 

9, 19, 21, 22, 28 n.. 29, 30, 31, 36 n., 
42, 43,45,49, 52, 53,54, 56, 57, 58,59, 
62, 65, 66, 72, 74, 79. 

Duport, 62, 64. 

Dupré de Saint-Maur, xvii n. 

Dupouy, 48, 49, 65. 

Dupuy, XXIV. 

Durand, 52, 53, 57. 

Durfort (de), 45, 57. 

Dutheil, IX, 3, 12, 13, 16, 17, 31, 33, 34, 

35, 38. 
Duval (M-ne), 45, 56, 65. 
Duverne de Presle, xi, xviii, 2 n., 3. 

Edouard (V. La Morlière). 
Elissagaray, xxvii, 9. 
Emerigon, 44 n. 
Emmery, vn, 33 n. 
Escars (comte d'), 37. 
Estebenet, xx, xxi n., 79. 

Fauche-Borel, xiv, 10, 12 n., 28 n., 

36 n., 39, 41. 
Feret, xvii n., xix n. 
Ferrand, 20. 
Ferrère, 50 n. 
FKnt, 16, 17, 35. 
Floirac (comte de), xiii, 21, 22 n., 45,56, 

59, 63. 
Fonbeton (Boniface de), 22 n. 
Forestier, xvii, xviii, 36 n, 70, 71, 72,78,79. 
Forneron, vin n., 7 n. 
Fouché, IX, XIV, XXVI, 43, 48, 65, 70. 
Francoul, 63. 

Frère, 12, 32, 33, 34, 35, 38, 39, 40. 
Frotté (de), 33. 

Gassiot, XVII. XIX. 

Gibert de Moras, xiii. 

Gibert-Desmolières, xix n., xx n. 

Gogué, 70, 71. 

Goursac, xv. 

Gradis, 80. 

Grenville (lord), ix, x, 2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 

10, 12, 14, 15, 17, 18, 19, 23, 24, 25 n., 
26, 27, 31, 32, 33, 34, 35, 37, 39 n., 
40, 41. 

Grenville (Thomas), 18. 
Guichard (Hilaire), 56. 

Hagry, xxi n., xxiv, xxv, 9, 48. 
Harcourt (duc d), xi n., 2, 3, 19. 
Harlé, x n., 70. 
Hauterive (d'), xin n., 25 n., 28 n., 63 n., 

64 n., 70 n. 
Havre (duc d'), xviii, 57. 
Hoche (Général), 1, 16. 



INDEX 



89 



Hotze, 18. 

Hyde de Neuville, vïi, ix, 31, 32, 33, 34, 
35, 39. 

Imbert-Colomès, 7, 20, 21 n., 79. 

Jackson, 27, 28 n. 
Jacqueneau, 70. 
Jagault (abbé), xviir. 
Jardin (V. Caire), xiii n., xvi. 
Joliclerc, 44 n., 80. 
Jullian, IX, 80. 

Keith (lord^, 27. 

King (John), 16. 

Kirwan, 57. 

Korsakoff (Général), 9, 14 n., 18 n. 

La Barberie, xii, 4, 7. 

Labarthe (Blondel), xx n., xxii, xxiii,76. 

LaboubéCy xvii n. 

Lacombe (abbé Fenis de), xiir, xix, xx, 

5, 7, 45, 56, 59, 79 
Lamarque, 58. 
La Morlière (Duclos de), dit Edouard) 

XIII n., 59, 62. 
Langlois, xix n., xx n. 
Lannes, xv, xxii n., 70 n. 
Lanzac (marquis de), 51, 57. 
Larivière, 57. 
La Rochejaquelein (marquise de), ix, 

XVII, xviii, xxii n., XXIV n., 70 n., 71, 80. 
La Rochejaquelein (Henri de), xvii n., 

XVIII 

La Rochejaquelein (Louis de), xviii, 

XXI n., 70, 71, 74, 79. 
Larue, xxi n., 12, 16,31. 
Latapy, 48, 59. 
Latour, xx, xxi n., 58. 
Latour-Olanier, xx, xxi n., xxiii n. 
La Tour (Péfau de), xxi n. 
La Trémoille (prince de), xii, 7. 
Lavalelte, 45, 56, 65, 66, 72. 
Lavignc, xxvi n., 9 
Lebon, viii n., ix, 7, 8, 11, 14 n., 22 n., 

24 n., 28 n., 36 n. 
Lebrun. 41, 50. 
Leclerc, 4, 5. 
Lefèvre, 34. 
Lemaîtrc, 2 n., 17 n. 
Léon, 6, 45. 

Lcstrade, xix n., xx, xxiii n., xxvi, 9. 
Lctcllier, xx, xxi n., 58. 
Lorgcs (duc de), xvin, xix, 30, 35, 48, 

71, 74, 76, 79. 
Louis XVL XVIII. 
Louis XVIIL VIII n., xii, xvi, xxvi, 7, 17, 

20, 25, 26, 28, 30. 32, 38 n., 41, 45, 72. 
Lucccmond (de), 57. 
Lullin, 18 n. 



Lur-Saluces (de), xxv, 80. 
Lynch (comte de), 80, 81. 

Madelin, xrv. 

Magnol, 46, 48, 50, 53, 59, 65. 

Maillan (de), xxii, xxiv. 

Maitland, 51 n. 

Malescot (de), 53, 57. 

Malinot, 53. 

Mallet(de), 33. 

Malot, 51. 

Malouet, 12 n. 

Manem, 63. 

Marcarteau, 58. 

Marmajour, 80. 

Martel {comte de), ix, 7, 31 n., 33 n.,38, 

39, 51 n. 
Martin (Jacques), 5. 
Marut, 21 n., 22 n., 27 n. 
Masséna, 9, 18 n., 19, 27 n., 55. 
Mayeras, 51. 
Mazel, 25 n. 

Mêlas (baron de), 27, 28 n. 
Meller, xix n. 
Mercier (de), 33. 
Mercier (V^^), 43. 
Mésière (de), Wells, xii n. 
Meyer, 44. 
Michaud, xvii n. 
Minto (lord), 22, 24. 
Mirabeau, xii. 
Moira (lord), xviii. 
Moncey (général), xxu n., 70 n., 77. 
Montchenu (de), 39. 
Montesquiou, 7 n. 
Montferrat, 39. 
Moreau, 68, 74. 
Morille, xxvii, 9. 
Mulgrave (lord), 14. 
Muller, 73, 76. 

Nettement, ix n. 

Noyant (comte de), 25 n., 62 n. 

Olivier, 50. 

Orange (prince d'), 12 n. 

O'Reilly, ix, xv n., xxvi n., 80. 

Paget, 27. 

Papin (Servant), xix, xxii, xxvii, 30, 31, 

35 n., 36, 43. 45, 46, 48, 50, 53,56, 57. 

58, 59, 60, 70 à 79. 
Partarricu, xxiv, 47. 
Pau (de), 51. 

Pclet de la Lozère, xiii. 25 n. 
Pcnicnud, 57. 
Perceval {de), 44 n. 
Pcrignon, 76. 
Périgord aine, 52, 53. 57. 
Peyronnet (de), xv n. 



90 



INDEX 



Pichegru, vn, xiii n., 1, 9, 10, 12, 13, 
14 n., 15. 16, 18, 20, 21, 22, 23. 24, 
25,28, 29, 31, 32, 33 n., 36, 37, 39, 
40, 41, 62, 63, 64. 65, 68, 74. 

Pierre (Pierre), ix, 43,48, 50, 51, 52, 56, 
59.60 64, 65. 

Pierron, 51. 

Pitt, 17, 19, 31, 34. 40. 

Planette (Planet), 58. 

Plunkett, 18 

Portland (duc de), 12 n., 17, 34. 

Pouget, 58. 61. 

Power, 26, 27. 

Précy (de), 5, 7, 11, 15, 22, 23, 24, 25, 
27, 63, 79. 

Prévalaye (de la), 33. 

Puivert (marquis de), xiii n., 25 n., 
27 n., 28 n., 62, 63. 

Puvert (Vassal de), 64. 

Que3a*iaux (aîné), 56, 79, 80 

Ramsay, 11 n., 18 n. 

Ratel, 35. 

Ravez, xv. 

Revel (chevalier de), 64. 

Richer Serizy, xix n., xx n. 

Rivière (marquis de), 38 n. 

Roger, x n., xxrii, 70, 71, 72 n.. 79, 80, 

81. 
Roll (baron de), 11, 17, 32 n., 36, 38 n., 

40. 
Rollac, viii n., ix, xv n., xvii n., xviii n., 

XIX n., xxin.jxxii n., xxiii n.,36, 70 n., 

79, 80. 82. 
Rougé (baron de), xxvi n., 9. 
Rougier (abbé), xin n., 28 n., 62 n., 63. 
Rousseîin de Saint- Albin, 29 n. 
Royer-Collard, 7. 

Sabès, xxn, 58. 
Saint- André, 64. 
Saint-Laurent, 57. 
Saint-Prix, 57. 
Salis (baron de), 32 n, 
Seguin, 58. 



Servan,60 n., 76. 

Servant (v. Papin). 

Soubardière 52, 53, 54. 

Souvarof (général), 14 n. 

Speau, 58. 

Stamfort, 12 n., 14. 

Stofflet, 1. 

Stuart, 26. 

Taffar de Saint-Germain, xxi n., xxin, 

80. 
Talbot, 7, 8, 11, 15,34. 
TallejTand, 17 n,, 41. 
Talmont (prince de), xvii n. 
Tascher de la Pagerie, 54, 57. 
Tavernier, 58. 
Thibaudeau, ix, 43, 44, 45, 46, 49, 65, 

66 n. 
Thornton, 26, 27. 
Thugut (baron de), 22, 23, 24, 25 n., 

28 n., 41. 
Tinseau d'Amondans, 36. 
Tristan (V. M. de Roissac). 
Tronchon, 63. 

Valdené, 4. 

Vandal, viii, 22 n., 31 n. 
Vezet (de), 17, 22 n. 
Victoire {M'^^), xvii. 
Viotte, 78. 

Wellington, 80. 

Wells (V. de Mésières , xii n. 

Wickham, ix, x,xii, xiii, xvi n., xxvii, 

1-7, 9, 11-15, 17-26, 28 n., 29, 31, 32, 

37, 38, 41, 44. 
Willems, 63. 
Willot (général), vu, xm n., xxii n., 

xxvii, 16, 17. 20-30, 31, 32 n., 36 n., 

41, 62. 63, 64, 74, 75, 76. 
Windham, 17 n. 

York (duc d'), 14 n. 

Zag, 27. 



TABLE DES MATIERES 



Préface. — Objet de cette publication ; documents ; plan vu 

Introduction. — l" L'Institut philanthropique de Bordeaux avant Fructidor. xi 
2o Les Instituts du Midi et Tlnstitut philanthropique de 

Bordeaux après Fructidor xix 

l'-e PARTIE 

LA CONSPraATlON ANGLAISE ET LES INSTITUTS PHILANTHROPIQUES DU MIDI, CELUI 

DE BORDEAUX EN PARTICULIER 1 

A. — L'Angleterre et la fondation des Instituts (1796-98) 1 

B. — La conspiration anglaise dans l'Est et le Midi de la France au début de 

la 2' coalition, avant Zurich (1799). Rôle attribué aux Instituts du 
Midi 9 

C. — La conspiration anglaise dans l'Est et le Midi de la France après Zurich, 

avant Marengo (1799-1800). Mission de Dupont-Constant à Augsbourg. 19 

D. — La conspiration anglaise à Paris et dans l'Ouest en 1799-1800. 

Relations de l'Institut bordelais avec la Vendée et Londres. ... 29 

Ile PARTIE 

LA DÉCOUVERTE DU COMPLOT BORDELAIS EN l'aN VIU. . 43 

A. — L'arrestation de Dupont et de Cosse. Correspondance de Desmarets avec 

le commissaire de police Pierre et le préfet Thibaudeau 43 

B. — Pièces saisies chez Cosse et les interrogatoires 52 

C. — /îap/)or/s de Pierre et déclaration d'Edouard 59 

D — Elargissement des prévenus;, optimisme officiel 65 

CONCLUSION 

l'institut après le complot DE 1800 jusqu'à l'entrée DES ANGLAIS 
ET DU DUC d'aNGOULKME A BORDEAUX (12 MARS 1814). 

A. — L'Institut et le complot de 180U 70 

B. — L'Institutet Ventrée des Anglais et des Bourbons à Bordeaux {12 marslSi^t). 79 

INOEX des NOMS DE PERSONNES 87 



PMUn. - lociété mnaiu d'lrnprimeri« it di llbrtirts. 



PLEASE DO NOT REMOVE 
CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET 

UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY 



DC Caudrillier, Gustaf 

186 L'Association royaliste de 

•5 l'Institut philanthropique à 
G38 Bordeaux et la conspiration 
anglaise en France